Discours du Trône: Des oublis troublants pour le mouvement syndical

2015/12/07 | Par Pierre Dubuc

Au lendemain de la victoire libérale, les organisations syndicales québécoises ont rappelé au premier ministre Trudeau ses engagements les plus importants.

Parmi ces promesses électorales, il y a celles-ci qu’on ne retrouve pas dans la Discours du Trône : rétablissement de l’âge de la retraite à 65 ans plutôt que 67; abrogation des projets de loi C-377 sur la « transparence » et C-525 qui vise à restreindre la capacité des travailleuses et travailleurs du secteur fédéral à se syndiquer; abrogation de la disparition du crédit d’impôt fédéral pour les fonds de travailleurs.

Les organisations syndicales ont joué un rôle important dans la victoire libérale en popularisant dans l’opinion publique le concept de « vote stratégique » pour empêcher la réélection du gouvernement Harper. Reste maintenant à savoir s’il y aura un retour d’ascenseur.

 

Le Québec, une nation?

Dans le Discours du Trône, le gouvernement libéral s’engage également à établir une « relation de nation à nation entre le Canada et les peuples autochtones, une relation fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat ».

Il y est aussi affirmer que « les peuples autochtones participeront davantage à l’examen et à la surveillance des grands projets d’exploitation des ressources ».

Fort bien ! Mais pas de « relation de nation à nation » avec le Québec! Rien de tel! Le Québec est toujours considéré par les Libéraux comme une province comme les autres!

Il faut rappeler que Justin Trudeau s’était opposé fermement à la motion de Stephen Harper selon laquelle « les Québécois forment une nation dans un Canada uni », même si son parti l’avait appuyée à la Chambre des communes.

Selon lui, la nation québécoise était « une idée du XIXe siècle ». Il déclarait, le 15 décembre 2007, dans une entrevue au journal Nouvelles Parc-Extension : « Toute cette idée d’un statut spécial pour le Québec ou de la reconnaissance du Québec comme société distincte dans la Constitution ou de la reconnaissance des Québécois comme une nation, le problème que j’ai avec cela, c’est que cela crée des divisions, que cela sépare des groupes au sein d’autres groupes. Qui sont les Québécois pour être reconnus comme une nation? »(1)

 

L’héritage libéral

Ce rabaissement du Québec au rang de province comme les autres est lourd de conséquences. Contrairement au gouvernement Harper, dont l’idéologie était un rétrécissement du rôle de l’État fédéral et le respect des juridictions provinciales, le Parti libéral a une longue tradition d’interventionnisme dans les champs de compétence des provinces.

Déjà, dans le Discours du Trône, il annonce qu’il interviendra pour « rendre l’éducation postsecondaire plus abordable », même si l’éducation est de compétence exclusivement provinciale.

En vertu de son pouvoir de dépenser, le gouvernement ne se gênera pas, dans le domaine de l’environnement ou dans le cadre de « ses nouveaux investissements majeurs dans le transport en commun, les infrastructures vertes et les infrastructures sociales » pour imposer ses priorités au Québec.

 

D’autres oublis

Pas un mot non plus dans le Discours du Trône sur la loi anti-terroriste C-51 qui, rappelons-le, permet de ranger dans la définition de « terroristes » les environnementalistes, les syndicalistes et les indépendantistes.

À noter, enfin, que le Discours du Trône est aussi muet sur le Partenariat Trans-Pacifique. Nulle mention n’est faite des mesures compensatoires pour les agriculteurs du Québec promises par le gouvernement Harper.

Et n’aller surtout pas croire que Trudeau va remettre en question le traité. De toute évidence, Washington lui a arraché l’engagement de signer le traité en échange de l’autorisation par la Maison Blanche de retirer les F-18 de la Syrie, comme en témoignait la déclaration rapide de Barack Obama (« Le Canada va signer le Partenariat Trans-Pacifique ») au sortir de sa rencontre avec Justin Trudeau.

  1. Huguette Young, Justin Trudeau, l’héritier (VLB éditeur).