Du foin pour les logements sociaux

2017/11/24 | Par Richard Lahaie

Le 22 novembre dernier, Journée canadienne de l’habitation, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) a organisé une manifestation, quelques heures avant le dépôt de la Stratégie sur le logement du gouvernement fédéral.

Après avoir marché dans les rues de Montréal, les manifestants se sont rendus à la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL) pour y laisser des bottes de foin. « Ce dont on a besoin pour résoudre la crise du logement abordable qui sévit au Canada et au Québec, c’est d’une stratégie qui ne laissera pas les personnes les plus mal-logées sur la paille », de déclarer Émilie E. Joly, responsable des dossiers fédéraux au FRAPRU.

La manifestation s’inscrit dans le cadre d’une journée pan canadienne d’actions, pilotée par le FRAPRU, l’Ontario Coalition Against Poverty et le Carnegie Community Action Project de Vancouver. D’autres actions se sont déroulées dans plusieurs villes canadiennes dont Québec, Toronto, Sherbrooke, Granby, Rimouski, Gatineau, London, Edmonton et Vancouver.

« Au Québec, nos logements HLM sont des logements conventionnés avec le gouvernement fédéral. Ce n’est pas le cas dans les autres provinces. Souvent, les HLM ont été vendus ou donnés aux municipalités avec des budgets insuffisants. Ça prend l’aide du gouvernement fédéral pour aider à rénover et pour ne pas les perdre. Le gouvernement a promis 100 000 nouvelles unités, mais on en perd tout autant parce que on n’a pas les fonds nécessaires pour les rénover », de poursuivre Émilie E. Joly.

Rappelons qu’un logement conventionné est un logement en location, dont le propriétaire a signé une convention avec l’État. Par cette convention, le propriétaire s’engage à respecter un loyer maximum.

La manifestation a fait un arrêt devant l’Agence canadienne du revenu. Mme Joly a revendiqué un financement adéquat. « Il y a suffisamment d’argent, mais il est mal investi. Ce n’est pas dans les paradis fiscaux, ni dans les cadeaux aux amis du Parti libéral qu’il faut investir, mais dans le logement social ».

« À Montréal seulement, plus de 100 000 ménages ont des besoins impérieux de logement, parce qu’ils vivent dans un logement trop cher, trop petit ou insalubre, d’expliquer Émilie E. Joly. Au Canada, c’est près d’un million de ménages qui sont dans la même situation. 42 000 ménages montréalais paient 100% de leurs revenus pour se loger. Ce sont des chiffres qui sont inacceptables. »

Tel que prévu, en après-midi, le gouvernement fédéral a dévoilé sa Stratégie sur le logement. Le gouvernement a annoncé la poursuite, à plus long terme, de l’aide financière aux logements sociaux existants et aux locataires à faible revenu qui y demeurent.

Dans un communiqué, le FRAPRU reproche le manque d’ambition pour le développement futur de logements sociaux permettant de répondre aux besoins les plus criants. De plus, l’absence d’un calendrier précis d’investissements empêche de réellement mesurer l’importance des annonces.

Le FRAPRU considère comme une victoire le fait que la Stratégie reconnaisse enfin les responsabilités d’Ottawa envers les ménages pauvres qui habitent déjà dans des centaines de milliers de logements sociaux qu’il a financés par le passé et ce, en HLM, en coopératives d’habitation ou en logements gérés par des Organismes sans but lucratif. Dans ces deux derniers cas, l’aide est assurée pour dix ans.

Le gouvernement Trudeau va injecter 40 milliards de dollars pour le logement social au cours des dix prochaines années via une nouvelle allocation au logement de 2 500 dollars par an.

Le FRAPRU condamne le choix du gouvernement Trudeau d’instaurer une allocation-logement. « Même si elle permettra, à court terme, de soulager des locataires consacrant une part trop importante de leur revenu au loyer, elle ne résoudra pas le problème de manque de logement adéquats à long terme » explique Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU. Elle ajoute que les 4 milliards de dollars consacrés à ce nouveau programme auraient été mieux investis s’ils avaient été ajoutés au Fonds pour le logement social.