A qui le pouvoir ?

2015/11/25 | Par Monique Pauzé

L’auteure est députée du Bloc Québécois

Le documentaire Pipelines, Pouvoir et Démocratie de l’ONF était présenté, le 18 novembre dernier, à la salle Jean-Claude Lauzon, en la présence de l’auteur Olivier D. Asselin.

Ce documentaire pose la question du pouvoir politique, de sa localisation, de la possibilité de changer les choses, en suivant le périple de personnes qui ont choisi des différents moyens pour influencer des décisions, qui nous permettraient de réduire notre dépendance au pétrole et, surtout, de contrer le passage à travers le territoire québécois du pétrole issu des sables bitumineux.

Ce mouvement d’opposition à la construction d’oléoducs en territoire québécois est illustré par la campagne contre l’inversion du pipeline de la ligne 9B d’Enbridge Pipelines Inc entre North Westover, en Ontario, et Montréal.

Une fois inversé, cet oléoduc, construit en 1975, transporterait un mélange de pétroles bruts et de bitume dilué des sables bitumineux de l’Alberta.

Le film présente diverses façons de s’opposer et de manifester, que ce soit par l’art engagé, la diffusion de l’information, l’intervention politique ou encore le lobbying. Il démontre surtout la difficulté d’exercer le pouvoir au niveau politique et le travail ingrat à réaliser avant d’obtenir des résultats.

Lors du visionnement, la salle était comble, si bien que de nombreuses personnes s’en sont vu refuser l’accès. Ce qui démontre bien l’intérêt que suscitent les questions énergétiques au Québec.

Le visionnement a été suivi d’un débat en présence du réalisateur et de Lucie Sauvé, professeure titulaire au Département de didactique de l’Université du Québec à Montréal et directrice du Centre de recherche en éducation et formation relatives à l'environnement et à l’écocitoyenneté. Se sont joints à eux Alyssa Symons-Bélanger et Mikaël Rioux

Où est le pouvoir ? À cette question, posée par le documentaire, nous pouvons répondre que le pouvoir est un peu partout, que ce soit à l’intérieur d’un parti politique, mais surtout à l’extérieur par les actions provenant de la population visant à influencer les décisions politiques.

Pour ma part, je crois qu’il revient aux citoyennes et aux citoyens de dénoncer, de proposer et, finalement, de soutenir les décisions politiques qui vont dans le sens de leurs revendications.

Alyssa Symons-Bélanger, personnage important du documentaire, nous a raconté qu’elle avait été approchée parce qu’elle faisait de l’art engagé. Au départ, elle connaissait très peu de choses sur les gaz de schiste. Tout au long du film, on la voit s’impliquer dans la lutte jusqu’à s’enchaîner aux grilles de la compagnie Suncor.

« Lutter, c’est enthousiasmant », ajoute l’un des intervenants. Olivier D. Asselin renchérit. Lorsqu’on s’implique un peu à la fois, on finit par aimer ce que l’on fait. Participer à une lutte est déjà une demi-victoire, puisqu’on apprend pour être plus efficace la prochaine fois.

Je comprends que c’est un rôle exigeant, que la lutte se déroule souvent dans l’urgence et sans moyens financiers et que, parfois, on peut se demander si l’action citoyenne a généré des victoires.

Pourtant, plusieurs gains ont été réalisés grâce à l’action des citoyennes et citoyens. Pensons aux droits des femmes. Plus récemment au projet de centrale thermique de Trans-Canada dans le Suroit, qui a dû être abandonné suite à l’opposition qui s’était manifestée dans les rues.

Pensons à l’exploitation de la forêt sur l'île René-Levasseur, la deuxième plus grande île du Québec après Anticosti, qui a été arrêtée à l’issue de l’affrontement qui a opposé, d’une part, le gouvernement du Québec et la compagnie et, de l’autre, les écologistes et les autochtones.

Il y tant d’autres victoires que nous pourrions nommer ! Il nous faudrait un livre pour raconter nos histoires à succès.

Il importe de rester toujours vigilant, car nos opposants reportent dans le temps leurs décisions en espérant que la lutte tombera dans l’oubli. C’est ce qui arrive actuellement avec la ligne 9B d’Enbridge.

Où est le pouvoir ? Il est un peu partout, mais il n’est nulle part si on est seul! Le pouvoir politique a besoin que la population reste active et souveraine, car les lobbyistes des grandes corporations sont très efficaces.

Parlant de pouvoir politique, lors des élections du 19 octobre dernier, j’ai été élue avec neuf autres députés sous les couleurs du Bloc québécois. Où est notre pouvoir, alors que nous ne sommes même pas un parti reconnu ?

Il est avec nos concitoyennes et concitoyens dans des activités d’éducation politique, dans la participation à des manifestations ou à toute autre forme d’expression de la volonté populaire en appui à nos revendications, pour la défense de nos intérêts communs. C’est en soutien à toutes ces actions que nous pourrons nous lever à la Chambre des communes à Ottawa pour défendre le Québec et ses valeurs.