Soutien possible du Fonds vert pour la cimenterie de Port-Daniel

2016/03/01 | Par RVHQ

C’est avec consternation que le Regroupement vigilance hydrocarbures Québec (RVHQ), Tache d’huile, la Fondation Rivières,  Eau Secours!, le Regroupement citoyen contre les bitumineux et pour le développement durable et plusieurs autres groupes citoyens ou écologistes ont pris connaissance des propos récents du ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, monsieur Pierre Arcand, laissant entendre que le Fonds vert pourrait soutenir financièrement la cimenterie de Port-Daniel, sous prétexte de diminuer son empreinte carbone en utilisant le gaz naturel comme combustible. En fondant ses calculs uniquement sur les tonnes de GES émises lors de la combustion sans tenir compte des fuites de méthane qui se produisent pendant les forages, lors du transport et après l’abandon des puits, le Québec fait complètement fausse route, selon ces groupes.

Le gaz naturel est composé à 95 % de méthane, dont le gouvernement du Canada reconnait qu’il contribue 25 fois plus au réchauffement climatique que le CO2 sur 100 ans, conformément aux chiffres de 2007 du GIEC [1]. De fait, la période de 100 ans est utilisée car elle correspond à la norme internationale pour tous les types de combustibles, mais le GIEC a établi que l’effet du méthane est beaucoup plus rapide et que ce gaz contribue 72 fois plus que le CO2 au réchauffement climatique sur 20 ans, selon les chiffres de 2007[2]. Les chiffres plus récents indiquent que le multiplicateur est en réalité sensiblement plus élevé.

« Bleu n’est pas vert. Le gaz naturel ne peut d’aucune manière être considéré comme une source d’énergie de transition. Il n’a aucune place dans le Fonds vert ni dans la politique énergétique 2016-2025 du Québec », soutient Carole Dupuis, coordonnatrice générale et porte-parole du RVHQ.

« L’engouement du gouvernement pour l’exploitation du gaz naturel et pour sa transformation en gaz naturel liquéfié nous fait craindre que la filière gazière fossile soit au cœur de la politique énergétique du Québec, ce qui serait une aberration après les engagements pris à Paris devant le monde entier », ajoute Maude Prud'homme, porte-parole de Tache d'huile, en Gaspésie.

Selon les groupes, le ministre Arcand s’enferre dans une stratégie industrielle digne d’un autre siècle en soutenant l’extraction d’hydrocarbures en Gaspésie et la construction d’usines de liquéfaction de gaz naturel destiné en majeure partie à l’exportation.  « On se demande même s’il ne cédera pas aux pressions de l’industrie pour lancer des projets pilotes d’extraction de gaz de schiste à grande échelle dans Bécancour et Lotbinière, ce qui serait une porte ouverte pour ce type d’exploitation dans la vallée du Saint-Laurent et un désastre pour nos cours d’eau, nappes souterraines et sources d’eau potable. », estime Martine Chatelain de Eau Secours! la coalition québécoise pour une gestion responsable de l’eau.

« L’avenir n’est pas dans les hydrocarbures, même le premier ministre l’a dit. Ce n’est pas avec une stratégie gazière saupoudrée d’éoliennes et de biomasse que le Québec se propulsera dans l’économie durable du XXIe siècle »,  rappelle Jacques Tétreault, coordonnateur général adjoint du RVHQ. Ce ne sont pas non plus 100 000 autos électriques ou hybrides sur les routes qui feront la différence, sur un parc de 4,5 millions de véhicules, quand on sait que le nombre de véhicules de promenade a augmenté de près de 350 000 depuis cinq ans[3] et que 3 véhicules sur 10 vendus ici sont désormais des VUS, comparativement à 1 sur 10 en 2004[4].

Si le Québec entend atteindre ses cibles climatiques, il doit prendre des mesures structurantes majeures, à commencer par des investissements massifs dans le transport collectif.  Il doit soutenir la recherche appliquée pour que le Québec se place à la pointe des solutions innovantes dans des domaines à forte teneur en matière grise comme la logistique, la récupération de la chaleur, les technologies du bâtiment ou la gestion des matières résiduelles, par exemple. « C’est à des développements de ce genre que doit servir le Fonds vert et c’est dans cette voie que la politique énergétique doit nous amener », conclut Andrée Chartier du Regroupement citoyen contre les bitumineux et pour le développement durable.