Où va le Canada après 41 ans d’ONU et 18 ans d’OTAN?

2017/03/28 | Par Pierre Jasmin

L’auteur, rejoignable à pierre.jasmin@artistespourlapaix siège à l’exécutif des Artistes pour la Paix, à celui de Pugwash Canada et au comité de direction du Réseau canadien pour l’abolition de l’arme nucléaire (CNANW).

Le Canada et l’ONU tournent le dos au militarisme et au colonialisme de 1957 à 1998 :

- Prix Nobel de la Paix 1957, Lester B. Pearson fonde les Casques bleus de l’ONU tandis qu’en Nouvelle-Écosse, le Canadien Cyrus Eaton accueille les Conférences mondiales Pugwash pour la science et les affaires mondiales qui recevront le prix Nobel de la Paix en 1995 pour leurs efforts à contrer la menace globale nucléaire;

- En 1963, Diefenbaker s’oppose à l’acquisition d’armes nucléaires par le Canada;

- Le 27 avril 1967 : grâce à des fonds généreux en faveur de la science et des arts, EXPO67 Terre des Hommes fait rayonner de Montréal une vision mondiale de solidarité;

- En 1975, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec (Jacques-Yvan Morin, co-auteur) suit de 27 ans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme;

- En 1978, Pierre-Elliott Trudeau entreprend son audacieuse stratégie de « suffocation des armes nucléaires » à l’ONU; avec SALT II, elle serait responsable de la réduction du nombre de 70 000 bombes américaines et russes aux 15 000 actuelles;

 - En 1984, à partir des Performing Artists for Nuclear Disarmament (Belafonte & Ullman), se forment les Artistes pour la Paix sous la présidence de Jean-Louis Roux;

- En 1990, contre l’avis des Thatcher et Reagan, Brian Mulroney obtient la libération de Nelson Mandela, symbole de la résistance populaire emprisonné depuis 27 ans. Le futur président de l’Afrique du Sud vaincra l’apartheid, hélas pendant qu’un massacre encore non élucidé engloutit le Rwanda et les Casques bleus de Roméo Dallaire;

- En 1995, le général canadien De Chastelain entreprend en Irlande du Nord le désarmement des milices paramilitaires (Ian Paisley/Gerry Adams) et avec l’aide de Mairead Maguire, Prix Nobel de la Paix 1976, et obtient la paix à un coût mille fois inférieur aux expéditions guerrières canadiennes encore envoyées en pure perte en Afghanistan;

- En 1997-8, Jean Chrétien instaure le traité d’Ottawa contre les mines anti-personnel (Prix Nobel de la Paix 1997) et fait émerger la Cour Pénale Internationale de La Haye (1998) grâce à son fondateur et premier juge, le diplomate canadien Kirsch.

18 ans avec l’OTAN

Paul Martin et Stephen Harper sabotent l’ONU en endossant les guerres de l’OTAN. La société civile proteste avec deux manifestations d'un quart de million de personnes à Montréal, la première contre la guerre d'Irak[1] en 2003 et la seconde pour un printemps érable en 2012, la même année que démarre le mouvement idle no more des Premières Nations. Les bombardements de l’OTAN, commandés par le général canadien Charles Bouchard[2] sur la Libye en 2011, provoquent la tombée des armes du tyran Kadhafi entre les mains de milices islamistes qui ont l’appui de l’Arabie Saoudite salafiste, armée par Harper de véhicules blindés. Toutes ces guerres commanditées par le complexe militaro-industriel de Toronto déchirent encore non seulement l’Afghanistan, l’Irak, la Turquie avec ses Kurdes[3] et tout le Moyen-Orient, mais aussi l’Occident désemparé qui réagit face à la marée de malheureux réfugiés de guerre par du populisme et un rejet islamophobe.   

Valse-hésitation de Justin Trudeau

Les premiers gestes de Justin Trudeau au pouvoir seront de confiner les bombardiers canadiens au sol en Irak[4], d’accueillir généreusement des milliers de réfugiés syriens et de surfer sur le plan écologique viable de la société civile, l’Élan global.org au Québec et le Leap manifesto de Naomi Klein en vue de la Conférence de Paris sur le climat. 940 membres de l’Ordre du Canada (Canadiens pour une convention sur les armes nucléaires), rassemblés par le Pugwashite émérite Murray Thomson, demandent au gouvernement canadien de se joindre à 135 pays, à 7000 Maires pour la Paix[5] et au Secrétaire général de l’ONU Antonio Gutterres qui entreprennent de négocier l’abolition de l’arme nucléaire à partir du 27 MARS 2017 À NEW YORK.

Mais Trudeau, inféodé à l’OTAN :

1- boude le processus de négociation d’un instrument juridiquement contraignant visant à interdire les armes nucléaires[6];

2- laisse les pipelines canadiens envahir des territoires autochtones avec du pétrole de sables bitumineux, qu’il subventionne scandaleusement à coups de milliards de $, même s’il aggrave le réchauffement climatique;

3- se laisse manipuler par sa ministre russophobe des Affaires extérieures Chrystia Freeland et son ministre de la Défense Harjit Sajjan influencé par Donald Trump qui souhaite l’engager dans de coûteuses dépenses militaires, évitées par le budget du 22 mars.

Je tenterai de l’en dissuader en participant le 10 avril à une réunion convoquée à Ottawa par la Direction de la non-prolifération et du désarmement des Affaires mondiales.

 

[1] George W. Bush et Dick Cheney ont envahi l’Irak, ayant transgressé les conclusions de l’ONU (Hans Blix) à savoir que le despote Saddam Hussein n’avait pas d’armes de destruction massive

[2] Devenu représentant de Lockheed Martin (Canada), fabricant américain de bombes nucléaires et de F-35

[3] http://www.artistespourlapaix.org/?p=12725 Pétition à la ministre des Affaires extérieures

[4] http://www.artistespourlapaix.org/?p=7866  Lettre des APLP à Trudeau au lendemain des élections

[5] Voir photo de la commémoration 1995 du bombardement avec le maire de Hiroshima en annexe 2

[6] Site de la conférence: https://www.un.org/disarmament/ptnw/