Votarà... Ja he votat !

2018/04/05 | Par Germain Dallaire

Pendant que la majorité des gens se réunissaient en famille pour le traditionnel souper de Pâques, plus d'une centaine de personnes se rassemblaient au cinéma du Parc à Montréal pour assister à la première de « 1-0: référendum en Catalogne », un documentaire sur le référendum qui s'est tenu le 1˚ octobre dernier.

Le documentaire commence au matin dans la noirceur, alors qu'on voit une personne se lever et prendre un sac plastique contenant une urne censée recueillir les votes référendaires. Progressivement, on voit ces urnes camouflées un peu partout dans la ville être apportées vers les lieux de votation et arriver sous la pluie battante dans un balai méticuleusement planifié pour effectuer l'opération la plus rapidement possible.  À ces endroits, plusieurs dizaines de personnes les y attendent pour les protéger, certaines y ont passé la nuit. Les urnes et leurs gardiens sont accueillis sous les applaudissements et aux cris de « Votarà » (Je voterai).

À partir de ce moment, on entre dans un véritable tourbillon: coupures fréquentes d'Internet (les informaticiens se dépêchaient de se connecter à des lignes de cellulaires) du sites sur lequel se trouvait la liste universelle des électeurs. Mais surtout intervention de la Guardia Civil qui, à certains moments, recule devant la masse exerçant une résistance passive mais, d'autres fois, fonce à coups de matraque et de balles de caoutchouc allant jusqu'à défoncer les portes de bureaux de scrutin.

À chaque occasion, de la créativité et une résistance passive des gens présents qui répliquent par des slogans (independancia, votara, chants patriotiques). Tout de même, en bout de ligne, plus de mille blessés.  À la fin de la journée, les gens applaudissaient les urnes remplies en scandant « Ja he votat » (J'ai voté). C'est plus de 2 200 000 votes qui ont été comptabilisés auxquels s'ajoutent plus de 700 000 qui ont été confisqués par la Guardia Civil. Tout cela dans un climat de répression et d'extrême tension.

Le documentaire commence au lever du jour et se termine à la tombée de la nuit, mais il aurait pu tout aussi bien commencer avec des images de 1938, alors que des centaines de Catalans empruntaient les sentiers des Pyrénées menant à la France pour fuir la dictature de Franco. Pour le référendum, c'est l'inverse qui s'est passé puisque des Catalans ont pris les mêmes sentiers pour apporter les urnes. Il y a là une image forte qui symbolise la lutte plus que centenaire des Catalans pour conserver leur langue et leurs valeurs. Une lutte qui culmine actuellement avec le processus de réalisation de leur indépendance.

Il ressort beaucoup de choses de ce film très émouvant. Premièrement, le pacifisme irréductible des Catalans et leur créativité. Deuxièmement, l'image forte de masses de gens solidaires et unis qui, tel un long fleuve tranquille, ne faisant qu'accumuler de l'énergie lorsqu'il rencontre un obstacle, ne peut qu'arriver à son résultat.

Suite au film, des représentants de Oui-Québec, Québec solidaire et de la société Saint-Jean Baptiste ont témoigné (ils et elles étaient présents en Catalogne le jour du référendum) de leur émotion et de leur solidarité avec le peuple catalan. Si vous voulez appuyer la lutte des Catalans, allez à cette adresse: http://www.solidarite.cat/. On vous invite même à écrire aux prisonniers politiques, un geste qui est très apprécié par les personnes concernées. Pour ce qui est du film, le centre culturel catalan et la coalition travaillent à de nouvelles représentations. Si ça se présente, manquez pas ça!