Les carrés rouges ont gagné, c’est le Québec qui a perdu

2017/02/13 | Par Michel Gourd

L’augmentation des frais de scolarité au printemps 2012 par le gouvernement libéral de Jean Charest a donné naissance à une importante vague de manifestations et à une grève étudiante à travers le Québec.

Une comparaison des résultats attendus par les manifestants à ceux qu’ils ont obtenus montre qu’ils ont réussi leur manifestation. Ceux-ci ont en partie mené à la défaite électorale du gouvernement libéral qui les instrumentalisait et à l’élection d’un gouvernement péquiste minoritaire.

Pauline Marois a annulé la loi 78 et la hausse de 75 % des droits de scolarité. Les étudiants ont fait tout ce qu’ils pouvaient faire et même plus. Ils ont solidarisé une population entière qui est descendue dans la rue avec des casseroles pour les appuyer.

Par contre, les années qui ont suivi ont montré que la société québécoise n’a pas suivi ses enfants qui lui montraient pourtant le chemin avec tant de clarté. Les promesses d’investissements dans l’éducation des plus pauvres se sont révélées être des mensonges et le gouvernement de Philippe Couillard est venu en début de mandat couper des milliards dans le financement de l’éducation public.

Ce désinvestissement a été fait d’une manière apte à ramener à la création d’une classe dirigeante comme dans les belles années du marxisme.

Une note socioéconomique, publiée le 7 février par l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), montre que le réseau des écoles publiques a été plus touché par les mesures d’austérité que celui des écoles privées du Québec. Pour la période de 2001-2002 à 2015-2016, l’augmentation des dépenses de transfert aux commissions scolaires était de 11,4 % tandis que celles aux écoles privées représentent 17,6 %.

En quelques années le gouvernement libéral de Philippe Couillard a détruit des acquis au niveau de l’égalité des chances entre les classes sociales que les Québécois ont mis des décennies à obtenir. Le désir du gouvernement de négliger l’éducation publique lui préférant le privé pour instruire les fils de riches laissera ceux des pauvres faire les basses besognes. Il dirige la société québécoise vers des positions sociales qui ont créé la lutte de classe en d’autres temps. L’histoire se répète pour ceux qui ne savent pas la lire. 

La révolution érable a montré la vaillance des étudiants du Québec. Elle a créé en quelques semaines un nouvel imaginaire collectif de solidarité sociale. Malheureusement, les forces qui imposent le statu quo au Québec ont repris le dessus et accéléré leur prise de pouvoir sur les citoyens pendant les années qui ont suivi.

Ceux qui font les révolutions à moitié n'ont peut-être fait que se creuser un tombeau, comme le dit une citation célèbre devenue le titre d’un film. Au moins le font-ils en ronchonnant. Les citoyens qui ne l’ont pas fait creusent encore plus vite qu’eux encouragé par les cris de leurs bourreaux.

La prise de conscience d’un problème existentiel n’est jamais perdue et oriente toujours les décisions futures des gens qui l’ont fait, même s’ils n’ont pas le courage de poser les actions que nécessiterait la situation. La génération de Québécois qui a créé le printemps érable est une lumière pour le Québec. Le problème est que la génération sortante risque de ne lui léguer que des ruines quand elle prendra le pouvoir.