Marche de protestation d’Unifor et de l’AIMTA contre Boeing

2017/09/15 | Par Richard Lahaie

Le 13 septembre dernier, 650 syndiqués d’Unifor-Québec et de l’Association internationale des machinistes et travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale (AIMTA) ont marché dans les rues de Montréal sous un ciel sans nuage. Ils ont fait un arrêt devant le consulat américain avant de se rendre devant les bureaux de Jeppesen, une filiale de Boeing.

Cette marche fait suite à la plainte de la compagnie américaine Boeing prétendant que Bombardier a bénéficié d’une aide gouvernementale indue qui lui permet de vendre à rabais ses avions CSeries. Le département du commerce des États-Unis a débuté une enquête à la suite de cette plainte et rendra sa décision le 25 septembre prochain.

En entrevue à l’aut’journal, Renaud Gagné, directeur québécois d’Unifor, explique « qu’il est primordial de lancer un message clair et de signaler que les prétentions de Boeing sont mal fondées et risquent de faire perdre des emplois et d’affaiblir l’économie du Québec ».

« Les ventes de la CSeries ne représentent pas le tiers de 1% des ventes de Boeing. Il faut noter que Bombardier a généré, en 2016, des retombées de 14 milliards de dollars chez des sous-traitants étasuniens. Le 25 septembre prochain, les États-Unis pourraient imposer des droits compensateurs jusqu’à hauteur de 70% du prix payé par Delta Airline pour les avions de la CSeries. Comme dans le cas du bois d’œuvre, l’imposition de droits compensateurs a des effets négatifs sur l’emploi et l’industrie. Ce n’est pas uniquement Bombardier qui sera touché, mais aussi ses fournisseurs tels que Pratt & Whitney et Avior. Les conséquences pourraient se faire sentir ailleurs dans d’autres secteurs économiques comme celui de l’aluminium, qui entre dans la chaîne de production. Bombardier achète 50 000 tonnes d’aluminium par année », de poursuivre Renaud Gagné.

« Cette plainte de Boeing met en danger les emplois dans l’aérospatial au Québec, au Canada et dans plusieurs autres pays. CSeries est l’avion le plus performant dans sa catégorie et le plus avancé technologiquement. Cet avion est un joyau de l’industrie québécoise et Boeing veut l’empêcher d’être sur le marché », de s’indigner David Chartrand, coordonnateur québécois de l’AIMTA.

« Ce n’est même pas une question de compétition. Boeing n’a pas d’avion assez avancé pour concurrencer la CSeries. De façon abusive, Boeing a déposé une plainte, comme nous l’avons déjà vécu dans le secteur du bois d’œuvre où il y a eu des pertes d’emplois. Ce sont des emplois très bien rémunérés, qui font rouler les programmes sociaux via l’impôt sur le revenu. De plus, Boeing est la compagnie la plus subventionnée dans le monde via des contrats militaires en recherche et développement. Par la suite, Boeing utilise ces développements militaires sur leurs avions civils. Donc, ils accusent les autres de faire ce qu’ils font », de soutenir David Chartrand.

Ottawa a menacé Boeing de laisser tomber l’achat prévu de 18 avions militaires Super Hornet, si Boeing n’abandonnait pas sa plainte.

Plusieurs élus ont répondu à l’appel, dont Alexandre Boulerice et Pierre Nantel du Nouveau parti démocratique (NPD), Gabriel Sainte-Marie du Bloc québécois et Alain Therrien du Parti québécois.

« Si monsieur Trudeau et madame Freeland font une bonne job, on va leur dire bravo. Mais on va être vigilant, car on a vu dans le passé les libéraux échapper le ballon », de soutenir Pierre Nantel du NPD.

« Boeing, avec la complicité du département du commerce, veut faire mal à Bombardier. Ils savent que la plainte n’est pas fondée. Ils veulent juste faire peur pour ralentir le développement de Bombardier. C’est toutes les jobs du secteur aéronautique qui sont touchées par cette plainte. L’aéronautique est le secteur où il y a le plus de valeur ajoutée. Pour chaque dollar généré dans ce secteur, ça en fait 5 dollars dans notre économie. Il est faux de dire que Bombardier est subventionné, c’est des prises de participation que l’État a fait. Dans le passé, pour chaque « piastre » que le gouvernement a placée dans Bombardier, il a fait une piastre et demie. Dans les négociations de l’ALENA, il ne faut pas que les travailleurs québécois servent de monnaie d’échange pour l’industrie automobile », de dénoncer Gabriel Saint-Marie du Bloc québécois.