Énergie Est : Le « deal » qui change la donne

2017/01/19 | Par Pierre Dubuc

Dans un précédent qui pourrait faire école, la compagnie Kinder Morgan Inc. vient de s’engager à verser un milliard de dollars, sur une période de 20 ans, au gouvernement de la Colombie britannique pour l’autorisation de tripler la capacité de son pipeline, qui traverse la province.          

La première ministre Christy Clark avait posé cinq conditions, liées à des questions environnementale, autochtone et économique, pour « l’acceptabilité sociale et politique » du projet d’oléoduc.

 

Un « terrible précédent »

Le précédent est vivement dénoncé dans un éditorial du Globe and Mail.

Que Kinder Morgan Inc. se soit engagé à verser 350 millions $ à 41 communautés indigènes est acceptable, mais le paiement à une province d’un droit de passage pour le transport du pétrole est un « terrible précédent ».

« Est-ce que cela signifie que l’Alberta pourrait imposer une taxe sur des biens transportés par camions qui franchiraient son territoire pour se rendre en Saskatchewan? », demande le Globe.

Sans doute pas. Mais le Globe, qui représente les intérêts financiers et pétroliers de Toronto et de l’Alberta, réalise que les gouvernements des autres provinces où les projets de pipelines sont contestés, comme au Québec, s’appuieront sur ce précédent pour exiger, eux aussi, des redevances pour autoriser des projets comme celui d’Énergie Est de TransCanada.

D’ailleurs, des bénéfices économiques pour le Québec se trouvent parmi les sept conditions que Philippe Couillard a posées pour « l’acceptation politique et sociale » du projet Énergie-Est.

 

Acceptabilité sociale à géométrie variable

Rapportant les propos de Jean-François Lisée, les médias ont affirmé que le Parti Québécois était fermement opposé au projet Énergie Est. Mais le libellé du texte de la Proposition principale laisse une porte ouverte.

Sous le titre « Rétablir la confiance envers les projets énergétiques et en assurer l’acceptabilité sociale », la proposition parle plutôt d’« utiliser les leviers légaux, réglementaires, judiciaires et politiques pour empêcher tout projet de transport de pétrole ou raffiné hors Québec aux fins EXCLUSIVES d’exportation par oléoduc, par navire ou par rail » (Nos majuscules).

Autrement dit, si on lit bien, le projet pourrait être « acceptable socialement », si une partie du pétrole qui transitera par l’oléoduc était raffiné à Montréal ou à Québec.

Quelque milliards de dollars en redevances ne nuirait sans doute pas non plus à son « acceptation sociale » de la part de nos politiciens.