Référendum sur la réforme du mode de scrutin

2019/10/01 | Par Sonia Éthier

L’auteur est présidente de la Centrale des syndicats du Québec

En combinant la prochaine élection générale de 2022 avec la tenue d’un référendum sur la réforme du mode de scrutin, comme il le fait avec le projet de loi n° 39, le gouvernement de François Legault vient de nous servir la plus belle entourloupette qui soit : un détournement en règle de la prochaine élection.

Quand on considère le seul fait qu’un référendum monopolise le débat public, la table est mise pour que cette seule question détourne la prochaine élection générale québécoise de son objectif fondamental… celui de porter un jugement sur le bilan d’un gouvernement, tout en tenant compte des propositions contenues dans les plateformes des partis en lice. Décidément, Machiavel n’aurait pas trouvé mieux! 

En effet, on forcera les électrices et électeurs à débattre d’une question aussi fondamentale que celle de la réforme du mode de scrutin, un sujet déjà complexe, ainsi qu’à se prononcer par référendum, en même temps qu’on leur demandera de faire un choix éclairé afin d’élire le prochain gouvernement. Déjà, une campagne électorale génère passablement de bruits de fond… Imaginez la cacophonie ambiante qui règnera avec les deux sujets qui s’entremêleront dans les débats et l’actualité!

 

Des priorités à géométrie variable

Ce gouvernement se comporte étrangement lorsque vient le temps de remplir ses promesses électorales. D’un côté, il fonce tête baissée avec l’implantation des classes de maternelle 4 ans, par pure idéologie, sans se soucier des répercussions. Un projet dont personne ne voulait par ailleurs. Il s’apprête à faire de même avec la transformation des commissions scolaires. Maintenant, que fait-il avec la réforme du mode de scrutin, une autre de ses promesses phares? Il la pousse sous le tapis. Il s’agit pourtant d’une réforme vivement souhaitée, voulue et réclamée depuis plus de 25 ans par la population, y compris par plusieurs groupes et organisations, dont la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

 

Une obsession nuisible

Pourquoi François Legault agit-il de la sorte avec la réforme du mode de scrutin? Par pur électoralisme. Par souci, espère-t-il, de conserver sa majorité comme l’on fait avant lui les autres partis politiques. Il est clair que la grogne des députées et députés caquistes, fraichement élus en 2018 dans des circonscriptions qui auraient disparu avec la réforme du mode de scrutin, l’a emporté. Au fond, l’obsession d’un second mandat a été sa seule motivation.

Bien sûr, il s’en trouvera pour dire qu’il s’agit d’une bonne idée de combiner les deux. On va même nous servir l’argument des économies d’échelles. Mais, méfiez-vous : la combinaison d’un référendum avec le prochain scrutin général est la pire chose que l’on pouvait souhaiter pour la démocratie au Québec. La tenue d’un référendum en 2020 ou 2021, donc à temps pour le scrutin général de 2022, permettrait de régler la question.