Hausse du salaire minimum au Québec : doit-on s’attendre à des réactions comme en Ontario?

2018/01/19 | Par Richard Lahaie

Le 10 janvier dernier, des militants ontariens ont manifesté devant des cafés Tim Hortons, après la décision de certaines succursales de couper dans les conditions salariales des employés suite à l’augmentation du salaire minimum. Le 1er janvier, le salaire minimum en Ontario est passé de 11,60$ à 14$ l’heure.

« Couper dans les conditions de travail, ce sont des façons de faire très peu cavalière et irrespectueuses des travailleurs et travailleuses. C’est déplorable que des employeurs soient prêts à descendre aussi bas pour protéger leurs profits », de déclarer en entrevue à l’aut’journal, Virginie Larivière, porte-parole de la campagne 5-10-15 du Collectif pour un Québec sans pauvreté.

« Le comportement des franchisés de Tim Hortons démontrent qu’ils sont des mauvais joueurs. Les groupes patronaux vont souvent nous dire qu’il faut suivre les lois du marché et ses règles. Mais lorsque les règles favorisent les employés, alors il y en a qui sont moins à l’aise de respecter les règles du jeu auxquelles ils nous convient », de s’offusquer Mme Larivière.

Questionné au sujet de la position de certains économistes qui affirment que la hausse du salaire minimum entraînera des pertes d’emploi, Virginie Larivière explique « qu’en 2012, en Colombie-Britannique, le salaire minimum a été augmenté de 28%. L’institut Fraser était contre et affirmait que la hausse allait faire perdre 52 000 emplois. Dans la réalité, nous avons constaté des pertes d’emploi qui ne dépassaient pas les 3 800. Donc, très loin des catastrophes annoncées par le patronat. L’équation augmentation du salaire minimum égale pertes d’emploi ne tient pas la route ».

 

« Le gouvernement étudie l’augmentation du salaire minimum selon différentes variables, dont celle de ne pas dépasser 50% du salaire moyen. Cette théorie de ne pas dépasser 50% du salaire moyen enferme dans une logique bien précise l’augmentation du salaire minimum, de préciser Mme Larivière. En utilisant la lorgnette de Pierre Fortin, le gouvernement reste dans la logique de la préservation des profits ».

« Il faudrait plutôt se demander si le salaire minimum ne devrait-il pas plutôt aider les plus démunis à sortir de la pauvreté. Une personne qui travaille à temps plein au salaire minimum devrait pouvoir subvenir à ses besoins, pas seulement ceux de base. Il y a 11% des gens qui travaillent et qui doivent utiliser les services des banques alimentaires pour mettre de la nourriture dans leur assiette », de déplorer Véronique Larivière.

« C’est un manque de cohérence que nous propose le gouvernement quand il nous dit qu’il faut travailler pour sortir de la pauvreté. Or, on ne sort pas de la pauvreté en travaillant au salaire minimum actuel. De plus, le gouvernement met en place des programmes d’incitation au travail à l’aide sociale pour obliger les prestataires à travailler au salaire minimum », d’analyser Véronique Larivière.

Le 17 janvier, le gouvernement Couillard a annoncé qu’il augmentera le salaire minimum à 12$ de l’heure à partir du 1er mai 2018. Ce 0,75 cents d’augmentation représente une hausse de 6,67% pour les 352 900 salariés québécois gagnant le salaire minimum.

« On salue cette hausse qui est la plus importante au Québec, mais c’est nettement insuffisamment. Ça prend minimalement 15$ de l’heure à temps plein pour sortir de la pauvreté, d’arguer Mme Larivière. Car beaucoup de travailleurs et travailleuses au salaire minimum travaillent à temps partiel. Cette augmentation de 0,75¢ ne permet pas d’atteindre le seuil pour sortir de la pauvreté ».

Rappelons que le portrait des gens qui travaillent au salaire minimum se conjugue majoritairement au féminin. Souvent, le seul salaire qui subvient aux besoins familiaux, l’est au salaire minimum. Les étudiants sont également présents dans cette situation, mais dans une proportion moindre.

Au Canada, toutes les provinces ont un salaire minimum unique pour tous les salariés, sauf pour quatre provinces. La Colombie-Britannique et l’Ontario ont un salaire minimum différent des autres salariés pour les serveurs d’alcool, au Québec c’est pour les employés à pourboire, et la Nouvelle-Écosse fait une distinction entre les travailleurs avec expérience et travailleurs sans expérience.

 

Photo : Unifor