En conclusion du débat sur des alliances théoriquement profitables

2016/05/03 | Par Pierre-Alain Cotnoir

L'opinion publique forme un système complexe. Comment des gens sensément intelligents peuvent-ils s'imaginer qu'en prônant une démarche misant sur une forme d'évangélisation politique, on puisse en quelques mois ou même quelques années amener une part substantielle de l'électorat à y souscrire?

Autrefois, je l’attribuais à la forte présence d’enseignants au sein du PQ produisant une sorte de déformation professionnelle les amenant à conclure qu’il suffisait d’expliquer les mérites de la souveraineté pour qu’elle soit comprise et que « l’élève » y adhère.

Puis, j’ai fini par comprendre qu’elle est plus certainement conséquente au prosélytisme qui accompagne toute démarche militante. Bon nombre de militants croient qu’il suffit de prendre le « bâton du pèlerin » pour convaincre les leurs et que la raison principale faisant en sorte que nous n’ayons pas encore atteint plus de 50% des intentions référendaires, c’est le manque de porte à porte ou d’assemblée de cuisine (ou de posts sur twitter ou FB), le fait qu’on n'en parle pas assez, que l’argumentaire soit à moderniser, etc.

Jamais l’on ne tient compte qu’il y a une forte proportion de Québécois qui ne sont tout simplement pas intéressés par cette question, nos fameux centristes. Or, il n’y a pire sourd que celui qui ne veut rien entendre.

Pour ma part, la famille de ma conjointe aura beau me seriner les mérites du football américain, je n’en deviendrai jamais un adepte, car je ne m’y intéresse pas du tout. Eh bien, c’est un mécanisme semblable qui joue auprès d’une large fraction de la population.

Et puis, il y a ceux qui ne se considèrent pas Québécois, mais plutôt Canadien (ou Canadien français). Ils forment grosso modo le tiers des francophones et la très grande majorité des non-francophones. C'est un bon handicap de départ 40% de gens qui ne veulent rien savoir parce qu'ils n'ont aucun sentiment d'appartenance à la nation québécoise!

Enfin que faites-vous des trois quarts des "centristes", ces apolitiques, de même que de la moitié des souverainistes qui estiment qu'il sera possible un jour de réformer le fédéralisme canadien de manière à satisfaire à la fois le Québec et le reste du Canada (ce nombre atteint 80% chez les francophones de moins de 35 ans) ? Or ce n'est pas en se mettant la tête dans le sable qu'ils cesseront d'exister.

Peut-être, vais-je vous surprendre un peu, quoique je l’ai déjà écrit : je considère improbable une alliance entre la CAQ et le PQ, même si électoralement elle demeure dans le contexte actuel souhaitable. J’entrevois les mêmes difficultés que vous à la négociation d’un partage des circonscriptions, sans parler des ego des politiciens mis en cause.

Par ailleurs, une entente avec QS m’apparaît encore plus improbable. Sans parler que les apports électoraux de QS n’auraient qu’un impact limité et ceux d’ON s’avéreraient insignifiants. Sur l’île de Montréal, cela ne pourrait se traduire que par des changements électoraux dans une ou deux circonscriptions tout au plus, alors que dans la région de Québec, les batailles électorales se déroulent déjà depuis fort longtemps entre le PLQ et la CAQ.

Quant à la démarche menant vers une assemblée constituante proposée par certains (par exemple, Roméo Bouchard dans son dernier livre « Survivre à l’offensive des riches ») que Gilbert Paquette privilégie dans un texte publié chez Vigile.net, elle n’aurait rien d’emballant pour l’électorat et risquerait de faire passer ses promoteurs pour de joyeux rêveurs. Je vois déjà les libéraux se gausser du manque de réalisme de ce rassemblement d’intellectuels, alors qu’eux se préoccupent des « vraies affaires ».

Toutefois, une autre approche pourrait se dessiner causée par les aléas de l’actualité. Que penser d’un référendum portant sur le passage des oléoducs sur le territoire québécois?

Quelle serait la réaction d’Ottawa si un tel référendum aboutissait à un résultat où une forte majorité de la population rejetterait un tel assujettissement de notre territoire?

Quelle serait la réaction des Québécois si, du revers de la main, le reste du Canada décidait de nous faire passer sur le corps un tel pipeline? Ne pourraient-ils pas en tirer les leçons qui s’imposeraient? Plus particulièrement les jeunes…

Je sais que je soulève un dossier où le PQ semble avoir de la difficulté à faire son lit... alors qu’au sein de la population, c'est déjà entendu!