Crise des réfugiés : Du rêve américain au rêve canadien

2017/08/18 | Par Richard Lahaie

Depuis quelques semaines, des réfugiés d’origine haïtienne fuient les États-Unis en raison de la menace d’expulsion, devant prendre effet en janvier 2018, au moment de la fin du « statut de protection temporaire ». Ce statut avait été instauré suite au tremblement de terre en Haïti en 2010 et il a permis à des Haïtiens de s’établir en territoire étatsunien.

Plusieurs centaines de réfugiés passent quotidiennement la frontière canado-américaine entre les postes-frontaliers. En arrivant par les bois, les réfugiés demandent l’asile. En entrevue à l’aut’journal, Chantal Ismé, vice-présidente du conseil d’administration de la Maison d’Haïti, déclare que « la panique et l’incertitude d’être déporté vers Haïti fait que le Canada est une option attrayante. Malheureusement, ils sont mal informés sur la façon de faire pour immigrer ici. On leur a dit qu’il était facile d’immigrer au Canada. Il suffisait de traverser la frontière à pied et qu’ils allaient facilement être considérés comme réfugiés ».

L’Entente sur les tiers pays sûrs est une entente conclue en 2004 par les gouvernements du Canada et des États-Unis pour gérer le mouvement des demandeurs d’asile à leur frontière commune. Ainsi, le Canada peut refuser et refouler les demandeurs d’asile qui se présentent aux postes-frontaliers canado-américains parce que l’entente prévoit que les demandeurs d’asile sont tenus de présenter leur demande dans le premier pays où ils arrivent (États-Unis ou Canada), à moins d’être visés par une exception.

Les types d’exceptions sont basés sur des principes qui tiennent compte de l’importance de l’unité familiale (avoir un membre de sa famille au Canada), de l’intérêt supérieur de l’enfant (les mineurs non accompagnés) et de l’intérêt public (risquer la peine de mort aux États-Unis ou dans un autre pays).

Chaque jour, le nombre de réfugiés qui traversent la frontière est plus important que le nombre de dossier que les agents frontaliers peuvent traiter par jour. Cette situation fait en sorte que la liste d'attente s'allonge de jour en jour.

« Présentement, la majorité des réfugiés sont confinés dans un village de tentes à la frontière et le gouvernement subvient aux besoins essentiels de ceux-ci. Plus les jours passent, plus ils sont nombreux à vivre en pleine promiscuité. Éventuellement, des soins de santé seront nécessaires, car il y a des enfants qui sont avec les adultes », d’expliquer Chantal Ismé.

Ces réfugiés, qui vivent sous les tentes de l'armée canadienne, avaient déjà connu les mêmes conditions de vie difficiles sous des tentes, en Haïti, à la suite du tremblement de terre de 2010. Ce sont des souvenirs troublants qui risquent de revenir en mémoire. D'autres, plus chanceux, sont hébergés au Stade olympique ou dans des refuges temporaires.

Après le rêve américain, le rêve canadien risque de laisser un arrière-goût à ces demandeurs d’asile. « Les réfugiés vivaient aux États-Unis depuis quelques années et pour la plupart, ils travaillaient dans des emplois réguliers. Ils avaient des logements, des amis. Ils avaient espoir de pouvoir rester et de poursuivre cette nouvelle vie. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’ils quittent », d’ajouter Chantal Ismé.

Selon le site Internet de Wikipédia, la première vague d’immigrants d’origine haïtienne (1961 à 1976) a permis à 10 845 personnes de s’installer au Québec et d’échapper au régime répressif du président François Duvalier. La seconde vague (1976 à 1996), plus importante, a vu l’arrivée de 45 900 Haïtiens. En ajoutant les Haïtiens nés au Québec aux nouveaux arrivants, la communauté haïtienne du Canada est d’environ 130 000 citoyens, surtout concentrée dans la région métropolitaine de Montréal.

Fondée en 1972, la Maison d'Haïti a pour objectif d’accueillir et accompagner les nouveaux arrivants dans leur cheminement vers leur intégration et leur insertion économique, sociale et culturelle. L’intervention prend la forme d’activités diverses telles que l'accueil, l'évaluation des besoins, l'orientation, des séances d’information et des activités socioculturelles. Plusieurs services leurs sont offerts : soutien technique, aide pour trouver un logement et des vêtements, références vers des services pour les familles et le développement des enfants.