Cégep anglo, une bonne idée?

2017/05/23 | Par Normand Breault

Presque 50 % d'analphabètes fonctionnels; 200 000 nouveaux venus qui ne veulent rien savoir du français; parmi celles et ceux qui peuvent lire après leur cinquième secondaire, plusieurs se dirigent vers les cégeps anglophones. Voilà le Québec, seul pays officiellement francophone en Amérique du Nord.

Romanciers et vous toutes et tous qui écrivez en français, quand est-ce que vous allez prendre la parole haut et fort? Face à la situation précaire du français, seriez-vous aussi apathiques que semble l'être le large public? Pensez-vous vraiment que les jeunes issus du secteur français, partis chercher leur salut au cégep anglais, vont à 17/18 ans pouvoir vous lire, se nourrir de vos histoires et de vos pensées alors que, possédant à peine les rudiments de la langue de Molière, ils/elles vont se retrouver plongés dans un milieu anglophone? Et qu'en est-il de leur connaissance de l'histoire nationale, cher historien?

Frédéric Bastien (Le Devoir, 10 mai) - l'historien en question- s'est récemment lancé à la défense de la fréquentation du cégep anglais par les jeunes francophones et allophones issus du secteur français. Il n'y voit que des avantages, dont celui d'améliorer leur langue seconde (qui risque fort de devenir première). 

Il ne m'a pas convaincu, mais pas du tout. Il m'a cependant confirmé dans ma conviction que doit être démonté et dénoncé le mythe voulant que les Anglos acceptent leur situation de minoritaires et désirent apprendre la langue de la majorité, seule langue officielle du Québec.

Parlant des jeunes Anglos le professeur dit : «Chaque année, je suis frappé de constater dans mes classes le nombre important de ceux qui sont incapables de soutenir une conversation en français, et ce même s'ils ont passé toute leur vie au Québec et qu'ils ont eu plusieurs années d'enseignement du français langue seconde».

Et ce ne sont pas les jeunes cégépiens francophones tellement férus d'adopter la langue de l'Empire qui vont les aider à sortir de leur repli identitaire. Oui, les écrivains et les penseurs québécois, hommes et femmes, doivent sonner l'alarme. Il faut surtout que, sans tarder, les écoles soient plus efficaces dans l'enseignement du français et que la loi 101 s'applique au cégep.