Deux manifs pour la paix à Montréal, le 3 mars dernier

2019/03/08 | Par Pierre Jasmin

L’auteur est membre du Mouvement Québécois pour la Paix


1. La plus importante en appui aux Algériens dissidents

Plus de deux mille Montréalais ont manifesté en solidarité avec les étudiants de leur pays contre la mascarade d’un « président-zombie », qui veut briguer un 5e mandat consécutif, alors qu’il est hospitalisé à Genève. Les jeunes manifestants tenaient aussi à dénoncer l’utilisation quasi frauduleuse par les médias d’images montrant le président Abdelaziz Bouteflika il y a plus de cinq ans, alors qu’aujourd’hui grabataire, il ne peut ni lire, ni écrire ni même parler et que des fidèles, dont son frère, « interprètent » ses hochements de tête selon leurs propres désirs souvent divergents. Cette situation rocambolesque prévalait déjà après la 4e élection du 17 avril 2014, on comprend donc qu’il ne s’agit pas d’« âgisme » lorsqu’on souhaite le pays dirigé autrement.

On n’est plus dans l’horrible situation qui avait prévalu dans les années 90 quand islamistes et pouvoir militaire s’affrontaient au prix de dizaines de milliers de morts.  Les Artistes pour la Paix avaient alors monté au Spectrum une soirée de solidarité, mise en scène par Jean-Pierre Ronfard, époux de l’écrivaine algéroise Marie Cardinal. Notre spectacle (poèmes, musiques et chants) avait reçu une critique très élogieuse (et très courageuse!) de l’ambassadeur algérien au Canada, malgré nos dénonciations sévères tant des militaires (au pouvoir) que des islamistes aux tactiques terroristes qui allaient ensuite dégénérer sous formes d’armées islamistes.

Fatima Houda-Pépin a commenté avec sympathie dans le Journal de Montréal les scansions des manifestants : « Voleurs, vous avez pillé le pays », en rappelant que l’Algérie est l’un des pays les plus riches d’Afrique, mais que cette richesse en particulier pétrolière est accaparée par un clan d’apparatchiks qui en profitent aux dépens du peuple.


2. L’autre pour la paix entre l’Inde et le Pakistan

Coordonnatrice au Certificat d’études sur le Tiers-Monde à la Faculté du Collège Marianapolis (département des Liberal and Creative Arts & Social Science), Dolores Chew avait invité une trentaine de personnes, principalement pakistanaises dont Jooned Khan, à venir se rassembler autour de la sculpture du docteur Norman Bethune près de l’Université Concordia le 3 mars à 15 heures. La modeste manif a vu ses discours reproduits en solidarité mondiale avec d’autres rassemblements à Karachi, New Delhi, Washington, New York, Mumbai, Calcutta, Boston, San Francisco et autres lieux dans le monde.

J’ai tenu à citer le Secrétaire général des Conférences Pugwash sur la Science et les Affaires mondiales, notamment sur la nécessité de promouvoir un dialogue dans l’État Jammu et Cachemire, proche des frontières chinoise et pakistanaise, sis dans l’Himalaya avec à l’intérieur une frontière de contrôle empêchant les communications politiques, économiques et culturelles qui permettraient une véritable coopération.

M. Paolo Cotta-Ramusino a souligné combien les tensions militaires actuelles pourraient dégénérer en une guerre nucléaire dont les victimes s’étendraient à la planète entière. On se souviendra peut-être d’une soirée Pugwash organisée en mai par le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques de Montréal[1].

Dolores Chew ainsi que d’autres invités membres de l’organisme le réseau sud-asiatique pour la laïcité et la démocratie (South Asian Network for Secularism and Democracy) blâment la militarisation et le nationalisme religieux, de même que les fortunes gaspillées pour l’armement nucléaire, comme facteurs de tensions aggravant les inégalités de fortunes et de genre.

C’est ce que dénonçait le discours d’un des rares manifestants indiens, celui qui est maintenant établi à Montréal, le militant universitaire Kumar Sundaram, détenteur d’une maîtrise du Département d’études paix et ahimsa à l’Université Mahatma Gandhi, qui entreprend courageusement un doctorat en philosophie à l’Université Concordia.