Les services de garde publics, une lutte féministe essentielle

2016/03/09 | Par Valérie Grenon

L’auteure est vice-présidente de la FIPEQ-CSQ

En cette semaine durant laquelle nous soulignons la Journée internationale des femmes, il est essentiel de rappeler le rôle crucial de notre réseau de la petite enfance dans l’émancipation des femmes québécoises.

Quand le Québec s’est doté d’une politique familiale ambitieuse, à l’aube du 21e siècle, c’était pour assurer un accès universel et une égalité des chances à nos enfants, mais aussi dans l’objectif de permettre aux femmes du Québec qui le souhaitaient de se réaliser professionnellement et d’être plus autonome financièrement.

Ces efforts ont porté fruit : le taux d’emploi des femmes au Québec a bondi de façon fulgurante depuis l’adoption de la politique familiale. Chez celles avec des enfants de moins de six ans, il atteint même aujourd'hui plus de 70 %, bien au-delà de la moyenne canadienne.

Le Québec tout entier s’est enrichi grâce à la participation plus importante au marché du travail des femmes ayant de jeunes enfants, et l’augmentation des revenus de l’État découlant de ces retours au travail a rendu fiscalement rentable l’implantation du réseau de garde public à contribution réduite.

Malheureusement, la modulation des frais de garde, qui viendra coûter cher aux familles pour la première fois ce printemps, a mis fin à l’universalité des coûts des services de garde, et pousse de nombreuses mères à devoir remettre en question leur présence sur le marché du travail.

Cette modulation, en plus de forcer des milliers de Québécoises à prendre des décisions déchirantes sur la conciliation travail-famille, a des impacts importants sur de nombreuses travailleuses du réseau de garde, plus particulièrement sur les responsables de services de garde en milieu familial qui œuvrent dans le réseau public.

Ces responsables, presque exclusivement des femmes, sont une composante essentielle du réseau de la petite enfance, avec près de 90 000 enfants à leur charge quotidiennement. Malgré cela, elles ont longtemps dû composer avec des conditions de travail loin d’être à la hauteur de leur travail d’éducatrices auprès des enfants.

Partout au Québec, elles se sont tenues debout, et grâce à leur syndicalisation très récente, elles ont obtenu du gouvernement une meilleure reconnaissance de leur travail et de meilleures conditions.


En rendant le privé fiscalement plus attrayant pour une certaine clientèle, la modulation de frais de garde imposée par les libéraux pousse de nombreux parents à opter pour des garderies privées à la qualité et à la sécurité incertaines, mettant à mal les revenus de celles qui tiennent des services de garde en milieu familial.

Quand un gouvernement attaque de front un milieu de travail composé presque exclusivement de femmes, c’est l’ensemble des femmes québécoises qu’il attaque. Quand un gouvernement met fin à une politique familiale qui a permis à des dizaines de milliers de femmes d’entrer sur le marché du travail, c’est l’ensemble des femmes québécoises qui y perdent.

Mères, grand-mères, femmes sans enfants, éducatrices en CPE ou responsables de services de garde en milieu familial, toutes les femmes du Québec, et tous les hommes qui les appuient, doivent se tenir ensemble pour la survie du réseau public de la petite enfance.

Ne laissons pas nos acquis durement gagnés être démantelés par le gouvernement actuel.