Le PQ veut bloquer la réforme électorale

 

Voilà qu’à la sortie de leur retraite de Pohénégamook, le 21 janvier, les libéraux de Jean Charest ont annoncé qu’ils se sont convertis, réalisme électoral aidant, aux vertus du mode de représentation proportionnelle compensatoire qui accorderait à chaque parti un nombre de députés reflétant mieux le nombre de voix qu’il a obtenues.

Puisqu’il s’agit exactement de la réforme que le programme du Parti québécois a préconisé pendant près de 30 ans, on ne pouvait que se réjouir à la pensée que la saga de la réforme du mode de scrutin, qui dure depuis bientôt 40 ans, prendrait peut-être fin au cours de la prochaine législature; les deux principaux partis étant enfin sur la même longueur d’ondes.

Mais c’était sans compter sans l’impayable Guy Chevrette qui, à titre de ministre responsable de la Réforme électorale, a aussitôt opposé son refus en déclarant que les citoyens québécois ne sont pas mûrs pour ce genre de mode de scrutin. Et d’en ajouter de la façon la plus bassement démagogique agitant le spectre du fasciste français Le Pen, avant de décréter que le mode de scrutin actuel - le majoritaire uninominal à un tour - demeure «le moins pire des systèmes».

René Lévesque a dû se retourner dans sa tombe, lui qui, après les élections de 1970 où son parti avait été gravement défavorisé, tonnait avec raison contre «cette démocratie transformée en faux-semblant». La prise de position de M. Chevrette illustre pourquoi, après avoir exercé le pouvoir pendant plus de 13 ans, le PQ n’a pas encore respecté l’engagement pris et renouvelé maintes fois depuis 1969 d’instaurer cette réforme «dans les plus brefs délais après la prise du pouvoir». Mais le comble de l’indignité serait que les héritiers perpétuent maintenant, contre le désir de l’opposition libérale et adéquiste, un mode de scrutin que le fondateur de leur parti a combattu si vigoureusement..

On sait que le système favorise les péquistes de façon aussi aberrante qu’il l’avait fait, les décennies précédentes, dans le cas de l’Union nationale et du Parti libéral. L’élection du 30 novembre dernier en constitue la preuve. En bonne logique politicienne, les ministériels auraient donc résolu de reporter cette réforme aux calendes grecques d’un Québec souverain. Mais en agissant ainsi ils perdraient beaucoup de crédibilité ; ce qui n’aiderait certes pas à la création de conditions gagnantes. Certains reniements coûtent cher. Que le gouvernement Bouchard soit conséquent et assume l’une des principales revendications historiques du Parti québecois.