Liberté aux prisonniers politiques catalans

2018/04/06 | Par Claudette Carbonneau

Depuis le référendum sur l’indépendance de la Catalogne tenu le 1er  octobre dernier, l’État espagnol a dévoilé au monde un visage que l’on croyait à jamais destiné aux poubelles de l’histoire. 

Le jour même du référendum, Madrid a dépêché en Catalogne des forces de répression dans le but d’empêcher la population de se prononcer démocratiquement sur son avenir politique. Les télévisions du monde entier ont montré des forces armées saisissant des boîtes de scrutin, faisant obstacle aux électeurs désireux d’exercer leur droit de vote, matraquant des foules d’électeurs et d’électrices dont le seul crime était de vouloir exprimer leur voix. 

Malgré ces scandaleuses provocations, l’État espagnol n’est pas parvenu à faire dévier la volonté des dirigeants indépendantistes et du peuple catalan d’agir par des voies pacifiques. 

Cela n’a pas suffi ! Avec la complicité d’un appareil judiciaire manifestement partial, l’État espagnol a entrepris de faire emprisonner « de manière préventive » des leaders de la coalition arc-en-ciel qui a fait le succès du mouvement indépendantiste catalan, et ce, sans procès sur les accusations factices de « sédition, rébellion ou malversation ». 

Ainsi se sont retrouvés dans les geôles madrilènes deux responsables des grandes organisations de la société civile qui ont organisé les impressionnantes mobilisations des dernières années, Jordi Sanchez et Jordi Cuixart, ainsi que huit ex-ministres de l’exécutif catalan, dont Oriol Junqueras, chef du parti de la gauche républicaine de Catalogne (ERC) et ex-vice-président de la Catalogne. 

Faisant aussi l’objet de telles accusations, d’autres leaders ont fui l’Espagne, dont Carles Puigdemont, le président déchu par le coup de force du gouvernement espagnol après la Déclaration d’indépendance du Parlement catalan, ainsi que les dirigeantes de la gauche indépendantiste Marta Rovira, secrétaire générale d’ERC, Anna Gabriel, ex-députée membre de la CUP (Candidature d’unité populaire), et Clara Ponsati, ex-ministre de l’Éducation, aujourd’hui en Écosse.

 

Parodie de justice

Non satisfait d’avoir décapité un mouvement démocratique et pacifique exemplaire, le pouvoir espagnol a donné un nouveau coup de massue. Lançant un mandat d’arrêt européen identique à celui qu’il avait pourtant abandonné le 5 décembre 2017, l’Espagne fait arrêter M. Puigdemont par la police allemande le 25 mars dernier alors qu’il rentrait de Finlande, où on l’avait invité à prononcer une allocution sur la situation dans son pays. 

Du même coup, on a fait incarcérer de « manière préventive » Jordi Turull, troisième candidat pressenti pour assumer la présidence de la Generalitat, ainsi que Carme Forcadell, ex-présidente du Parlement catalan.

De cette manière, le gouvernement de Mariano Rajoy bafoue les choix de l’électorat catalan et prolonge l’odieuse tutelle espagnole sur le gouvernement de la Catalogne. 

Dans cette parodie de justice qui a mené aux arrestations, incarcérations et exils d’hommes et de femmes politiques représentant légalement et en toute légitimité le peuple catalan, jamais le gouvernement de Madrid ni l’appareil judiciaire à son service n’ont pu démontrer quelque acte de violence commis par les leaders souverainistes. La raison en est simple : il n’y a eu aucune violence de la part du mouvement indépendantiste catalan. Au contraire, c’est l’État espagnol lui-même qui s’est rendu coupable de tels gestes dont le monde entier a été témoin. 

Ces femmes et ces hommes sont d’évidentes victimes d’une répression orchestrée par une instrumentalisation politique du pouvoir judiciaire. À l’évidence, les leaders indépendantistes catalans incarcérés ou forcés à l’exil le sont pour des considérations purement politiques qui n’ont rien à voir avec des crimes de droit commun.

 

Mettre fin à l’escalade

L’État espagnol doit immédiatement abandonner toutes les accusations portées contre les leaders de toutes les formations indépendantistes et faire libérer les prisonnier-e-s politiques détenus pour avoir tenu l’engagement électoral d’organiser un référendum sur l’indépendance de la Catalogne. Il doit aussi abandonner les mandats européens lancés sous de fausses accusations criminelles et permettre aux exilé-e-s souverainistes de rentrer sans entraves. 

À ce jour, les gouvernements européens, canadien et québécois ont outrageusement fermé les yeux devant le droit du peuple catalan de décider de son avenir. L’heure est venue pour eux, au nom des fondements mêmes de la démocratie, de réclamer que l’Espagne abandonne l’escalade de répression politique dans laquelle elle s’est enferrée et qu’elle libère sur-le-champ ces prisonnier-e-s politiques.

* Membres de la Coalition québécoise de solidarité envers la Catalogne, société civile : Cercle culturel catalan du Québec (CCCQ), Confédération des syndicats nationaux (CSN), Fédérations des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Intellectuels pour la souveraineté (IPSO), Mouvement national des Québécoises et Québécois (MNQ), Organisations unies pour l’indépendance (OUI Québec), Réseau Cap sur l’indépendance (RCI), Société Saint-Jean-Baptiste (SSJB). Partis politiques : Bloc québécois, Groupe parlementaire québécois, Parti québécois, Québec solidaire.