L’Argentine : une démocratie dictatoriale

2016/03/23 | Par Maryse Laurence Lewis

Actuellement, en Argentine, le gouvernement de Mauricio Macri reçoit des éloges, de la France, des États-Unis… et des gens d’affaires. Alors que Hugo Chávez avait été élu, en 2012, avec 55% des votes contre 44% pour son opposant Henrique Capriles, on le traitait de dictateur. Mauricio Macri obtint, à la fin 2015, 52% des votes, alors que son adversaire, Daniel Scioli, en compilait 47,89%.

On a crié à l’absence de liberté d’expression, lorsque Chávez n’a pas renouvelé la licence de Radio Caracas Televisión, venue au terme de son échéance légale. Au Venezuela, près de 90% des radios et télévisions appartiennent à des sociétés privées et non à l’État. C’était ainsi, avant l’élection de Chávez, au cours de sa gouvernance, et ça l’est encore.

En Argentine, Macri a dissout deux organismes indépendants, en charge des médias et des communications, en plus de congédier des journalistes.

Tandis qu’il abaisse les impôts concernant les bateaux et les voitures de luxe, qu’il déréglemente le marché des hydrocarbures et réduit le budget alloué à l’éducation, des mouvements populaires souffrent.

Milagro Sala, une députée parlementaire du Mercosur, incitait les membres de l’organisme Tupac Amaru à protester contre la baisse de subventions accordées aux projets sociaux. Le gouvernement de Mauricio Macri l’a fait emprisonner.

Au cours d’une manifestation menée par des cuisinières de cafétéria scolaire, Mme Bullrich, Ministre de la Sécurité, a autorisé qu’on tire des balles de plastique et des bombes lacrymogènes. Elle vient de légaliser l’emploi des fameux tasers que les États-Unis ne parvenaient pas à vendre à l’Argentine, sous l’ancien gouvernement.

Tandis que Chávez a nationalisé le pétrole et financé un accès universel aux soins de santé, Macri, lui, offre à nouveau les ressources de l’Argentine à l’avidité des entreprises étrangères.

Les syndicats évaluent à 40,000 le nombre de personnes congédiées ou dont les contrats n’ont pas été renouvelés. Bien que 5,000 travailleurs ont pu réintégrer leur poste, après contestation, ce sont tout de même plus de 20,000 employés de l’État, des provinces et des municipalités qui demeurent congédiés sans appel.

On ne le traite pas de dictateur, et en un mois et demi, il a imposé 29 décrets de nécessité et urgence (DNU), sans aucun débat parlementaire, profitant du fait que les membres du Parlement étaient en vacances jusqu’en mars! Il a même tenté de nommer deux juges à la Cour suprême. Jamais on n’a compté autant de chefs d’entreprises comme membres du gouvernement.

Le Président Obama ira féliciter Mauricio Macri. La date choisie pour cette rencontre est mémorable : le 24 mars. Les Argentins se rappelleront, selon leur allégeance, qu’un 24 mars 1976, l’armée réussit un Coup d’État et se maintint au pouvoir jusqu’en 1983.

Le Président Obama en profitera pour déclassifier des documents qui démontrent l’implication des États-Unis dans le Coup d’État. Avec le gouvernement de Mauricio Macri, les États-Unis n’encourront aucune plainte, aucun jugement. On saura donc bientôt la nature de cet appui, et même combien d’enfants ‒ dont les parents ont été assassinés ‒ ont été adoptés, non seulement par des familles prônant la dictature en Argentine, mais aussi par des familles aux États-Unis…

On nous parlera, ensuite, de dictateurs, de présidents à tendance socialiste soupçonnés de fraude, alors qu’on adule des présidents comme Mauricio Macri, des monarchies, comme celle de l’Arabie Saoudite, qui infligent des peines de morts et soumettent les femmes.

On héberge les tyrans en fuite, les Duvalier et Shah d’Iran… On finance des Coups d’État pour mettre en place des dictateurs prêts à vendre les ressources du pays, les Mobutu, Compaoré, Fujimori, Somoza, Noriega…

Et on se félicite, car la majorité des gens croient encore à la démocratie états-unienne, malgré la médiocrité de leurs mensonges.

 

Références :

☼ Réseau Voltaire : « Hugo Chávez et RCTV : censure ou décision légitime? », par Salim Lamrani, le 1/02/2007.
☼ Perfil (Generemos debate) : « Comparación mensual de decretos », par Matias Di Santi, le 5/01/2016.
☼ El Correo de la diaspora : « Macri gouverne l’Argentine par décrets », par Estelle Leroy-Debiasi, 16/01/2016.
☼ La Arena : « Macri, responsable principal, no único, de miles de despidos », par Emilio Marín, le 2/02/2016.
☼ Infobae.com : « Los DNU de Macri pasaron su primera prueba en el Congreso », le 16/02/2016.
☼ La Comisión Bicameral de Trámite Legislativo.
☼ La Jornada en linea : «  Primera huelga contra el gobierno de Macri en Argentina », par Ap et Afp, le 24/02/2016.
☼ Notas, periodismo popular : « Represión a porteras y cocineras de escuela en la Plata », par Cynthia García, le 9/03/2016.
☼ El País : « Obama abrirá archivos de la dictadura argentina y honrará a sus victimas », par Carlos Cué, le 21/03/2016.

Photo : Par Casa Rosada (Argentina Presidency of the Nation), CC BY 2.5 ar,