Méga-dépotoir de déchets radioactifs de Chalk River

2018/05/14 | Par Martine Ouellet

L’auteure est chef du Bloc Québécois

Les 82 municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) s'opposent au projet de dépotoir nucléaire de Chalk River et ont adopté, le 26 avril dernier, une résolution unanime à ce sujet. La CMM appuie ainsi la Ville de Gatineau qui refuse ce projet, considérant qu’il constitue une grave menace pour la santé des Québécois. Avec raison ! En cas de fuite radioactive, c’est l’eau de la rivière des Outaouais, donc l’eau potable de millions de Québécois, qui serait irrémédiablement contaminée. Il s’agirait d’une catastrophe sans précédent.

Le 2 mai, j’ai présenté une motion demandant à l’Assemblée nationale d’appuyer la motion de la CMM. Le gouvernement libéral a refusé et sa ministre de l’Environnement a prétexté que des questions avaient été posées et qu’il fallait attendre les réponses. Pourtant, les réponses, on les a depuis longtemps. Ce n’est plus le temps de poser des questions, mais bien d’agir !
 

Des inquiétudes sérieuses et fondées

La proximité du site de la rivière des Outaouais met à risque l'eau potable des populations en aval, de Gatineau et même d’Ottawa, ainsi que de la région de Montréal et le fleuve Saint-Laurent. Le site se trouve sur une ligne de faille sismique majeure (un petit tremblement de terre survient tous les cinq jours en moyenne dans cette zone et peut atteindre une magnitude de 6 sur l’échelle de Richter).

Comment peut-on justifier le choix de ce site ? Les LCN forment une entreprise appartenant au consortium Canadian National Energy Alliance, composé de cinq firmes d'ingénierie, de technologie et de gestion de projet, dont SNC-Lavalin et Rolls-Royce. Il s’agit donc d’un consortium privé de sociétés multinationales à but lucratif. Toutes les options n’ont pas été considérées et LCN avance qu’un autre emplacement moins risqué pour la population et l’environnement serait trop dispendieux. La sécurité de la population doit primer sur le rendement économique. C’est une insulte à l’intelligence, rien de moins.

Il est irresponsable de risquer l’approvisionnement en eau potable de la population du bassin du Saint-Laurent pour stocker des déchets nucléaires. On a pu constater la réelle menace dans un reportage de l’émission Découverte, diffusée le 25 mars dernier. Les journalistes s’étaient rendus au Centre de stockage de la Manche, en France, là où une installation de gestion de déchets, fermée il y a 30 ans, mais similaire à celle qu’on propose de construire à Chalk River, a contaminé les sources d’eau potable des populations environnantes.

Selon plusieurs experts, il faut construire un site d’enfouissement en profondeur, dans des structures géologiques stables, pour les déchets radioactifs dangereux, dont certains ont une durée de vie de milliers d’années. Loin des cours d’eau, sinon la contamination de l’eau de la rivière sera inévitable. Cela créerait des risques pour la santé pendant des milliers d’années. Les élus doivent exiger que les normes de l’Agence internationale de l’énergie atomique soient appliquées avec rigueur pour classifier et traiter tous les déchets radioactifs. Le site de Chalk River ne répond manifestement pas à ces normes. L'idée d'entreposer des déchets radioactifs en zone humide à proximité de la rivière des Outaouais est inconcevable.

Le consortium doit refaire ses devoirs. Sa proposition d’établir une installation de gestion des déchets près de la surface sur le site de Chalk River est tout simplement irrecevable. La rivière des Outaouais est un bien national, qui alimente des millions de citoyens du Québec en eau potable. Il est aussi un endroit de villégiature important. Le choix d’un autre endroit pour disposer des déchets radioactifs semble s’imposer de lui-même.
 

À la rencontre des populations concernées

L’été dernier, je suis allée à la rencontre des citoyens et des organismes de la région concernée. J’ai rencontré le maire de Gatineau, le maire de Laval, l’ex-maire de Montréal, de même que plusieurs organismes environnementaux, regroupements de citoyens et représentants de nations autochtones.

Malgré les modifications proposées, le dépotoir de déchets nucléaires de Chalk River demeure un projet irresponsable, dangereux et qui risque de compromettre l’accès à l’eau potable de millions de Québécois. Nous avons toutes les réponses, toutes les études nécessaires pour en arriver à cette conclusion : ce projet doit être abandonné. Les risques de contamination radioactive de l’eau potable de millions de personnes sont réels et même prévisibles.