Au Vieux-Port de Montréal, le salaire minimum doit passer à 15$/heure

2016/06/17 | Par Simon Paré-Poupart

Réunis en assemblée générale, le vendredi 20 mai dernier, 80 % des employés syndiqués du Vieux-Port de Montréal ont voté en faveur de la grève, qui sera déclenchée le 27 mai. Depuis lors, ils ne se présentent plus au travail. Le Centre des sciences et la chaîne alimentaire sont fermés sur le site, mais l’administration assure le maintien de certaines activités avec l’emploi de briseurs de grève, comme le permet le Code canadien du travail, dont relève le Vieux-Port.

Les employés en grève mènent donc des actions de perturbation dans différents secteurs de la ville pour faire connaître leurs revendications, dont celle pour un salaire minimum de 15$/heure.

Selon Konrad Lamour, président de la section locale 10333 du Vieux-Port de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC-10333), le rattrapage salarial demeure le principal point d’achoppement. Malgré le fait que la partie patronale propose une augmentation de 9,5% sur quatre ans, M. Lamour maintient sa position : « Comme une étude de l’IRIS l’a démontré, il faut que le salaire dépasse le seuil de pauvreté pour devenir un salaire décent. Ce seuil, c’est 15$/heure. Ces 9,5% ne permettraient pas d’obtenir le minimum : le rattrapage salarial ».

« D’autres employés, ajoute le président, sont payés de 1$ à 8$ de plus l’heure  pour le même genre d’activité dans le même secteur.»

Sophie Morin, la directrice des communications de la Société du Vieux-Port de Montréal (SVPM), rétorque qu’« il faut faire attention, car il y a de multiples comparatifs, il faut regarder l’ensemble du marché », en affirmant que les salaires de la SPVM sont « au-dessus de ce qui s’offre sur le marché ».

La partie syndicale taxe l’employeur d’être « peu soucieux » de la réalité des travailleurs et soutient que « les gestionnaires ne sont plus en contact avec la réalité du terrain ».

Les deux parties se disent prêtes à retourner à la table de négociation, mais leur lecture respective des disparités salariales diverge.

D’un côté, la partie patronale voudrait que les conditions salariales soient négociées de façon collégiale au sein d’un comité paritaire. D’autre part, la partie syndicale veut plutôt « contrer l’environnement de précarité », car le salaire moyen chute dès lors qu’on enlève du calcul les employés avec plusieurs années d’expérience. Des 200 employés de la basse saison, (300 en haute saison, de juin à septembre), une centaine sont sans contrat et 90 employés sont rémunérés sous le plancher des 16,04$, selon la partie syndicale.

 

Les deux parties semblent s’entendre sur un point : on assiste à un mouvement social qui dépasse le cadre de la négociation actuelle.

Sans ambages, M. Lamour nous dit qu’il « aimerait que ce mouvement en faveur des 15$/heure prenne de l’ampleur et se propage à l’ensemble de la province ». À défaut de faire adopter une loi à l’image de ce qui s’est passé en Californie et dans l'État de New York, le président du syndicat aimerait que sa convention collective serve de « modèle pour un salaire décent ».

Il cite en exemple les membres de son syndicat. Malgré de grandes disparités de salaires, 80% d’entre eux, dont plusieurs gagnent plus que les 15$/heure demandés, ont voté pour un mandat de grève.

La revendication suscite l’adhésion : « Lorsque nous marchions sur la rue Saint-Paul, on ne ressentait pas de frustration de la part de la population, que des thumbs up et des photos ».

Les membres du syndicat, explique M. Lamour, peuvent bénéficier du fonds de grève de l’Alliance de la Fonction publique du Canada et du soutien du regroupement 15+.org.

Cependant, la grève en cours n’empêche pas le déroulement de certaines activités dans le Vieux-Port. L’employeur a obtenu une injonction qui empêche la mise en place de lignes de piquetages, et le Code fédéral du travail permet l’emploi de briseurs de grève.

Ainsi, de nombreux gardiens de sécurité de la compagnie VCS Investigation informent les visiteurs sur les activités possibles. Mme Morin le justifie en invoquant le fait que « la sécurité doit être maintenue », alors que M. Lamour soutient que « nous sommes en présence de briseurs de grève qui sont en train de faire notre job ».


 

Les employés du Vieux-Port. Crédit photo : Marc Daneau.

Le président du syndicat des employés du Vieux-Port, Konrad Lamour. Crédit photo : Marc Daneau.