Une campagne mondiale des Métallos contre Glencore

2017/05/03 | Par Richard Lahaie

Le 28 avril dernier, les employés de l’affinerie CEZinc, à Salaberry-de-Valleyfield, ont manifesté à Toronto lors de l’assemblée annuelle des actionnaires du Fonds de revenu Noranda, propriétaire de CEZinc. Lors de la manifestation, le directeur québécois du syndicat des Métallos, Alain Croteau, a fait l’annonce d’une campagne mondiale contre Glencore et le Fonds de revenu Noranda.

Les manifestants ont quitté Salaberry-de-Valletfield pour Toronto au milieu de la nuit. Ils se sont d’abord rendu sur le parvis de l’édifice de la bourse pour y rejoindre leurs confrères Métallos du District 6 (Ontario et provinces maritimes) et ceux du Conseil des Métallos de la région de Toronto.

S’adressant aux manifestants, Marty Warren, le directeur du District 6 a salué ceux-ci et le lancement de la campagne mondiale. « Cette capacité que nous avons comme organisation à traiter d’égal à égal avec les multinationales fait notre force ».

« Votre bataille est juste. Notre solidarité est ce que nous avons de plus fort. Courage, vous tiendrez le jour de plus », de faire valoir Carolyn Egan, la présidente du Conseil des Métallos de la région de Toronto.

Par la suite, Manon Castonguay, présidente de la section locale 6486 des Métallos, a assistée à l’assemblée des actionnaires grâce à une procuration accordée par un détenteur d’actions.

« Le président de l’assemblée des actionnaires a permis à Manon Castonguay de poser des questions. Des actionnaires se sont mis à poser, eux aussi, des questions. Finalement, les actionnaires se sont aperçu que les dirigeants de l’entreprise CEZinc n’ont pas tout fait pour avoir une entente avec le syndicat », d’expliquer Alain Croteau en entrevue à l’aut’journal.

« Glencore est actionnaire à 25% du Fonds de revenu Noranda. CEZinc est approvisionné en matière première à 100% par Glencore, et l’affinerie vend 100% de sa production à Glencore. Le réel propriétaire de CEZinc est Glencore. C’est pour cette raison que l’on va aller à l’assemblée des actionnaires de Glencore en Suisse, le 24 mai prochain, pour leur dire ce qui s’est passé à la table de négociations », d’ajouter monsieur Croteau,

Questionné sur la campagne mondiale, Alain Croteau a rappelé la campagne mondiale, en 2012, contre Rio Tinto Alcan. « On avait rencontré les exécutifs des communautés à chaque endroit où était présent Rio Tinto, pour expliquer la situation au Québec. Nous les avons invités à une manifestation à Alma. Il y avait 8000 personnes dans les rues de la petite municipalité du Lac Saint-Jean. Suite à cet événement, les dirigeants se sont assis à la table pour négocier la convention collective. Nous espérons recréer la même chose avec Glencore ».

Les 371 employés de CEZinc sont en grève depuis le 12 février 2017. Les négociations pour le renouvellement de la convention collective achoppent sur la question du régime de retraite. La compagnie souhaite modifier le régime de retraite des travailleurs alors que celui-ci est en excellente santé financière.

 

Portrait de la multinationale

Glencore est une multinationale anglo-suisse de courtage et d’extraction de matières premières. L’entreprise est née en 2013 d’une fusion de Glencore, société de courtage fondée par Marc Rich, et de Xstrata, une multinationale dans le domaine de l’extraction minière. Son siège social est situé à Baar, en Suisse.

Selon son site internet, Glencore est un groupe international de marketing et de production intégrée de matières premières ayant des activités dans la production, l’approvisionnement, la transformation, le raffinage, le transport, le stockage, le financement et la fourniture de métaux et minéraux, produits énergétiques et produits agricoles provenant de la production du groupe Glencore lui-même ou de tiers.

Wikipédia allègue que « Glencore contrôlait en 2011 environ 60 % du zinc mondial, 50 % du cuivre, 38 % de l’aluminium, 28 % du charbon, et environ 10 % du grain et 3 % du pétrole. Le groupe contrôlerait aussi au moins 45 % du marché mondial du plomb, métal toxique, mais stratégique (pour les batteries, le nucléaire, l’armement et les munitions de guerre, de chasse et de tir sportif, le plomb tétraéthyle, etc), dont le prix a beaucoup grimpé.

Toujours selon Wikipédia, le fondateur de Glencore, Marc Rich, a été poursuivi à plusieurs reprises pour corruption, évasion fiscale et pour ses pratiques fiscales, sociales et environnementales douteuses. Après avoir œuvré durant 37 ans dans un halo de mystère, cette société très controversée a reçu en 2008 le prix du Public Eye Awards de la multinationale la plus irresponsable.

Dans un article d’Agnès Rousseaux, de Bastamag.net, l’entreprise est accusée de mise en danger de la population, dégradation de l’environnement, pillage des ressources minières, évasion fiscale et transferts douteux via des paradis fiscaux.

En Zambie, Mopani est un bel exemple d’évasion fiscale. Elle appartient à l’entreprise Carlisa, située aux Îles vierges, qui est la propriété de Glencore Finance, aux Bermudes, qui appartient à Glencore Suisse, dans le canton de Zoug, qui est un paradis fiscal, quasiment sans impôt sur les sociétés.

À la mine zambienne de cuivre de Mulfulira, il y a des émissions de soufre (72 fois plus que les limites légales) et de plomb (90 fois). Glencore injecte de l’acide sulfurique dans les sols, polluant les nappes phréatiques, et ne protège pas la santé de ses mineurs, tous des Noirs.

Des ONG soupçonnent Glencore, via sa filiale congolaise, d’acheter du minerai à des intermédiaires, qui font appel au travail d’enfants dans des conditions extrêmement dangereuses. Le taux de radioactivité est extrêmement élevé dans les mines de Glencore, dont les ouvriers ne disposent pas de protection adéquates.

Jean-Michel Bezat a écrit, dans le journal Le Monde, que lorsque « Metaleurop, une filiale spécialisée dans les métaux non ferreux, avait fermé du jour au lendemain son usine, Jacques Chirac, alors président de la République, avait dénoncé les ‘‘méthodes de patrons voyous’’ de Glencore, qui avait brutalement licencié 831 salariés et laissé à la charge de la collectivité les énormes coûts de décontamination du site pollué par la dioxine et le plomb ».

Glencore a été impliquée dans le scandale du programme onusien « Pétrole contre nourriture » en Irak et accusé d’avoir pris part à un vaste système de corruption, mis en place par Saddam Hussein. Son fondateur, Marc Rich, a été condamné par la justice américaine à 325 ans de prison pour corruption et collusion avec l’ennemi irakien. Il a été gracié en 2001 par Bill Clinton.

En 2014, la nomination de Tony Hayward comme président de Glencore a été très controversée. Hayward est l’ancien président de BP, considéré comme le responsable de la catastrophe pétrolière dans le Golfe du Mexique en 2010.