L'indépendance sans référendum, pourquoi pas ?

2020/01/07 | Par Jean Daoust

L’auteur est politicologue retraité, membre du Parti québécois et du Bloc québécois.

Le PQ a  clarifier son option vers l'indépendance. Il doit maintenant la clarifier sur la manière, la démarche.... et écarter les stratégies qui ont échoué: convergence, référendum, conditions gagnantes, bon gouvernement, etc. Pour le PQ, ce n'est pas un retour aux sources car le PQ est né et a grandi dans l'ambiguïté : souveraineté-association, partenariat, bon gouvernement, conditions gagnantes, etc. 

À QS, on se veut plus clair. Est-ce le cas ? QS propose une rupture dès son élection...et s'il n'obtient pas 50% des votes ? C'est à préciser. Aucun parti n'a obtenu 50% des votes depuis 1973 au Québec ! Ni Bourassa, ni Lévesque, ni Charest... Mais QS promet deux consultations supplémentaires, une constituante et un référendum ! Malgré un radicalisme apparent, on pourrait penser que ce sont des étapes qui rendront l'indépendance très hasardeuse sinon improbable. 

Au PQ, le débat revient : référendum dans un 1er ou dans un 2e mandat ? Le PQ doit écarter cette impasse. Comment ? Il s'agit de s'engager vers l'indépendance en affirmant qu'il n'y aura pas de référendum tout en misant sur une majorité absolue de l'électorat. Comment ?

Voici l'hypothèse audacieuse que les leaders indépendantistes pourraient évaluer.

Le PQ pourrait promettre d'engager le processus menant à l'indépendance dès qu'une majorité absolue (50% + 1) des électeurs se sera exprimée en votant pour un parti prônant l'indépendance... laissant QS défendre sa démarche plus complexe.

Un gouvernement du PQ, même minoritaire ou n'ayant pas à lui seul 50% des votes, pourrait présenter au parlement une résolution demandant au gouvernement canadien d'engager des discussions menant à l'indépendance si une majorité absolue de l'électorat a voté pour un part prônant l'indépendance. C'est d'une logique implacable. 

On dira que la moitié des électeurs de QS sont fédéralistes; c'est le problème de QS, pas celui du PQ. 

En 2018, 33% des électeurs se sont prononcés officiellement pour l'indépendance (17% PQ + 16% QS) avec une très faible le participation (66%). Il aurait manqué 17% pour atteindre 50%. L'enjeu est là ! La participation a déjà été de 85% et même de 93%. Les défaites du PQ sont toujours survenues lorsque la participation était faible; l'abstentionnisme n'affecte pas seulement les jeunes car la participation des baby-boomers a baissé de près de 25% depuis 1985 (Gélineau et Tessier, Le déclin de la participation au Québec, UL, p. 49).

Cette hypothèse aurait quatre avantages pour le PQ.

  1. Pas de débat sur le moment d'un référendum car la population n'en souhaite pas.
  2. Pas de discussion entre des partis idéologiquement différents.
  3. Le PQ reconnaitrait alors concrètement qu'il n'est plus le seul véhicule vers l'indépendance.
  4. Le PQ aura une même position face à ses membres, en congrès, et face à la population aux élections. 

Si une majorité pour l'indépendance  (PQ + QS) advenait dans 3 ans ou dans 7 ans, une nouvelle dynamique surgirait alors et tout deviendrait possible... On sait que la conjoncture politique et l'état de l'opinion publique sont absolument imprévisibles.

Face à une telle stratégie du PQ, comment les électeurs de QS, fédéralistes et souverainistes, réagiraient-ils ? Impossible de le savoir. Et les parlementaires QS ? Un refus de ceux-ci d'appuyer la résolution d'un gouvernement enclenchant le processus vers l'indépendance serait-il logique ? 

Le PQ est sorti de l'ambiguïté sur l'objectif, il doit le faire aussi sur la démarche.