Catherine Dorion : Qui suis-je pour avoir un avis ? Je vais le donner pareil

2019/11/15 | Par Jean-François Thibaud

L’auteur est chansonnier

Catherine Dorion, députée de Québec Solidaire, se dit artiste. Fort bien. À sa décharge, je ne l’ai pas vue s'auto proclamer poète. Ce sont les journalistes de La Presse et du Devoir qui la nomment la « députée-poète ».

Pour faire avancer ses différentes causes, comme le « droit » (quasi absolu) des femmes de s’habiller comme elles veulent, partout et en toutes circonstances, la députée utilise des techniques de provocation, en forme de miroir inversé de Donald Trump. Je le dis, sans jugement de valeur sur le fond de ses positions. Car qui suis-je pour avoir un avis ? Je vais le donner pareil.

Personnellement, je suis favorable à un minimum de décorum dans les fonctions à caractère prestigieux. Si Catherine Dorion, soutenue par Québec Solidaire, veut me convaincre que le port du pyjama à l'Assemblée nationale va contribuer à améliorer le sort des pauvres d'Hochelaga-Maisonneuve, je suis ouvert à la discussion.

Si elle pense que les coups d'éclat du genre sont une stratégie efficace pour faire changer les mentalités, même si j'en doute, je suis ouvert à la discussion.

Par contre, lorsqu'on joue les vierges offensées, une fois qu'une provocation est effectuée, là, je décroche. Françoise David, l'ancienne co-porte-parole du parti, affirme qu’on grimpe dans les rideaux parce que la députée s'est « assise sur un bureau ». C’est de la pure hypocrisie !

L’empereur est nu. Tout le monde a bien vu que la députée utilisait les clichés pornos avec sa jupe à ras le pompon et ses talons            « vertigineux ».

Peut-être même a-t-elle raison de brasser la cage. La charge subversive est indéniable. Que la charge symbolique écorche frontalement, au passage, une majorité de ces collègues féminines qui se conforment au décorum, c'est tout de même un fait, attesté par leur réaction de colère. Comme d’habitude, c’est toute une stratégie d’« inclusion » pour le combat des femmes. Et ensuite, on parle d’intimidation ? Est-ce que QS peut assumer s’il vous plaît ?

Tout ceci m'apparaît, je le répète, comme le miroir inversé du « populisme » de Trump. Une fois que la provocation est passée, on se rétracte ou on minimise. Le choix des armes de l’ennemi pour l’attaquer, je crois, est une des choses qui différencie fondamentalement le féminisme de première et de deuxième génération, avec le féminisme intersectionnel, outre la victimisation à outrance, et le rejet de l’universalité des principes.

Mais comment ne pas avoir l’impression de se trouver devant une immense classe de Secondaire 2 ? Pierre Falardeau, que Catherine Dorion admire, disait que quiconque fait un seul pas en avant est accusé d’aller trop loin par ceux qui ne vont nulle part.

Mais, le cas de madame Dorion, j’attends de voir en quoi son pas en avant n’est pas que du surplace. Un surplace toxique qui, à mon humble avis, donne des munitions à l’extrême-droite, qui, elle, avance à grands pas dans la grande régression.

Dans ses déclarations, à son dernier passage à tout le monde en parle, Catherine Dorion dégage l’assurance inébranlable que son parti prendra le pouvoir, porté par l’essentialisme et la justesse quasi ontologique de la multiplicité de tous ses combats.

Hugo Latulippe, un aspirant « député-artiste » de la même famille idéologique que Catherine Dorion et qui s’est présenté pour le NPD au Québec cet automne, annonçait une nouvelle vague en faveur de son option. Il a récolté 7% des voix. Après son élection, pour expliquer sa défaite, il a clamé que les gens n’étaient pas assez « éduqués ». J’attends toujours la leçon qui va me convaincre.