La religion tue la liberté

2020/01/06 | Par Kevin Henley

Je viens de lire le récit, Une minute quarante-neuf secondes, publié en août dernier chez Actes Sud par Riss, le dessinateur du journal satirique Charlie Hebdo qui a survécu, blessé, à l’attaque meurtrière du 7 janvier 2015 à Paris. Pendant laquelle douze de ses compagnons furent massacrés par deux terroristes musulmans, armés jusqu’aux dents, ostensiblement pour avoir osé republier des caricatures danoises du prophète Mohamed, en 2006, ainsi que d’avoir aussi publié leurs propres caricatures similaires par la suite. Cinq autres victimes furent aussi tuées par d’autres terroristes musulmans, le 8 et le 9 janvier de cette même année, dans la même série d’attentats en France, notamment contre un marché juif.

C’est un livre très bien écrit, même si d’une intensité presque intolérable par moments, non seulement sur l’attentat anti-Charlie et ses séquelles en tant que tel, mais aussi sur les efforts colossaux de Riss, ainsi que de ceux de ses collaborateurs qui étaient vraiment dédiés aux principes du journalisme, de remettre sur les rails cette revue satirique après l’élimination épouvantable de la plupart de ses dessinateurs. Une bonne partie du livre est aussi consacrée à une dénonciation très méritée des interventions délibérément démoralisantes de certains politiciens et intellectuels français, qui n’ont pas vraiment souhaité la réussite du nouveau “Charlie Hebdo”. Dont quelques-uns qui frôlaient la collaboration avec les tueurs islamistes eux-mêmes. Toute la France a été divisée en 2015 entre les “Je suis Charlie” et les “Je ne suis pas Charlie”, les sous-groupes de chaque liste se trouvant dans le premier ensemble, ou le deuxième, souvent pour des raisons très contradictoires.

 

Je suis Charlie et Je ne suis pas Charlie

Dans son livre (pages 181-190), Riss a divisé les “Je suis Charlie” en cinq sous-groupes, soit les libertaires favorisant les points de vue les plus divers possibles, les voltairiens philosophiquement favorables à la liberté d’expression en tant que telle, les laÏcs pour qui aucune religion ne devrait échapper à la critique, les racistes de l’extrême-droite française détestant tous les musulmans en tant que musulmans, et les penseurs “jésuites” distinguant entre l’islam, en tant que religion, et l’islamisme, en tant qu’idéologie politique.

Ensuite, il a aussi divisé les “Je ne suis pas Charlie” en cinq autres sous-groupes, soit les imams confondant n’importe quelle religion avec une “race”, les musulmans réactionnaires mettant le droit de religion au-dessus de tous les autres droits, les “trotsko-staliniens” de l’extrême-gauche opposés à n’importe quelle critique d’une religion jugée très populaire auprès de la masse musulmane, les haineux détestant le style d’humour de la revue (avec ou sans Mohamed), et les partisans de la “laïcité apaisée” dirigeant leur hargne contre la prétendue ”islamophobie” de tous les non-musulmans. (Voir aussi la recension du livre de Riss publié par Julien Beauregard, “Nous étions Charlie”, dans l’aut’journal, le 29 novembre 2019.)

Personnellement, je m’identifie davantage avec les laïcs de la première liste, puisque je trouve complètement ridicule la prétention selon laquelle une croyance religieuse aurait beaucoup plus de valeur que n’importe quelle autre croyance idéologique. Tout comme Riss (pages 100-101), je ne crois pas du tout à la vie après la mort, ni à aucune autre forme de métaphysique religieuse. Surtout pas à l’arrogance absurde des religions faussement “universelles”, pour qui les femmes n’existent que pour combler les besoins sexuels (au ciel) de martyres exclusivement masculins, ou pour qui les femmes, à cause de leur sexe, n’ont pas le droit à la réincarnation, et ainsi de suite. La misogynie éhontée de l’ensemble de toutes les religions les place définitivement parmi toutes les autres idéologies politiques, le plus souvent du côté de l’extrême-droite populiste. Les fondamentalistes, ou vrai-croyants, de toutes ces religions sont en fait la source principale de l’appui à tous les mouvements néo-fascistes actuels (qu’ils soient au pouvoir ou non), provenant de plusieurs variétés différentes de chrétiens, de musulmans, de juifs, de bouddhistes, de hindoues, de sikhs, de confucéens, de shintoïstes, et même d’animistes, dans tous les pays et dans toutes les régions du monde entier.

Je dois ajouter, toutefois, que je trouve très étonnant le fait que des “trotsko-staliniens” en France pourraient avoir adopté un point de vue si réactionnaire par rapport à la religion que celui mentionné par Riss. Il me semble que tous les partis ou les mouvements communistes du vingtième siècle, que j’ai moi-même côtoyé brièvement il y a cinquante ans, détestaient toutes les religions mythologiques de façon égale, en tant que “opium du peuple”, utilisé par le capitalisme pour éloigner “les masses populaires” du mouvement communiste. À l’époque de la guerre froide (1945-1991), il me semble qu’aucune des diverses tendances marxistes-léninistes, provenant de l’influence de Trotsky ou de l’influence de Staline, n’aurait abandonné si cavalièrement un individu ou un peuple au contrôle néfaste d’une quelconque religion métaphysique. Depuis plusieurs décennies maintenant, je me suis libéré quand même de l’influence marxiste-léniniste d’autrefois, ayant découvert sur le tard que l’ensemble des pays se réclamant du communisme ne cachait en fait que des régimes totalitaires du capitalisme d’état, en concurrence avec le capitalisme privé du libéralisme faussement démocratique. En réalité, toutes les idéologies politiques du monde agissent comme des religions, et toutes les religions métaphysiques agissent comme des idéologies politiques. On n’est pas plus avancé avec l’un ou l’autre de ces deux sous-ensembles.

Malheureusement, même le socialisme démocratique, théoriquement opposé au communisme totalitaire, doit aussi être rejeté de nos jours, tous les partis socialistes ou sociaux-démocrates du monde entier ayant accepté depuis plusieurs décennies de jouer complètement le jeu de la démocratie libérale et d’avoir par le fait même totalement abandonné le socialisme. En France, par exemple, le gouvernement socialiste de François Mitterrand, après avoir subi un assaut brutal pendant deux ans (1981-1983) contre son programme économique, de la part du capitalisme international ainsi que du patronat français, a laissé tomber le socialisme de façon définitive, adoptant, en reddition totale, le capitalisme néolibéral de l’empire anglo-américain, devenu dès cette époque l’idéologie de choix un peu partout au monde “libre”.

 

Les différentes facettes du néolibéralisme

Ainsi, à part les religions meurtrières, alliées à l’extrême-droite populiste, l’autre idéologie dominante du temps présent se trouve être ce néolibéralisme, très similaire au laissez-faire du dix-neuvième siècle, associé comme son prédécesseur, davantage au capitalisme privé qu’à l’état. Et liberticide aussi, en dépit de son nom, parce que ne prônant la liberté que pour des gens riches et puissants. De nos jours, on perçoit que la quasi-totalité des pays du monde sont gouvernés par des régimes sous l’influence conjointe du néo-fascisme et du néolibéralisme, des pays encore totalitaires comme la République populaire de Chine étant davantage du côté du capitalisme d’état, tout en adoptant une bonne dose du néolibéralisme aussi, et des pays pas vraiment libres du tout, comme les États-Unis d’Amérique, se penchant davantage du côté du capitalisme privé, tout en adoptant une bonne dose de populisme d’extrême-droite (néo-fasciste) aussi.

Aux États-Unis aussi bien qu’en Grande-Bretagne, ainsi que dans plusieurs autres pays, des dizaines de millions d’ouvriers ont perdu la plupart de leurs emplois industriels dans la désindustrialisation délibérée des années 1980, orchestrée par des champions du néolibéralisme tels que Ronald Reagan et Margaret Thatcher. Plus récemment, une bonne partie de ces mêmes ouvriers, malheureusement aliénés et manipulés par le capitalisme à la fois libéral et conservateur, ont contribué réellement à la montée constante du populisme d’extrême-droite (le néo-fascisme), en votant souvent, encore tout dernièrement, en faveur des mêmes partis politiques (tels que les Républicains aux États-Unis et les Conservateurs au Royaume-Uni) qui les avaient abandonnés, de façon si atroce, il y a 30-40 ans. Bien sûr, la France a aussi été très affectée par cette même désindustrialisation, mais la classe ouvrière française ne donne pas l’impression de collaborer autant avec le néolibéralisme qu’ailleurs en Occident. Le populisme d’extrême-droite, à la fois néo-fasciste et néolibéral, ne donne pas l’impression d’attirer un si grand nombre d’ouvriers français, même parmi les gilets jaunes.

Dans son livre, il me semble que Riss n’utilise pas le mot “néolibéralisme” en tant que tel, mais je pense qu’il parle quand même de l’influence néfaste de cette idéologie-là quand il dénonce, par exemple, “l’égocentrisme infantile érigé en valeur moderne d’épanouissement” (p. 11). Une idéologie hyper-individualiste, le néolibéralisme est aussi très souvent complété par la “pleine conscience” de la psychologie populaire, mettant l’accent exclusif sur l’environnement immédiat, presque corporel, de chaque individu. La maximisation du profit à court terme, de l’économisme libéral, fait fi de toutes les “externalités” non strictement économiques, telles que l’égalité sociale et l’environnement naturel de toute la planète. Tout comme la pleine conscience essaie de couper chaque individu isolé de toutes les “externalités” de la vie moderne, y compris du devoir de tout bon citoyen de se soucier quand même un peu de la santé collective de la grande société environnante (le “bien commun”).

 

L’appât du gain

Riss revient aussi à ce thème de dévouement social dans sa dénonciation de certains faux collaborateurs de “Charlie Hebdo”, plus intéressés par les millions de dollars en dons reçus du grand public après l’attentat que par la remise sur pied du journal satirique, voulant continuer à dénoncer publiquement et férocement l’attitude criminelle des grandes corporations néolibérales et de leurs alliés politiques dirigeant des gouvernements corrompus, envers la société humaine qui les entoure. Il parle ainsi de l’appât du gain parmi certains autres journalistes crapuleux (et leurs avocats) ailleurs dans son texte; “Et moi, je n’ai droit à rien?” (page 151). Pour ma part, je trouve très intéressant le fait de souligner la similarité structurelle entre, d’une part, le fondamentalisme religieux, qui n’accepte pas la séparation entre la religion et la politique (Riss), et d’autre part, le néolibéralisme, qui n’accepte pas la séparation entre les affaires et la politique. (Voir l’article de Pierre-Luc Desjardins, “Contestation sociale : De la France au Québec”, dans Le Devoir du 5 décembre 2019.)

 

Le fondamentalisme religieux

En ce qui concerne l’islamophobie en tant qu’idéologie, je pense quand même (en bon “jésuite” que je suis) qu’on doit distinguer entre l’islam “modéré” des croyants musulmans qui acceptent, tout comme certains croyants similaires de toutes les autres religions, de garder leur foi pour eux-mêmes, et les musulmans “radicaux”, fondamentalistes et prosélytes, qui essaient, souvent avec énormément de violence, de dominer le monde autour d’eux de manière impérialiste. Bien sûr, on peut argumenter que ces “militants militaristes” se trouvent en “guerre mondiale” contre tous les autres empires rivaux (les États-Unis, l’Union européenne, Israël, la Russie, la Chine, etc.). Il reste que ces mêmes fous furieux, poussés dans le dos par des empires régionaux comme l’Arabie saoudite, la Turquie et l’Iran, ont souvent été très facilement manipulés par plusieurs grandes puissances occidentales (et par Israël), utilisant leur militantisme meurtrier “à bon escient” pour débarrasser le monde musulman (y compris dans la diaspora) de certains autres courants de pensée, plutôt nationalistes et communistes. Même les pays dit communistes ont manipulé ces mêmes terroristes contre des nationaux-communistes qui ne voulaient pas être contrôlés par ces empires qu’on persiste encore de nos jours d’appeler “communistes”.

Même si tous les fondamentalistes musulmans, comme les fondamentalistes de toutes les autres religions, n’appuient pas toujours (ou n’appuient pas ouvertement) les éléments les plus meurtriers de leur religion, il reste que ces mêmes éléments terroristes ne pourraient jamais fonctionner autant qu’ils le font à l’heure actuelle, sans la montée du fondamentalisme religieux, source principale de l’appui populaire pour tous les mouvements d’extrême-droite populiste. L’islam est aussi la religion dans laquelle le fondamentalisme, basé comme tous les autres fondamentalismes sur une interprétation littérale des textes sacrés, est devenu le plus militarisé de nos jours. Plusieurs pays importants du monde musulman, pas seulement au Moyen-Orient, ayant été bouleversés encore récemment par des conflits militaires très meurtriers, deviennent par le fait même une sorte d’aimant pour ces terroristes. Le terrorisme islamiste fait la plupart de ses victimes parmi les musulmans “modérés”, mais tue aussi très régulièrement beaucoup de gens non-musulmans (des “mécréants”) un peu partout en Afrique et en Asie, mais aussi en Europe et en Amérique du Nord.

 

Toutes sortes de guerres

Vers la fin de son livre, Riss parle aussi un peu de ses voyages après l’attentat, dans plusieurs pays de l’Europe, pour mettre l’accent sur le fait que chacun de ces pays est devenu, pas seulement autrefois mais aussi récemment, une sorte de fosse commune et l’Europe toute entière “un cimetière de l’Atlantique à l’Oural” (page 289). Pas uniquement, bien sûr, grâce au terrorisme religieux mais aussi de toutes sortes de guerres, civiques autant qu’internationales, liées aux chocs extrêmes entre toutes sortes d’idéologies opposées. Je pense qu’on peut facilement appliquer cette même observation à l’ensemble des autres continents de ce monde. Dans son livre, Riss a aussi parlé de sa rencontre pendant un reportage au Vietnam avec le colonel Bang, du Viêt-minh (pages 295-298), dans un pays asiatique aussi affecté par la guerre idéologique au moins autant que la plupart des pays européens.

De ce côté-ci de l’Atlantique, le gouvernement actuel du Québec, essayant en dépit de son statut provincial d’imiter un peu le républicanisme de plusieurs pays européens (dont la France), a adopté la loi 21, sur la laïcité de l’État, qui interdit aux fonctionnaires “en position d’autorité” de porter des signes religieux pendant leurs heures de travail. Une loi qui a été dénoncée par tous les fédéralistes canadiens comme si c’était en train d’éliminer complètement l’influence de la religion sur l’État du Québec. En réalité, la séparation entre la religion et l’état n’existe pas ici, ou très peu, toutes les organisations religieuses, et leurs édifices, étant toujours exemptés de l’impôt (fédéral et provincial), l’État provincial subventionnant encore la quasi-totalité des écoles confessionnelles, et ainsi de suite. Les fédéralistes canadiens, toutefois, fidèles à la constitution canadienne de 1982 et à la charte des droits adossée à cette constitution, appuient une forme extrême de multiculturalisme censée protéger intégralement tous les courants religieux, même les plus fondamentalistes. Ils voient la loi 21 comme étant issue directement du mouvement indépendantiste du Québec, même si ce mouvement est sérieusement affaibli à l’heure actuelle, et par conséquent ces mêmes fédéralistes veulent éliminer cette loi québécoise, laïque, en tant que symbole futur de la reddition totale et complète du “séparatisme” québécois à l’empire canadien.

 

Féminisme et misogynie

La plupart des fédéralistes appuient aussi les quelques dizaines de femmes musulmanes portant le hijab fondamentaliste, qui veulent trouver un emploi dans le secteur public au Québec, sans être obligées d’enlever leur foulard au travail. Les nationalistes canadiens de l’anti-laïcité fédérale ont même poussé l’audace jusqu’à traiter ces femmes intégristes, pratiquant la servitude volontaire, en “féministes” luttant contre un État “colonialiste”! Selon leur idéologie d’individualisme ultralibéral, tout le monde doit soutenir ces pauvres “victimes” non seulement en fonction de l’article 27 de la charte canadienne des droits, favorisant le multiculturalisme, mais aussi en fonction de l’article 28, sur l’égalité entre les hommes et les femmes. En d’autres mots, ils accusent le gouvernement du Québec d’être colonialiste et anti-féministe, tandis qu’en réalité c’est l’article 27 de la charte canadienne qui est en contraction flagrante avec l’article 28 de la même charte! Ce sont en fait les fédéralistes canadiens qui sont les véritables misogynes dans cette histoire, tout en étant les véritables colonialistes.

Fariha Naqvi-Mohamed, une chroniqueuse musulmane portant le hijab, a publié un article (“A time to reflect on all violence against women”) dans le quotidien anglophone de Montréal, The Gazette, le 6 décembre dernier, commémorant le trentième anniversaire du massacre anti-féministe de quatorze étudiantes, commis à l’École polytechnique de Montréal par un tueur du nom de Marc Lépine. Elle a oublié, toutefois, de mentionner dans son article que ce même Lépine (qui a pris le nom de famille de sa mère) est aussi le fils d’un homme d’affaires, Rachid Gharbi, un musulman algérien dénoncé par Madame Lépine pour sa violence misogyne. Même si Gharbi semble avoir été un musulman non-pratiquant, on doit quand même avoir le droit de critiquer la misogynie inhérente à toute idéologie métaphysique sans être accusé faussement d’”amalgame islamophobe”, uniquement parce qu’on dénonce l’idéologie religieuse en tant que telle, et pas uniquement son aile fondamentaliste (Riss, page 189). En tant que “bon jésuite”, j’aimerais même poser la question si Naqvi-Mohamed n’est pas en train de se mettre dans une construction idéologique structurellement similaire à celle du premier ministre du Canada, Justin Trudeau. Qui, pendant la campagne électorale récente, a promis de se battre aussi fortement pour aider l’industrie pétrochimique du Canada que pour lutter contre le changement climatique dans le monde entier. En d’autres mots, n’est-il pas difficile, quand même, pour des gens comme Trudeau et Naqvi-Mohamed, de soutenir deux idées si totalement contradictoires en même temps?

Il me semble aussi qu’en dépit de sa prétendue liberté d’expression individualiste, Naqvi-Mohamed souffre comme toutes les autres musulmanes portant le hijab de la servitude volontaire. D’une manière très similaire aux soeurs voilées de l’Église catholique d’autrefois au Québec, comme celles dans le film récent (2019) de la cinéaste Léa Pool, concernant une congrégation québécoise qui laissaient tomber leurs voiles pendant la Révolution tranquille, laïque, des années 1960, se libérant enfin d’au moins une première partie de leurs chaînes catholiques. Dans le cas des femmes “ordinaires”, mariées et mères de famille, je dirais comme Riss (page 260), que la famille agit aussi à la manière d’une communauté religieuse, même de nos jours, c’est-à-dire comme une cellule de prison pour la femme musulmane pratiquante, et pour les femmes catholiques pratiquantes aussi. Ainsi que pour toutes les autres femmes pratiquantes au sein de toutes les autres religions métaphysiques. À mon avis, c’est complètement absurde de comparer les porteuses de hijab, anti-laïques, aux victimes de la tuerie anti-féministe de l’École polytechnique, comme l’essaient de faire Mélissa Blais et Diane Lamoureux dans leur article, publié dans le quotidien Le Devoir du 6 décembre 2019, “Un devoir de mémoire, mais aussi d’actions”.

En réalité, le désir de liberté est toujours présent dans les esprits des êtres humains vivants, mais il est souvent occulté par le blasphème, soit le mot choisi par les pratiquants de religion pour nier l’existence même de la liberté d’expression. C’est la servitude volontaire des individus manipulés et aliénés par les religions métaphysiques, et par les autres idéologies liberticides, qui est à l’origine de cette “superstition honteuse” (le blasphème), en tant que tueur de liberté bien implantée malheureusement dans beaucoup d’esprits (Riss, pages 215-216). Quand les gens tombent sous le contrôle du totalitarisme dans leurs têtes, c’est en ce moment-là que les religions et les autres idéologies meurtrières gagnent le pari. Que ce soit le totalitarisme faussement communiste, le totalitarisme faussement démocratique (le laissez-faire et le néolibéralisme) ou le totalitarisme ultra-ethnique et ultra-religieux de l’extrême-droite.

Ainsi, la perversion polymorphe de toutes les religions métaphysiques, aussi bien que de toutes les autres idéologies antédiluviennes (du sous-ensemble séculier), tuent la liberté constamment, surtout la plus précieuse des formes différentes de la liberté, soit la liberté d’expression. En ce faisant, elles font partie d’une grande “conspiration ouverte” (“open conspiracy”) sur la scène mondiale, un système sadomasochiste de communication perverse entre les agresseurs sadiques de toutes les variétés existantes de totalitarisme, et les esclaves volontaires, masochistes. Ceux qui continuent de lutter quand même pour la liberté véritable, sans concession, sont souvent dénoncés par les réactionnaires de tout acabit comme étant “l’ennemi du peuple”, tandis que ce sont ces réactionnaires eux-mêmes qui sont en réalité l’ennemi de tous les peuples du monde entier.