Les frères siamois

2016/03/23 | Par Pierre-Alain Cotnoir

Lors de la campagne électorale de 2014, à peine 19 % des sympathisants interrogés de la CAQ (1) affirmaient que leur deuxième choix électoral irait vers le PQ contre 38 % vers le PLQ.

Il m’apparaît passablement présomptueux dans ce contexte de croire que le PQ pourrait se rallier le vote d’électeurs qui sont deux fois plus enclins à soutenir le PLQ que le PQ. En fait, ces résultats coïncident avec ceux concernant l’orientation constitutionnelle des caquistes : 38 % d’entre eux étant fédéralistes, contre 19 % souverainistes.

Il demeure assez illusoire dans ce sens d’envisager un déplacement massif de cet électorat vers le PQ. D’autant plus qu’une fraction importante de l’électorat caquiste perçoit le PQ avec défiance.

Il m’apparaît plus réaliste d’imaginer que le PQ et la CAQ sont comme deux marques de commerce suscitant un attachement distinct, un peu comme Coke et Pepsi ont eu leurs aficionados… alors qu’il s’agit pourtant de boissons sucrées au goût presque identique.

Est-ce que cela voudrait dire que nous sommes condamnés à voir le PLQ reporté au pouvoir automatiquement, car profitant d’un appui assuré auprès de non-francophones rejetant toute forme de nationalisme au Québec et d’une frange constituée d’environ un sixième de l’électorat francophone lui garantissant une quarantaine de circonscriptions, « les doigts dans le nez » ?

Fort probablement, si l’un ou l’autre des deux partis, PQ ou CAQ, s’obstine à vouloir gruger l’électorat de l’autre et encore plus certainement si ces deux partis s’épuisent mutuellement dans des maraudages aussi inutiles que délétères.

Alors quelle est la solution ? Assez clairement, c’est celle d’une alliance électorale lors du prochain scrutin autour d’une plateforme commune ayant comme dénominateur, d’une part, un projet s’inspirant d’une démarche où ce serait la proposition de la CAQ d’autonomisation du Québec qui serait défendue et soumise à l’approbation de la population  : le peuple étant enfin invité à se prononcer sur cette troisième voie auquel il se montre sondage après sondage, majoritairement favorable.

Une telle entente ferait sortir le Québec de l’ornière constitutionnelle où il s’enlise depuis plus de 30 ans. En cas d’échec, le gouvernement retournerait en élections pour obtenir un nouveau mandat, le débat se faisant désormais entre le statu quo et la souveraineté.

D’autre part, cette plateforme contiendrait un ensemble de mesures visant à mettre un terme aux politiques (néo)libérales creusant les inégalités et ayant pour but premier d’éroder les valeurs ayant façonné le « modèle québécois » en les remplaçant par le chacun pour soi, voire la gabegie et la corruption politique.

Mais pour permettre une telle alliance, il faudra que les ego le cèdent au bien commun, les ambitions personnelles aux intérêts supérieurs de la nation, la lucidité aux lubies…

1 Source sondage téléphonique mené du 5 mars au 6 avril auprès de 8 276 répondants et analysé pour le compte du Parti québécois.