Une TVQ sociale en échange d’une baisse d’impôt?

2016/09/23 | Par Pierre Dubuc

Au cours des débats dans la course à la direction du Parti Québécois, Paul St-Pierre Pamondon a présenté comme sa bible fiscale le rapport de la Commission Godbout sur les finances publiques.

Selon lui, le rapport Godbout serait un rapport social-démocrate inspiré des pays scandinaves, et plus particulièrement du Danemark, que PSPP se targue de bien connaître pour y avoir vécu.

Luc Godbout, directeur du Département de fiscalité de l’Université de Sherbrooke, et économiste-mercenaire pour les gouvernements québécois depuis quelques années, s’est fait, par le passé, l’avocat d’une hausse de la TVQ.

Cependant, elle n’était pas liée à une baisse des impôts sur le revenu, comme dans son dernier rapport. L’expérience de référence pour Luc Godbout était le Danemark, comme il l’a développé dans l’article « La TVA sociale, une idée pour le Québec », qu’il a co-signé avec Stéphane Paquin dans le livre Social-démocratie 2.0, Le Québec comparé aux pays scandinaves. (PUM, 2014).

Au Danemark, l’augmentation de la TVQ a remplacé la majeure partie des charges sociales des entreprises, dont les cotisations sociales des employeurs pour l’assurance-chômage et invalidité.

Mais, contrairement à ce que soutient PSPP, l’impôt sur le revenu demeure toujours la principale source de revenus pour l’État danois. Il représente 51,0% des recettes de l’État contre 34,5% au Québec.

Bien plus, en 2012, le Danemark possédait toujours le niveau de prélèvement obligatoire le plus élevé des pays de l’OCDE, avec 50,8% du PIB, comparativement à 30,7% pour le Canada.

À retenir que Godbout écrit, dans son article, que « le succès du Danemark ne s’explique pas par un désengagement massif de l’État ni par une baisse radicale des impôts selon la logique du discours néolibéral ».
 

Avantages présumés

Dans cet article, Godbout essaie de justifier la hausse de la TVQ par la réduction des coûts de production qu’elle entraîne, ce qui aurait « un effet équivalant à une dévaluation monétaire », et rendrait les produits plus compétitifs sur les marchés internationaux et le marché national.

Mais il reconnaît que « l’effet sur les produits provenant des pays émergents comme la Chine et l’Inde risque d’être insignifiant », car ces produits sont trop compétitifs et une hausse de la taxe de vente « ne ferait probablement pas une grosse différence concernant la compétitivité des produits nationaux ».

Godbout soutient que la TVA sociale possède le potentiel « d’augmenter rapidement le taux de rentabilité des entreprises, ce qui peut les inciter à investir, et à créer des emplois et du développement économique ».

C’est là la reprise du discours néolibéral classique contredit par l’ancien gouverneur de la Banque du Canada Marl Carney, qui affirmait que les entreprises canadiennes étaient assises sur des centaines de milliards qu’elles refusaient d’investir.

 

Effets négatifs assurés

Godbout reconnaissait dans cet article que la hausse de la TVQ provoquerait « une baisse correspondante du pouvoir d’achat des citoyens » et que des entreprises « choisiront d’augmenter leurs profits plutôt que de répercuter la réduction des cotisations sociales sur les prix ».

Une autre crainte est l’augmentation de la contrebande ou, encore, des achats outre-frontières. Nos chroniqueurs, à n’en pas douter, agiteraient rapidement le spectre des mieux nantis prêts à déménager hors du Québec à cause d’une fiscalité trop gourmande, mais minimiseraient l’impact sur le commerce local de la croissance de l’achat en ligne ou outre-frontières.

Dans le livre Social-démocratie 2.0, le meilleur article est celui de deux Scandinaves, Bo Rothstein et Sven Steinmo, qui expliquent les différences fondamentales entre l’État-providence canadien et la social-démocratie scandinave. Cette dernière se caractérise, entre autres, par un haut taux de syndicalisation, un haut niveau de taxation et un haut niveau de dépenses sociales.

Méfions-nous donc des emprunts à la pièce, comme cette supposée « TVQ sociale » prônée par Luc Godbout et Paul St-Pierre Plamondon.