L’interculturalisme, une position qui ne nie pas les problèmes

2015/12/03 | Par Jacques Fournier

L’auteur est organisateur communautaire retraité

Le débat sur le projet de charte des valeurs, ou charte de la laïcité, en 2013-14, n’a pas mis en opposition, comme certains le croient, d’une part les obscurantistes (pour) et d’autre part les progressistes (contre).

Le débat est beaucoup plus subtil et compliqué que cela. La CSN, pour une, progressiste, avait mis de l’avant un compromis typiquement syndical : non au port des signes ostentatoires (en pratique, le voile) pour les nouvelles employées de l’État, oui au port du voile aux employées en poste (les droits acquis, un mode de fonctionnement éprouvé des syndicats).

La CSN ne nie pas, elle, qu’il y a un problème concernant l’inclusion des nouveaux arrivants. La CSN ne fait pas preuve d’obscurantisme dans ce dossier. Elle propose des solutions et non pas l’inaction.

Comme le processus d’adoption de la charte n’a pu être mené à terme, on n’a pas pu connaître le compromis qui aurait pu être mis de l’avant entre les différentes tendances à la suite de la discussion nationale sur cette question.

Le débat sur le projet de charte des valeurs, ou charte de la laïcité, a, dans les faits, mis en opposition d’une part les multiculturalistes (canadiens) qui pratiquent le déni devant la question concrète de l’inclusion et d’autre part les interculturalistes (québécois).

Comme le disait Gilles Duceppe, pourquoi les nationalistes canadiens seraient-ils systématiquement des personnes ouvertes, non racistes, non xénophobes et altruistes et que les nationalistes québécois seraient systématiquement des personnes fermées, racistes, xénophobes et égoïstes ? (c’est ce que croit Justin Trudeau)

La Grande-Bretagne, qui pratiquait jusqu’ici un multiculturalisme débridé, a découvert que cela la menait à l’impasse, que les citoyens issus de l’immigration ne se sentaient pas davantage inclus parce qu’on respectait scrupuleusement et sans discernement leurs pratiques religieuses différentes.

La Cour européenne des droits de l’homme vient de reconnaître à la France et à la Belgique le droit d’interdire le port du voile intégral (burqa, nikab) en public. Les juges européens sont-ils obscurantistes ? Cette même Cour vient de valider la législation française qui interdit aux agents de l’État de porter le voile durant leur prestation de service.

L'Allemagne fonctionne par États. Il n'existe pas de loi nationale interdisant le port du voile intégral. Il appartient au législateur de chaque Land (État) d'interdire ou non le port du foulard. Depuis 2011, six Länder ont voté une loi interdisant aux enseignantes le port de signes ostensibles d'appartenance religieuse.

D'autres États ont étendu cette interdiction à tous les agents publics. Le Parlement fédéral suisse s'est prononcé en septembre 2012 contre l'interdiction du port de la burqa.

Plusieurs pays africains (Sénégal, Congo Brazzaville, Cameroun, Tchad et Niger) viennent d’interdire le port en public de la burka et du nikab (alors, de voir les Libéraux fédéraux et le NPD appuyer la prestation du serment de citoyenneté canadienne avec le voile intégral, c’est vraiment surréaliste).

Pour revenir au Québec, je fréquente assidument les milieux souverainistes depuis 50 ans (j’étais membre du RIN en 1963) et je constate que les xénophobes ne représentent pas plus de 5 % des nationalistes de tout poil. Ils prennent souvent le micro. Les éditorialistes de La Presse et Radio-Canada s’acharnent, pour les raisons que l’on sait, à les mettre en vedette.

Dans le dossier de l’accueil des réfugiés syriens, Couillard tente de nous manipuler et de faire croire que les nationalistes québécois sont contre cet accueil humanitaire. Couillard est un fédéraliste pur et dur. Toutes et chacune de ses interventions visent à tuer la cause nationale au Québec, à faire du Québec « une province comme les autres ». C’est son mantra, sa raison d’être. Ne le laissons pas dire n’importe quoi !

Le mot de la fin à Robert Poupart, professeur honoraire à l’Université du Québec à Montréal et ex-recteur de l’Université Bishop’s : |

http://www.ledevoir.com/politique/canada/456584/briser-le-dogme-du-multiculturalisme