La « faim » de l’année

2016/11/28 | Par Richard Lahaie

En cette fin d’année, le mois de décembre est associé aux réjouissances des Fêtes mais, pour certains, c’est l’espoir d’avoir un panier de Noël. Depuis quelques années, de plus en plus de Québécois ont recours aux banques alimentaires parce que le prix des aliments ne cesse d’augmenter et qu’ils peinent à boucler leur budget.

Les fins de mois sont pénibles pour les travailleurs à faible revenu (salaire minimum ou à temps partiel), qui grossissent les rangs des soupes populaires, alors qu’auparavant, la clientèle était surtout composée de familles monoparentales, d’aînés et d’assistés sociaux.

Selon Sylvie Rochette, cofondatrice et directrice générale du Regroupement des Magasins-Partage, « le manque d’argent a des répercussions directes sur plusieurs aspects de la vie, dont les trois principaux : la santé, la réussite scolaire et l’estime de soi ».

Les besoins augmentent dans les banques alimentaires et la récolte des denrées diminue malgré les guignolées en période d’hiver. Les fournisseurs préfèrent réclamer des pertes en jetant la nourriture plutôt que de payer la manutention pour la faire parvenir aux banques alimentaires. En octobre dernier, le Magasin-Partage de Rivière-des-Prairies a dû refuser l’inscription à son épicerie économique de Noël, dès le premier jour d’inscription.

Le rapport intitulé Bilan-Faim 2015, publié par l’organisme Banques alimentaires Canada, révèle que le recours aux banques alimentaires a augmenté de 26,1 % depuis 2008.

Au Québec, il s’est accru pour la troisième année consécutive. En mars 2015, 163 152 personnes ont reçu des denrées d’une banque alimentaire, soit une augmentation de 29 % par rapport à 2008.

Les gens aux prises avec l’insécurité alimentaire, adultes et enfants, ont une diète moins variée, consomment moins de fruits et de légumes, se nourrissent de malbouffe et développent des problèmes de santé comme le diabète, les maladies cardiovasculaires et l’obésité.

Devant la difficulté de se procurer des aliments à bas prix, certains ont adopté la solution du « déchétarisme », mot-valise pour déchet et végétarisme. En d’autres mots, c’est fouiller dans les poubelles des magasins. Pour certains, c’est une action politique pour dénoncer le capitalisme et son gaspillage de nourriture mais, pour d’autres, c’est par manque d’argent. Faire les poubelles est dur pour l’estime de soi. C’est l’image du clochard qui vient à l’esprit.

 

Le pouvoir d’achat collectif

Le Regroupement d’achats des organismes communautaires est une initiative visant à augmenter le pouvoir d’achat des groupes communautaires. Le concept est simple : se regrouper pour obtenir des meilleurs prix. Ce pouvoir d’achat est transféré aux épiceries solidaires. Le but de ces épiceries est de fournir des denrées à bas prix pour des gens à faibles revenus et offrir une alternative à l’aide alimentaire traditionnelle (soupe populaire).

Dans les Magasins-Partage, il n’y a pas de paniers similaires, les bénéficiaires choisissent les denrées dont ils ont besoin, selon le budget qui leur est accordé. Il varie de 50$ à 70$ pour une personne seule et de 100$ à 150$ pour une famille. Les gens paient 10% de leur panier et peuvent choisir ce dont ils ont envie.

Malheureusement, à la fin de l’été, Moisson Montréal a annoncé aux organismes communautaires, qui reçoivent des denrées alimentaires, qu’ils allaient être facturés à partir d’octobre 2016. Les frais varient selon la quantité de nourriture reçue. Suite à cette annonce, le programme « Bonne boîte, bonne bouffe » a cessé ses activités et d’autres organismes vont devoir réduire leur aide pour contrer la faim.

 

Les frigos communautaires

Depuis le printemps 2015, des frigos communautaires sont apparus dans les ruelles et parcs de Montréal, de Québec, de Sherbrooke, de Gatineau et de Saguenay. L’objectif des frigos communautaires est de diminuer le gaspillage de nourriture en détournant des légumes et des fruits des poubelles commerciales et de permettre le partage de ces denrées avec les citoyens économiquement défavorisés.

En plus des produits frais que l’on retrouve dans le frigo, il y a quelques contenants sur des tablettes pour des produits qui n’ont pas besoin d’être réfrigérés, comme le pain et les pâtes. Certains citoyens déposent dans les frigos des plats qu’ils ont cuisiné.

Habituellement, les frigos communautaires sont situés dans une ruelle, sauf pour le « Fridge de la Petite-Patrie » qui est situé dans un local avec des heures d’ouverture. Ces frigos sont soutenus et initiés par des citoyens.