Pour sortir de la gaucherie collective, osons l’unité !

2017/11/28 | Par Gilles Simard

L’auteur est journaliste, auteur et citoyen libre.

En lien avec les récentes manifs anti-racistes de novembre, il y a quelque chose de désolant à voir l’extrême-gauche vouloir nous rentrer de force dans la gorge que La Meute, Storm Alliance et autres, sont les ennemis publics numéro Un, et qu’il faut empêcher ces nostalgiques-de-l’armée-canadienne de parader sur Ste-Catherine ou Grande-Allée. Idem pour les personnes de cette même extrême-gauche sensées manifester contre la haine, et qui déploient elles-mêmes autant d’insultes, de mépris voire de haine, envers la majorité de la population québécoise s’affichant à bon droit comme nationaliste et laïque. Une majorité qui se pose aussi de légitimes questions sur l’immigration ou la francisation, comme n’importe quelle société d’accueil au monde, mais qu’on traitera volontiers de raciste ou xénophobe, comme ça, au petit bonheur du jour et du moralisme ambiant.

Que voilà autant de démonstrations improductives, de cris d’orfraie mal venus, comme si l’ensemble des Québécois-ses, nationalistes ou pas, étaient juste une bande de crétins consomptifs, incapables de distinguer le bien du mal, incapables de choisir leur propre voie sociale et politique sans l’aide de l’avant-garde éclairée des encapuchonnés-es de l’UQAM ou de McGill… Des révolutionnaires de salon ceux-là, qui mélangent tout et jouent aux Social Justice Warriors sur le Net (SJW) en donnant allègrement dans la « blanchitude », le rétro-féminisme pro-religieux et la censure, et en ânonnant ad vitam aeternam leur crédo anti-nationaliste style Speak White 2017, genre.

N’empêche, il y a quelque chose de tout aussi (sinon plus) désolant à voir des groupes comme La Meute, Storm Alliance, Atalante, 3% et pareils hurluberlus rouler poussivement des mécaniques et du bedon dans les rues de la Métropole et de la Vieille Capitale. À voir et à entendre sur le Web et ailleurs, des spécimens issus directement des profondeurs de la psyché humaine, des mégères et des escogriffes sans nom dignes des pires scénarios de la lutte Grand Prix nous parler des immigrants et de la souveraineté.

Misère… Au secours, Johnny Rougeau et Tarzan la bottine Taylor !

Et de constater, finalement, que certaines de leurs idées profondément réactionnaires, avilissantes ou racistes, peuvent malheureusement trouver preneurs au sein de la population, en outre de faire les choux gras des médias sensationnalistes et des politiciens sans scrupules et clientélistes. Ici, faut-il le rappeler, la nature a horreur du vide…

                        

Pendant ce temps-là…

Tout cela pour dire qu’actuellement au Québec, les gauches inclusive et nationaliste sont très déconnectées, polarisées, et que hélas, nous laissons de plus en plus le terrain de la contestation politique et sociale à des groupuscules extrémistes dont l’improductivité n’a d’égale que leur résonnance médiatique nettement exagérée.

Et pendant ce temps-là, bien sûr, les libéraux sont morts de rire, peaufinent leur stratégie contre la CAQ et rejouent « le Père-Noël est une ordure » avec leurs ignobles et calamiteuses baisses d’impôt et de services.

Et pendant ce temps-là, bien sûr, on oublie les grands défis, voire les grands enjeux nationaux en matière d’éducation, de santé mentale et physique, d’environnement, de langue, de main d’œuvre, d’économie, de féminisme, de logement social et aussi sur la question des Autochtones et des minorités visibles.

Et pendant ce temps-là enfin, pendant qu’avortent les procès des Hell’s, Acurso et autres individus douteux, la croisière libérale s’amuse, elle… « Oui, tout va très bien madame la marquise, et non mais, qu’est-ce on se bidonne ma chère, avec ce bon vieux Jean Charest, si drôle et si lumineux par devers les odeurs de souffre et de boules-à-mites… »

 

Assez, c’est assez !

C’est assez, ça suffit ! Il est grand temps qu’une gauche plus unie, plus cohérente et efficace, une gauche citoyenne responsable, reprenne l’initiative du terrain. Il est grand temps, s’agissant de nos richesses collectives et autres institutions publiques, qu’une gauche solidaire élargie, nationaliste et inclusive - pourquoi pas ? - fasse fi de ses différents pour sauver ce qui peut l’être encore.

Il faut accepter de débattre intelligemment et miser davantage sur ce qui pourrait nous unir, dans nos partis, nos syndicats, nos groupes communautaires, nos assemblées et nos diverses instances citoyennes, pour sortir les libéraux et regagner l’estime de nous-mêmes.

Il faut, et nous le pouvons, retrouver cette unité et cette harmonie des grandes manifestations contre la guerre en Irak, au début du millénaire. Il faut retrouver ce respect des personnes et des différentes stratégies qui prévalait lors du Sommet des Amériques, à Québec, en 2001. Il faut, et nous le pouvons, retrouver cette originalité, cette audace et cet espoir qui baignaient le Printemps érable-2012, alors que tout le monde, au Québec, avait l’impression de jouer les premiers violons dans le même grand orchestre social.

Pour sortir de la gaucherie collective, pour une gauche qui retrouve son élan et sa liberté, il faut oser l’unité !

Nous nous le devons.