Trudeau soumis au G6+1

2018/06/08 | Par Pierre Jasmin

L’auteur est Artiste pour la Paix

Faut-il réagir au G6+1 en s’indignant ou en le ridiculisant? Le 9 juin, humoristes et militantes constitueront un Front Commun Comique pour ne pas laisser toute la place aux 7 Grands terroristes. « Venez boire avec nous des cocktails Molotov! Réservez votre place au SHOW GRATUIT de 19h30. Ce spectacle est rendu possible grâce à la collaboration du collectif Échec aux paradis fiscaux et à la coalition pour un Forum alternatif au G7 ».

Le G7, par essence, est anti-démocratique, car plutôt que de réfléchir en assemblée générale de tous les pays du monde à l’ONU, on forge un G20, ou pire un G7 de pays fortement industrialisés. Le président Trump, qui souhaite remplacer l’ALENA par deux ententes bilatérales avec le Canada et le Mexique isolés, illustre ce genre de démarche hégémonique qui veut raréfier et diviser l’opposition. Les coûts du présent sommet s’emballent à plus de 650 millions de $ et on ne calcule même pas le manque de productivité des 10 000 fonctionnaires du Québec mis en congé forcé (je refrène ici la mauvaise blague que tous attendraient). Allô la facture finale qu’on recevra au mieux un mois après le sommet! Et qui se souvient du sommet de l’an dernier à Taormina en Sicile et de ses résolutions finales? Ont-elles changé quoi que ce soit?

Officiellement, ce forum prétend vouloir concerter les responsables politiques de sept pays devant les défis auxquels font face les populations et la planète. Les cinq thèmes officiels choisis par l'événement sont:

- Investir dans la croissance économique qui profite à tout le monde,

- Se préparer aux emplois de l'avenir,

- Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes,

- Travailler ensemble à l'égard (sic) des changements climatiques, des océans et de l'énergie propre

- Et, enfin, construire un monde plus pacifique et plus sûr.

La tentation est grande de mettre des points d’exclamation de dérision à chacun de ces points, surtout compte tenu des positions isolationnistes et agressives de Donald Trump. Les féministes ne manqueront pas de relever que « l’autonomisation » des femmes laisserait entendre qu’elles ne peuvent par elles-mêmes assumer leur propre autonomie : quel infantilisme sexiste de la part du G7!

D’autre part, ce programme se veut complice d’orientations qui servent les intérêts économiques des grandes entreprises qui dominent le monde (les FMN[1]). Ces sept nations belliqueuses, comptant sur près d’un millier de milliards de $ en armements, alors que l’ONU manque de pouvoir et est sous-financée (moins de 5 milliards de $ annuels, comparés aux 70 de l’OTAN), chercheront un dénominateur commun recherché par un prédateur tel Donald Trump: le sommet risque donc d’être très avare de solutions positives et d’énoncer une liste de « méchants », avec l’Iran, la Chine, le Venezuela, le Nicaragua et la Russie aux premiers rangs, la Corée du Nord étant momentanément épargnée du fait du rendez-vous hypothétique de Singapour, le 12 juin.

Même le gouvernement canadien s’attend à ce que les tarifs douaniers récents sur l’acier et l’aluminium isolent le président Trump. S’il vient[2], restera-t-il plus que quelques heures? Ses dures positions protectionnistes sont qualifiées d'«insultantes» et d'«inacceptables» par l'hôte de l'événement, Justin Trudeau, qui fait des munitions d’arguments en consultant le président français Emmanuel Macron. Mais être à gauche de Trump ne garantit aucun vernis démocratique à ces deux technocrates adeptes du Libre-échange versus protectionnisme qui entament ainsi un faux-vrai débat, comme l’ont habilement dénoncé Ronald Cameron d’Attac-Québec et Pierre Beaudet[3].

Pour refléter les préoccupations des peuples et de la planète, des groupes représentatifs de la société civile tenteront le 9 à Québec de définir un projet de Forum alternatif, en parallèle à la rencontre du G7, en face de l’Assemblée nationale. Ils appellent les ONGs et la population à se mobiliser pour s’opposer aux politiques des dirigeants de sept des pays les plus riches de la planète, par essence anti-démocratiques, comme notre 2e paragraphe le dénonce …   

Vivement la Saint Jean Baptiste pour fêter et la campagne électorale québécoise, pour résoudre des problèmes locaux, en vue de solutions globales.

 

[1] Lire mon article précédent intitulé Trudeau soumis1- aux pétrolières

[2] L’article est rédigé le 7 juin au matin alors qu’un tweet présidentiel confirme sa venue

[3] http://cfag7.org  pour des infos sur la plateforme altermondialiste: pierre.beaudet@uqo.ca