Utiliser le fleuve Saint-Laurent et contrôler ce qui y circule

2015/12/04 | Par Pierre Vaillancourt

Avoir notre pays, exister en tant que peuple tout simplement normal, qui contrôle son avenir, sa destinée et son territoire, cela nous permettrait, entre autres, de décider de la manière dont on souhaite utiliser le fleuve Saint-Laurent, de contrôler ce qui y circule et selon quelle règlementation.

Cela nous permettrait de décider, par nous-mêmes et pour nous-mêmes, selon nos propres valeurs et selon le modèle de développement qui nous convient, si nous souhaitons faire de ce grand fleuve une immense autoroute pour le pétrole des sables bitumineux.

En ce moment, nous n'avons rien à dire, le fleuve appartient au Canada, il est de juridiction fédérale. Ce pan gigantesque de notre territoire ne nous appartient tout simplement pas. La catastrophe écologique surviendra inévitablement, nous en subirons les innombrables conséquences, mais nous n'avons absolument rien à dire.

N'en déplaise à ceux et celles qui jugent que de tels mots sont les relents d'une analyse politique dépassée, notre situation est exactement celle des peuples vaincus, colonisés et dépossédés de leur territoire.

Alors à tous ces jeunes qui, dit-on, constituent la tranche de la population la moins favorable à l'indépendance du Québec mais qui seraient, d'autre part, très sensibles aux questions environnementales, je soumets la question suivante : pourquoi refusez-vous que votre peuple ait le pouvoir de décider ce qui lui semble souhaitable pour faire avancer la cause environnementale, comme peuvent le faire tous les peuples normaux, qu'il s'agisse de l'Italie, la France, la Finlande, le Mexique, l'Espagne, etc ?

Voilà pour le fleuve. Quant à nos terres, nous ne pouvons pas plus y interdire le passage des oléoducs et les voies ferrées qui sillonnent nos villes et nos campagnes sont elles aussi de juridiction fédérale. Nous ne contrôlons rien de tout cela. Absolument rien. On ne peut que regarder le train et les oléoducs passer.

C'est par la Conquête que nous avons perdu le contrôle de notre territoire et c'est par l'acceptation, dans nos coeurs, de cette conquête et de cette dépossession, que nous sommes devenus d'authentiques colonisés qui laissent les autres décider à leur place.