Bové, le Canada et le libre-échange 

2016/10/13 | Par Pierre-Luc Baril

Mardi, 11 octobre, se tenait la conférence Les peuples et la planète avant le profit, au Centre Saint-Pierre. Sur le thème de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne(AÉCG), la soirée publique visait à informer la population sur les conséquences de cet accord. Six panelistes étaient attendus, seulement cinq furent présents. En effet, le conférencier-vedette José Bové, député au Parlement européen, n’a pas pu s’y rendre. Vers la fin de la rencontre, nous apprenions qu’il était retenu à la douane canadienne depuis la fin de l’après-midi. .

C’est avec beaucoup de volonté que M. Bové a tenté de s’adresser aux gens qui l’attendaient au 1212 rue Panet. D’abord convaincu qu’il serait relâché, il a par la suite proposé une conférence téléphonique. Il fût impossible de l’entendre, car il craignait que cette action amène les autorités à confisquer son téléphone. L’appareil était son dernier contact avec l’extérieur de la salle où il était retenu depuis 16h. Il ne voulut pas prendre le risque, dans sa situation, d’être ainsi coupé du monde.  

C’est complètement consternés que l’audience et les panélistes poursuivirent la séance d’information. Animé par Sujata Dey du Conseil des Canadiens, la présentation était soutenue par Nathalie Guay du Réseau québécois sur l’Intégration continentale (RQIC), Anne-Céline Guyon de Stop Oléoduc, Jan Slomp de l’Union nationale des fermiers et de Jean Morin de l’Union paysanne.    

Après avoir expliqué les conséquences de l’AÉCG - Diminution de l’emploi, concurrence déloyale, perte de souveraineté de l’État, rejet de la transition énergétique, faiblesse des lois environnementales face au libre-échange - la rencontre s’orienta sur l’action citoyenne et le sort que connu José Bové à son arrivée au Canada.  

« Chaque geste, tout minime soit-il, on doit le poser » lança Anne-Céline Guyon face aux réactions d’une militante de longue date, désabusée par le peu d’impact des moyens de pression sur les gouvernements et le blocage de Bové à la douane. Elle raconta tout le chemin qu’a fait le mouvement contre le projet Énergie Est depuis trois ans alléguant que « plus de 60% des Québécois sont aujourd’hui contre le pipeline ».  

De son côté, Nathalie Guay souligna l’échec des négociations de l'Accord de libre-échange des Amériques(AZLEA) devant l’opposition populaire au projet. « C’est pourquoi on a invité José Bové, on veut importer autre chose que des produits et des services » conclu Sujata Dey.  

De nombreuses personnes dans la salle demandèrent une suite à la rencontre. On voulait entendre José Bové. On voulait connaitre ses positions avec encore plus d’intérêt depuis son refus à la frontière canadienne. Parmi les auditeurs, on parlait déjà du non-sens où un opposant au libre-échange abolissant les frontières était justement retenu par l’une d’elles.  

La séance s’est conclue par un mot de Pierre-Yves Serinet, coordonnateur du RQIC, se désolant du sort réservé à José Bové, mais invitant les gens présents à un comité d’accueil le 13 octobre prochain, au Centre Sheraton Montréal, pour accueillir le Premier ministre français Manuel Valls, venu faire la promotion de l’AÉCG au Canada. Philippe Couillard et Justin Trudeau seront présents. Plusieurs manifestations risquent de voir le jour contre l’accord qui doit être signé à Bruxelles le 27 octobre prochain.