Course au PQ : Non pas avec qui aller, mais où aller !

2016/09/23 | Par Pierre Dubuc

Ce midi, j’écoutais Jean-François Lisée, commentant sur les ondes de Radio-Canada un sondage le montrant au coude-à-coude avec Alexandre Cloutier, féliciter ses partisans au sein du Parti Québécois pour « leur maturité, leur lucidité, leur intelligence » parce qu’ils acceptent de mettre de côté la souveraineté!

La veille, derrière les portes closes du caucus, il aurait interpelé Martine Ouellet en la prévenant qu’elle ne pourrait faire partie de son équipe, s’il devenait un jour chef du PQ, parce qu’il ne pouvait « tolérer son indiscipline et ses sempiternelles critiques ».

Cela faisait suite à la ténébreuse histoire – qui a toute l’apparence d’un coup monté – de l’absence de Martine Ouellet sur la publicité « Je suis Parti Québécois » et au piratage de son tweet (« Je suis Option nationale »), dont la véracité est contestée par Stéphane Bergeron.

De toute évidence, une sordide campagne est menée par l’establishment et une bonne partie de la députation contre Martine Ouellet pour accréditer la thèse, parmi les membres du PQ, que Martine « n’est pas une joueuse d’équipe ».

(En même temps, on l’attaque parce qu’elle a « joué en équipe » lors de la signature de l’entente sur Anticosti!)

 

De quelle équipe, parle-t-on?

Avant d’accuser Martine de ne pas jouer en équipe, faudrait d’abord qu’on détermine les caractéristiques de l’équipe. En politique, comme dans les autres activités humaines, l’équipe se forme en fonction du but à atteindre.

Voulons-nous une équipe de hockey ou une équipe de football? Une équipe de ligues majeures ou une équipe paroissiale?

Voulons-nous former une équipe pour convaincre nos concitoyens de la nécessité que le Québec devienne un pays et joue sur la patinoire des Grands? Ou une équipe de ligue de garage provinciale?

 

Quel est l’objectif?

Pour faire oublier la mise à l’écart de l’indépendance, on agite la question de la laïcité. Pourtant, nous savons pertinemment que les tribunaux canadiens vont invalider toute loi québécoise sur la laïcité digne de ce nom en invoquant la Charte canadienne des droits et libertés.

La seule voie à emprunter est celle proposée par Martine Ouellet. D’abord, inscrire le principe de la laïcité dans la Constitution initiale d’un Québec indépendant. Puis, adopter nos propres lois sans qu’elles puissent être invalidées par les tribunaux d’une autre nation.

Pour votre information, Martine propose sur la question de la laïcité le consensus qui est apparu entre le PQ et la CAQ lors du débat en commission parlementaire : les recommandations de Bouchard-Taylor et l’interdiction des signes religieux dans le monde de l’éducation, avec droits acquis pour les employés en poste.

 

Quel rapport de force?

Lors du débat au Saguenay, Alexandre Cloutier a proposé un rapport d’impôt unique. Cela tranchait avec l’ensemble de ses propositions qui, aussi gentilles soient-elles, ne sortent pas du cadre provincialiste.

Avec raison, Martine Ouellet lui a demandé quel était son rapport de force pour appuyer une telle revendication et forcer Ottawa à s’y conformer? Alexandre a répondu qu’il croyait la chose possible en citant l’exemple de la TPS et de la TVQ qui sont perçues par le gouvernement québécois.

Mais comment obligera-t-il les entreprises à verser leurs cotisations à Québec si Ottawa s’y oppose? Et on peut être certain qu’Ottawa s’y opposera. Le gouvernement fédéral pourrait même se dire d’accord avec le principe d’un rapport d’impôt unique et se proposer comme percepteur unique, comme c’est le cas dans les autres provinces!

Et si jamais les sondages démontraient que la population est d’accord pour qu’Ottawa soit le seul percepteur, est-ce que Jean-François Lisée se plierait à la volonté populaire? Inviterait-il les membres du PQ à faire preuve de « maturité, lucidité et d’intelligence » et à acquiescer à la « volonté populaire »?

 

De quelle équipe voulez-vous faire partie?

Pour le choix de leur nouveau chef, les membres du Parti Québécois devront choisir l’équipe dont ils veulent faire partie.

Une équipe résignée qui, selon le dernier sondage, peut au mieux espérer former un gouvernement minoritaire, privée de tout moyen de pression face à Ottawa, condamnée à gérer à la petite semaine les affaires provinciales, laissant les pouvoirs régaliens – les vrais pouvoirs économiques et internationaux – au gouvernement fédéral, tout en étant soumis à la Constitution et à Charte canadienne des droits et aux décisions de la Cour suprême.

Ou bien à une équipe ambitieuse qui acceptera de reprendre, dans cette course à relais, le flambeau des mains des Bourgault, Lévesque et Parizeau avec comme objectif l’indépendance du Québec en s’inspirant dans sa stratégie de la définition que donnait le Cardinal Richelieu de l'art de la politique : « Rendre possible ce qui est nécessaire ».

Finalement, la question à laquelle doivent répondre les péquistes est : « Non pas avec qui aller, mais où aller ! »

 

Photo : ledevoir.com