Le point sur les négociations à l’UQÀM : SPUQ; SCCUQ; SÉTUE

2016/03/18 | Par Rose St-Pierre

Les négociations et les conflits s’accumulent à l’UQÀM. Depuis maintenant plusieurs mois, les syndicats des professeurs, des chargés de cours et des étudiants travailleurs sont en négociations et on n’observe aucune avancée importante. Retour sur les différentes négociations en cours.

 

SPUQ

Le Syndicat des professeurs de l’UQAM (SPUQ) est en processus de négociations avec le rectorat depuis deux ans. Leur convention collective est échu depuis mai 2013. Le SPUQ a voté une première journée de grève, le 8 mars dernier. Réunis en assemblée générale, les 750 professeurs, soit presque la totalité des membres, ont rejeté à 79 % les offres patronales.

Les professeurs demandent une augmentation du plancher d’emploi pour permettre l’embauche de nouveaux professeurs. On exige aussi un rattrapage salarial. Les professeurs de l’UQAM sont les moins bien rémunérés des universités québécoises.

Le soutien à la recherche et à la création, la diminution du nombre d’étudiants dans les salles de cours et le renforcement des principes de collégialité s’ajoutent également aux demandes du syndicat.

« Nous souhaitons réitérer et renforcer les principes de collégialité inscrits dans les documents fondateurs de l’université. C’est très important pour nous. Nous observons, depuis quelques années, une dérive autoritaire et un glissement vers un mode de fonctionnement calqué sur celui des universités traditionnelles », indique Michèle Nevert, présidente du Syndicat des professeurs de l’UQAM.

Les principes de gestion participative et de collégialité sont inscrits dans les conventions collectives des professeurs et distinguent l’UQAM des autres universités québécoises. Il a été prévu, au moment de la fondation de l’UQAM, que les professeurs et les étudiants seraient représentés de façon paritaire sur les instances décisionnelles (comme les comités de programme). Aujourd’hui, les chargés de cours et les étudiants travailleurs sont aussi représentés.

« Nous tenons à ce mode de fonctionnement. Les décisions partent de la base et montent jusqu’à la direction. Nous voulons éviter une transformation vers un mode de fonctionnement plus hiérarchique. Il faut renforcer le pouvoir des unités de base », explique Michèle Nevert.

« Ce qu’on nous répond, du côté du rectorat, c’est qu’on n’a pas d’argent, que les compressions budgétaires du gouvernement ne laissent pas de marge de manœuvre, déclare Mme Nevert.

« Mais ce qu’on sent surtout, c’est une forte opposition idéologique. Depuis deux ans, nous faisons face, à la table de négociations, à un discours dénué d’argumentation et de préparation. La journée du 8 mars nous a permis d’envoyer un message fort pour casser le rythme établi. Mais nous craignons d’être devant une incompréhension totale de ce que sont les professeurs. »

« Ce que souhaite le SPUQ, c’est une entente “négociée et satisfaisante pour les deux parties”. Mais, pour l’instant, reconnaît Mme Névert, « tant qu’on aura des offres scandaleuses, nous répondrons par un rejet massif. »

 

SCCUQ

De son côté, le Syndicat uqamien représentant les chargés de cours (SCCUQ) a déposé au bureau du recteur, en octobre dernier, son cahier de demandes. La réponse ne leur est parvenue que le 19 janvier 2016 et seulement le 7 mars sur les aspects monétaires. Nous avons rencontré la présidente de la SCCUQ, Marie Blais et Gaëlle Breton-Le Goff, qui siège à la table de négociation.

« Nous négocions presque chaque semaine, mais il y a très peu d’avancées sur les enjeux importants », nous indique Mme Breton-Le Goff.

Les deux grandes demandes de la SCCUQ concernent la stabilisation d’emploi et la reconnaissance du travail des chargés de cours. « Nos membres sont à statut précaire. D’une session à l’autre, nous ne savons pas si notre contrat sera renouvelé. Au-delà de la sécurité d’emploi, nous souhaitons également une reconnaissance à sa juste valeur du travail des chargés de cours. »

Pour être embauchés, les chargés de cours doivent démontrer qu’ils ont déjà effectué de la recherche. Cela dit, la recherche n’est pas valorisée.

« Dans les politiques et règlements de l’université, ou même dans le cadre de la campagne ‘‘Effet UQAM’’, la recherche est associée seulement aux professeurs. La reconnaissance doit aussi passer par le financement mis à disposition des chargés de cours. »

En ce qui concerne les questions salariales, le SCCUQ demande un rattrapage d’environ 14 %. Les chargés de cours de l’UQAM sont parmi les moins bien payés au Québec.

Après quinze rencontres avec l’employeur, le SCCUQ se désole de ne constater aucune avancée : « La place est moins au dialogue. Il y a un durcissement de ton et une approche plus centrée sur la confrontation. Il semble qu’on doive apprivoiser un nouveau modèle de gestion associé à une université traditionnelle. »

Le changement idéologique du rectorat, depuis l’arrivée de M. Robert Proulx, est dénoncé par tous les syndicats uqamiens. « Le recteur est de moins en moins accessible. Nous avons rarement observé autant de délais en temps de négociations », nous explique Mme Blais.

Peut-on attribuer ce changement de ton à la nouvelle direction ou aux mandats gouvernementaux auxquels doit répondre le rectorat? « On ne peut que spéculer. Ce que nous savons, c’est qu’il y a de plus en plus de gardes de sécurité, lors de manifestations. Le local du recteur est alors hautement protégé. Un demi-million de dollars a été investi dans des caméras de surveillance depuis le printemps 2015 », déclare Mme Blais.

 

SÉTUE

Le Syndicat des étudiants travailleurs de l’UQAM est en grève, depuis plus de 100 jours, et sans convention collective depuis plus de deux ans. Sans auxiliaires d’enseignement, sans correcteurs, sans assistants en laboratoire, sans superviseurs d’examens, sans ouvreurs pour la salle de théâtre, c’est toute l’université qui est pénalisée.

Les professeurs reçoivent des directives patronales leur demandant de procéder à la correction des travaux et examens. Le Syndicat des chargés de cours s’adressera au tribunal administratif du travail sous peu, car il considère que les directives de l’UQAM contreviennent aux lois du travail.

Chloé Fortin-Côté, porte-parole pour le SÉTUE, nous explique que les problèmes rencontrés à la table de négociations sont les mêmes que pour les professeurs et les chargés de cours.

« L’administration ne négocie pas. C’est un non répété à toutes nos demandes. Depuis l’arrivée de Robert Proulx en 2012, le climat a changé à l’UQAM. La démocratie et la collégialité ne semblent pas importantes pour le rectorat. Les décisions sont prises en secret, derrière des portes closes. »

Le SÉTUE revendique un plancher d’heures d’emploi afin d’assurer à ses membres un minimum d’heures travaillées, et un rattrapage salarial, car ces étudiants travailleurs sont aussi les moins bien payés au Québec. Il existe également un important écart salarial entre le 1er et le 3e cycle.

« L’UQAM prend pour acquis qu’un étudiant travailleur est inscrit aux études à temps plein, n’a pas de responsabilité familiale, a des ressources financières suffisantes pour n’avoir besoin que de petits contrats d’appoints, comme si ce n’était qu’une expérience formatrice. Cela ne correspond pas à la réalité de la grande majorité des personnes étudiantes employées. L’employeur utilise en ce moment toutes les stratégies patronales dignes d’une entreprise privée. On parie sur l’essoufflement de la partie syndicale en étirant à n’en plus finir les négociations. On embauche à fort prix un cabinet d’avocats externe et on souhaite monter les syndicats les uns contre les autres. C’est du bluff et de la mauvaise foi... »

M. Robert Proulx, recteur de l’UQÀM, a décliné notre demande d’entrevue. Il indique ne pas vouloir commenter les négociations en cours.