Le slogan « l’école à bout de bras » est tout à fait justifié

2015/09/08 | Par Stéphane Lapointe

L’auteur est président de la Fédération du personnel de l’enseignement privé (FPEP-CSQ)

Dans le contexte actuel des négociations au secteur public et des choix politiques et économiques du gouvernement, il est inquiétant de constater les reculs que celui-ci nous propose. À regarder aller le conseil des ministres, on constate que le Québec progressiste n’est plus. On assiste plutôt à une vente aux enchères de l’État québécois motivée par le chacun pour soi et le « Au plus fort la poche ». Est-ce réellement ce que l’on souhaite comme citoyens : payer encore plus pour recevoir moins des services dont la qualité s’effrite ?

En éducation, l’école publique se retrouve à court de moyens pour offrir les services requis pour ses élèves. Le message qui est envoyé à tous les travailleurs de l’éducation est de travailler plus pour un pouvoir d’achat qui ne cesse de diminuer. C’est méprisant et réducteur !

Depuis 2008, ce sont les coupes d’un milliard de dollars en éducation qui laissent l’école publique exsangue et son personnel, épuisé. Le slogan de nos collègues qui « portent l’école à bout de bras » est tout à fait justifié.

Alors que le gouvernement dit agir pour l’avenir des enfants du Québec, il fait exactement le contraire en omettant d’assurer une éducation de qualité à ses futurs citoyens. Alors que les pays émergents génèrent de plus en plus de citoyen informés et éduqués, peut-on se permettre, au Québec, de sacrifier une génération sous prétexte d’atteinte du déficit zéro ? L’équilibre budgétaire ne servira-t-il qu’à générer de maigres baisses d’impôts ? À quoi serviront-elles si nous sommes obligés de défrayer plus pour l’électricité, les frais de garde, l’école, nos soins de santé et médicaments qui ne seront plus offerts gratuitement ?

Il faut s’inquiéter du plan économique de démantèlement des services publics du gouvernement Couillard. Le recours au secteur privé n’est pas synonyme d’économie pour le contribuable. Le chercheur socio-économique de l’IRIS, Bertrand Schepper, rapportait, dans son billet du 18 juin dernier1, que selon des données de Statistiques Canada « un dollar dans le secteur public rapporte en moyenne 1,11 $ au PIB québécois alors qu‘un dollar d’investissement dans le secteur primaire produit en moyenne 0,80 $ ». C’est quand même pas mal comme rendement pour le contribuable québécois !

Les coupes dans les services publics sont sauvages car non seulement elles génèrent des pertes d’emplois qui font stagner l’économie des régions, mais elles se répercutent aussi en d’importantes baisses de services pour les citoyens. En éducation, on prive de l’accès à des services desquels ils ont réellement besoin des enfants démunis ou en difficulté. En faisant cela, on risque de les empêcher de se réaliser pleinement et de contribuer au développement de la société québécoise. C’est la raison pour laquelle des parents font des chaînes humaines autour des écoles ces jours-ci. Si les enfants sont pris en otage, ce n’est pas par les syndiqués mais bien par le gouvernement qui abandonne ses responsabilités envers ses citoyens et la Loi sur l’Instruction publique.

Messieurs Couillard, Coiteux, Blais et Barrette, cessez de tirer dans les pieds de vos propres citoyens ! Ce n’est pas un Plan nord qui va assurer l’avenir économique du Québec mais des investissements massifs et récurrents en éducation, qui garantiront le développement d’une société plus juste et mieux outillée pour faire face aux défis de demain.

1  : B. Schepper « Les compressions économiques dans l’administration publique : utiles pour le développement ? » [en ligne] billet du blogue l’Institut de recherche et d’information socio-économique, 18 juin 2015, adresse : http://iris-recherche.qc.ca/blogue/les-compressions-economiques-dans-l-a...