Revue de presse

2019/05/17 | Par Pierre Dubuc

Après Téo Taxi, Air Transat ? Legault retourne l’ascenseur à PKP

Après les mains sur le volant de Téo Taxi, Pierre Karl Péladeau aimerait s’installer aux commandes d’Air Transat. Le gouvernement Legault a modifié les règles concernant l’industrie du taxi pour UBER et PKP. Il se dit prêt à accorder une aide financière, via Investissement Québec, pour garder le siège d’Air Transat au Québec. Soyons assurés que PKP va rappeler à Legault que les médias de Québecor ont été la grande accoucheuse de la CAQ. À grands coups de manchettes et de sondages Léger-Marketing, les journaux de PKP avaient permis, au printemps et à l’automne 2011, à la CAQ de « décoller ». D’ailleurs, l’édition du 15 novembre 2011 y allait d’un titre aéronautique : « La CAQ prend son envol ». Legault a raison : Le monde des affaires au Québec est un bien petit monde. Tout le monde se connaît.

+++

SNC-Lavalin : sauver des emplois ou les intérêts de la Banque Royale ?

Le gouvernement Trudeau a exercé des pressions sur la ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould au point de la pousser à la démission, entraînant avec elle la présidente du Conseil du trésor Jane Philpott, le principal conseiller et ami personnel de Justin, Gérald Butts, de même que le greffier du Conseil privé Michael Wernick. Avec, en prime, une descente dans les sondages, l’érosion brutale de son image au Canada anglais et le risque de perdre la prochaine élection !

Tout cela pour sauver des emplois, principalement au Québec ? Hum ! La famille Trudeau ne nous a pas habitués à autant de compassion. À moins que ce soit plutôt pour préserver les investissements d’une institution amie de la famille Trudeau dans SNC-Lavalin, soit la Banque Royale, dont la filiale RBC Gestion mondiale vient de porter à 14 % son contrôle des actions de SNC-Lavalin.

La Banque Royale a toujours été associée au Parti Libéral. Au milieu des années 1960, elle a œuvré dans l’ombre avec Power Corporation de la famille Desmarais pour organiser l’élection de Trudeau père à la tête du Parti Libéral. La famille libérale est aussi un bien petit monde, où tout le monde se connaît.

+++

L’ingérence russe

Pendant que toutes les organisations de renseignement du Canada nous mettent en garde contre une possible – voire inévitable – interférence de la Russie dans la prochaine campagne électorale, Andrew Sheer livrait un discours sur la politique étrangère d’un éventuel gouvernement conservateur. Au menu, ligne plus dure à l’égard de la Chine, mise au ban de la chinoise Huawei, transfert de l’ambassade canadienne à Jérusalem, participation au bouclier antimissile américain et une attitude plus musclée à l’égard de la Russie.

Bien entendu, honni soit qui y verrait une ingérence américaine.

+++

5 millions, ça change pas le monde… mais peut-être La Presse

Quelle surprise que de lire sur la page frontispice de La Presse + du 10 mai « Pourquoi l’image des profs doit être laïque » ! Et l’article est à la hauteur du titre. Francis Vailles cite les fameuses études – que réclamait Gérard Bouchard la veille devant la commission parlementaire – prouvant « le pouvoir d’influence énorme des enseignants sur les élèves ».

Quelle mouche avait donc piqué La Presse qui mène campagne, tambour battant, contre le projet de loi 21, tout comme elle l’avait fait avec la Charte des valeurs péquiste ? En 2013, le débalancement était tellement flagrant que la direction du journal avait cru nécessaire de réquisitionner une chroniqueuse de la section financière, Marie-Claude Lortie, pour défendre la position du gouvernement Marois. C’est à nouveau un chroniqueur de la section « affaires » qui monte au créneau, ce qui laisse croire qu’aucun des chroniqueurs et éditorialistes droits-de-l’hommistes du journal ne s’est porté volontaire.

Pourquoi, cette fois-ci, en première page ? Avec La Presse +, les éditeurs savent quelles chroniques sont lues, combien de temps un lecteur y consacre et, surtout, qu’ils ont maintenant l’objectif de récolter plus de 5 millions de dollars auprès de leur lectorat !

Mais le naturel allait rapidement revenir au galop. Dans l’édition suivante, l’éditorialiste François Cardinal nous instruisait sur ces « zones d’ombres du projet de loi » qui « devraient nous inquiéter ».

+++

Laïcité : De beaux débats à prévoir au sein des centrales syndicales

Lors de la commission parlementaire sur le projet de loi 21, le président de la CSN, Jacques Létourneau, a expliqué que sa centrale syndicale s’opposait aujourd’hui à l’interdiction des signes religieux, sauf si les signes religieux « nuisent à la prestation de travail pour des raisons d’identification, de communication et de santé-sécurité au travail ».

En 2013, à l’occasion du débat sur la Charte des valeurs du gouvernement Marois, la CSN suggérait d’interdire le port des signes religieux aux agents de l’État en position de coercition, mais également aux enseignants et aux éducateurs en service de garde.

Interrogé sur l’« évolution » de sa Centrale, Jacques Létourneau a attribué le changement de position en grande partie à l’arrivée d’une nouvelle génération au sein de ses structures décisionnelles.

La question qui se pose tout naturellement est de savoir si cette « nouvelle génération au sein des structures décisionnelles » est représentative des membres de la Centrale, lorsqu’on sait que, selon les sondages, près des deux tiers de la population et trois quarts des francophones appuie le projet de loi 21.

La CSQ, tout comme la FAE, s’est aussi prononcée contre l’interdiction des signes religieux chez les enseignantes. Quant à la FTQ, faute de pouvoir s’entendre dans ses rangs sur une position commune, elle a été contrainte d’annoncer, au début des audiences, le retrait de sa participation à la commission parlementaire.

À signaler que son ex-président, Henri Massé, a signé, dans le Journal de Montréal, un retentissant texte d’appui au projet de loi 21 dans lequel il affirmait que, « pour ma part, le projet de loi ne va pas assez loin. Il devrait s’appliquer au personnel de l’ensemble des institutions publiques ainsi qu’aux écoles privées subventionnées à 70 % par l’État ».

Même son de cloche du côté du Syndicat de la fonction publique du Québec. Le SFPQ s’est prononcé pour le projet de loi, regrettant même que « le gouvernement de la CAQ n’étende pas la neutralité de l’État à l’ensemble des travailleuses et des travailleurs du secteur public ».

L’ex-président de la CSQ et aujourd’hui blogueur au Journal de Montréal a également signé plusieurs chroniques en appui au projet de loi. À lire, sa dernière chronique où il affirme craindre qu’« en n’exerçant pas une certaine prudence sur un sujet aussi délicat et en ne s’assurant pas d’un large consensus dans leur rang, les syndicats prêtent flanc aux attaques de détracteurs sur leur véritable représentativité et cela pourrait devenir un sérieux handicap dans le cadre de négociations ou de représentations dans divers forums ».

+++

Saluons l’honnêteté intellectuelle de Josée Legault

« J’avoue que ses arguments m’ont ébranlée », a reconnu Josée Legault, dans sa chronique du 15 mai, au lendemain du témoignage du sociologue Guy Rocher devant la commission parlementaire. La chroniqueuse s’était affichée jusque là contre l’interdiction des signes religieux chez les enseignantes. Sûrement que bien d’autres ont aussi été ébranlés, mais combien l’avoueront ?

+++

Pronostic

Lors du référendum de 1980, les maoïstes d’En Lutte et du Parti communiste ouvrier (PCO) ont milité activement pour l’annulation. Leurs arguments massue : l’indépendance allait diviser la classe ouvrière canadienne et favoriser l’intégration du Québec et du Canada aux États-Unis. Le NON l’a remporté et, quelques années plus tard, le Canada signait son intégration à l’économie nord-américaine avec un traité de libre-échange avec les États-Unis. Quant à la classe ouvrière, sous l’effet du capitalisme, elle est toujours aussi objectivement divisée entre nationalités, hommes/femmes, corps de métier, secteur public/secteur privé. La véritable unité n’existe que lorsqu’il y a unité politique et celle-ci transcende les frontières.

Quelques années après le référendum, plusieurs anciens maoïstes se sont battus la coulpe sur la place publique en se demandant comment ils avaient pu trahir ainsi les intérêts du Québec en appelant à voter pour l’annulation, qui n’était qu’une forme déguisée du NON. On peut d’ores et déjà prédire que, dans quelques années, plusieurs des opposants au projet de loi 21 se demanderont quelle mouche les avait piqués pour qu’ils se mettent à défendre le port d’un symbole de l’intégrisme religieux.

+++

En marge du débat sur la laïcité

Il n’est pas inintéressant de lire la chronique hebdomadaire de Conrad Black dans le National Post. Le 3 mai dernier, il vilipendait le projet de loi 21 en rappelant le bon vieux temps du duplessisme, alors que l’Église contrôlait les systèmes d’éducation et de santé. Il résumait ainsi les conséquences du processus de laïcisation des années 1960 : « Les mêmes personnes enseignaient désormais la même chose dans les mêmes écoles et dispensaient les mêmes soins dans les mêmes hôpitaux pour les mêmes familles à un coût cinq à sept fois supérieurs pour le payeur de taxes dans un climat de travail trouble ».

C’est une façon de voir les choses. Habituellement, les nostalgiques du duplessisme aiment plutôt vanter le « dévouement » des bonnes sœurs et du clergé. Il fallait un homme d’affaires pour nous rappeler que, derrière le dévouement, se cachait l’exploitation et qu’ayant pris conscience du phénomène, les « mêmes personnes » aient décidé de « troubler » les relations de travail pour obtenir justice.

+++

Sol Zanetti : c.v. demandé

Une lectrice, Hélène Pisier, nous signale que, sur le site de l'Assemblée nationale, à l'entrée « Sol Zanetti », député de la circonscription Jean-Lesage pour Québec solidaire, la section « Biographie » demeure désespérément vide. Et que, depuis maintenant plus de sept (7) mois, on y lit en permanence les mots suivants : « Biographie à venir sous peu ». Sous peu...? Qu’est-ce à dire?