Le général Mladic condamné à perpétuité par le Tribunal international

2017/11/23 | Par Pierre Jasmin

L’auteur est Artiste pour la paix

Le terrible massacre de Srebrenica en Bosnie-Herzégovine en 1995 a vu, malgré la présence des Casques bleus de l’ONU, le général serbo-bosniaque Ratko Mladic séparer femmes et enfants bosniaques des hommes, pour massacrer huit mille de ces derniers. Le voici enfin condamné à perpétuité pour génocide et crimes contre l’humanité par la justice du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (son dernier jugement).

Lors de ma présentation multidisciplinaire du 26 septembre à l’UQAM, j’ai émis une date erronée que je rectifie aujourd’hui, profitant de l’actualité. C’est d’abord bien en 1994 que Kateri Lescop, réalisatrice à Radio-Canada, a tourné un reportage[1] au Point de ma participation à une flottille de paix dans l’Adriatique organisée par le violoniste slovène, Miha Pogacnik. Un des premiers interprètes de l’œuvre Fratres du compositeur-ermite d’Estonie, Arvo Pärt, Miha avait fondé à Chartres l’Institut des Relations interculturelles par l’Art avant de devenir ambassadeur culturel slovène. Kateri avait tout de suite perçu le potentiel filmique de six bateaux peuplés d’une centaine de pacifistes, dont plusieurs musiciens donnant des concerts aux réfugiés de guerre de l’ex-Yougoslavie. Parmi les tout premiers civils à pénétrer la Croatie après la cruelle guerre qui continuait ses ravages en Bosnie, nous entendions fréquemment le grondement des bombardements serbes. Une des plus belles actions dont j’ai été témoin était le travail d’un organisme juif rassemblant des vivres à destination des assiégés musulmans de Sarajevo.

Car la guerre[2] allait démontrer sa plus grande cruauté à Srebrenica près d’un an plus tard en juillet 1995. Il faut donner le mérite à la légendaire Ariane Mnouchkine d’avoir mobilisé le festival d’Avignon 1995 pour alerter la communauté internationale sur ce honteux massacre de musulmans. Grâce à Marie-Hélène Falcon du Festival de Théâtre des Amériques de retour au Québec, la comédienne Louisette Dussault et moi nous sommes joints à une conférence de presse dès début août pour demander au gouvernement Chrétien de tout faire pour éviter que Sarajevo devienne une nouvelle Srebrenica. Gérard Pelletier, devenu membre des Artistes pour la Paix à cause de notre campagne en faveur du contrôle des armes à feu, suite au massacre antiféministe à l’école Polytechnique en 1989, a alors conseillé, à titre d’ancien ministre des Affaires internationales, une intervention ponctuelle de l’OTAN. Elle allait détruire sans morts d’hommes les canons juchés sur les montagnes entourant Sarajevo, parce qu’on avait averti une heure avant l’opération les serbo-bosniaques pour qu’ils fuient les lieux, sans toutefois leur donner le temps de pouvoir emporter leurs canons lourds et leurs caisses d’obus avec eux. Je tiens à signaler que c’est la seule et dernière opération militaire que les APLP approuveront, car tout comme le général Lewis McKenzie (avec qui nous étions rarement d’accord[3]), nous avons condamné le bombardement de la Serbie par l’OTAN lors des événements du Kosovo. Et nous nous prononcerions aujourd’hui contre le bombardement du Myanmar, malgré la responsabilité indéniable, n’en déplaise à la trop silencieuse Aung San Suu Kyi, de l’armée birmane dans le drame des Rohingyas.

Car bombarder un peuple n’est jamais une solution.

 

 

[1]Suite à la projection de l’émission en Allemagne, le journal populaire BILD IM ZEITUNG, tirage à deux millions, a titré : « En Croatie, les sons de Bach et Beethoven ont remplacé le bruit des fusils et des canons», aidant ainsi au retour des touristes.  

[2] Le grand artiste Emir Kusturica a une vision différente des événements de la guerre yougoslave, que j’ai déplorée dans un article, où j’étais par contre tenté de lui donner raison quant à sa vision des événements plus récents en Ukraine http://lautjournal.info/20150212/kusturica-sur-l’Ukraine .

[3] « En bombardant la Serbie, nous avons encouragé les minorités islamiques du monde entier à se rebeller », une des nombreuses déclarations controversées de Lewis McKenzie.