Le chemin de Damas de Justin Trudeau…

2019/10/24 | Par André Bélisle

Tout au long de la campagne électorale, on en a entendu des vertes et des pas mûres sur les questions environnementales de la part des représentants politiques rouges et bleu foncé du Rest of Canada, le ROC.

Le sujet de tous les débats, discussions et tribunes fût la crise climatique sauf, bien entendu, chez les conservateurs. Ainsi, on a eu droit à la profession de foi de Justin Trudeau, qui trouve cette question urgente tellement importante que, le lendemain de l’achat du vieux pipeline TransMountain pour la modique somme de 4,5 milliards de dollars, il a engagé Steven Guilbeault, un écolo modèle, pour nous convaincre de sa nécessité…

Malgré tout, Justin Trudeau maintient qu’il faudra investir un autre 10 milliards de dollars pour en assurer l’expansion, car l’Alberta veut en doubler la capacité. Il y a trop de pétrole qui niaise à Fort McMurray.

Le soir même de son élection, Steven Guilbeault, en homme pragmatique, affirmait en toute franchise qu’il ne voyait pas comment on pourrait arrêter le projet TransMountain puisqu’il est autorisé.

L’histoire des vingt dernières années nous rappelle que bien des projets de cette envergure ont été stoppés. On se souviendra du projet de centrale thermique au gaz Le Suroît, du port méthanier Rabaska et de la saga des gaz de schiste au Québec. Trois mégas projets que la mobilisation citoyenne a arrêtés, sauvant ainsi, par le fait même, notre environnement et des milliards de dollars.

Il y a aussi le projet de centrale hydroélectrique Old Man en Alberta bloqué, lors de sa construction, par une décision de la Cour suprême du Canada, qui donnait raison à l’opposition acharnée d’agriculteurs, qui craignaient pour leurs pâturages, et à des écologistes comme Martha Korstush, une vétérinaire propriétaire d’un ranch et présidente des Amis de la Rivière Old Man, ainsi qu’à des représentants de la Première Nation Cri, qui auraient perdu une bonne partie de leur territoire, sans leur consentement et sans le versement d’aucune compensation.

Alors, voilà Justin Trudeau, la main sur le cœur, nous revient avec ses promesses climatiques. On voudrait le croire, mais son conseiller stratégique sur la question de la crise climatique nous dit candidement que c’est peine perdue.

La voie devant Justin Trudeau va être très raboteuse comme celle de Saint-Paul sur le chemin de Damas. Il risque de tomber en bas de son cheval, comme dans cette vieille histoire.

 

Le corridor de la mort de Jason Kenney et Andrew Scheer

Pour ajouter du piquant aux projets fumants du ROC, le premier ministre de l’Alberta Jason Kenney, qui cherche par tous les moyens à sortir son pétrole, s’est allié à son bon ami Andrew Scheer, chef du Parti Conservateur du Canada et maintenant Chef de l’Opposition à Ottawa, pour proposer un projet de nation building, une espèce d’Énergie Est 2.0.

Comme le projet Énergie Est, qui devait traverser le Québec et qu’on présentait comme incontournable voire inattaquable, est mort en frappant le mur du Québec, ces deux fins stratèges nous reviennent avec un nouveau projet tricoté en laine du pays.

Là, le sujet devient vraiment passionnant. Puisque la route du sud-ouest est bloquée, ils ont pensé que la route du nord-ouest pourrait bien faire l’affaire. Comme les riverains et riveraines de la rivière des Outaouais, du Saint-Laurent et des 600 autres rivières qu’aurait traversé le projet Énergie Est sont montés au front et ont fait fuir l’envahisseur, ils ont imaginé faire traverser leur pétrole de bord en bord du Québec en passant par l’Abitibi, la Haute-Mauricie et le Saguenay–Lac Saint-Jean.

Ils proposent que leur Corridor énergétique transcanadien emprunte, comme par hasard, le tracé des promoteurs du projet Énergie-Saguenay, qui aboutit au fjord du Saguenay avant de rejoindre le golfe Saint-Laurent.

Dans un esprit de solidarité toute canadienne, ils consentent même à partager ce corridor avec Hydro-Québec.

Mais, là aussi, le chemin est raboteux, voire même carrément hasardeux. Encore une fois, ils font face à un sérieux problème d’acceptabilité sociale. Jumelé au gazoduc Énergie-Saguenay, ce damné pipeline – charriant pétrole et gaz de schiste ainsi que le pétrole bitumineux dilué –  ne serait rien de moins qu’un corridor de la mort pour le climat, pour les bélugas du Saguenay et du Saint-Laurent.

Face à la crise climatique qui s’accélère et s’intensifie, et au risque de faire disparaître les bélugas, ces projets ne sont rien de moins que des attentats corporatistes contre notre milieu de vie et notre climat.

André Bélisle est président de l’AQLPA

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