Kosovo 0 Le Bloc est-il encore... québécois ?

 

Au 41e jour des bombardements de l'OTAN sur la Yougoslavie, le Nouveau Parti démocratique (NPD) s'est dissocié de la politique du gouvernement Chrétien et a réclamé la fin des bombardements. Qu'attend le Bloc pour faire de même ?

Le peuple québécois a une longue tradition de pacifisme et d'opposition aux guerres impérialistes. Lors de la Première guerre mondiale, qui s'était également déclenchée dans les Balkans, les Québécois avaient affronté dans des combats de rue à Montréal et à Québec les troupes canadiennes pour s'opposer à la conscription.

Aujourd'hui, le Bloc remue ciel et terre à Ottawa pour exiger que le gouvernement Chrétien consulte le Parlement afin que le Bloc puisse voter EN FAVEUR de l'envoi de troupes terrestres en Yougoslavie ! Les députés du Bloc sont-ils complètement coupés de leurs racines québécoises ? Y a-t-il un lien entre la position du Bloc sur la guerre au Kosovo et sa nouvelle définition de qui est Québécois ? Une nouvelle définition, anti-nationale et cosmopolite, qui liquide l'histoire, la culture et les traditions québécoises dont ses profondes traditions pacifistes.

La modernisation de la question nationale

Le Bloc nous dit aujourd'hui qu'il veut, à l'heure de la mondialisation, moderniser la question nationale. Il organise des chantiers de discussion et des forums pour revendiquer un rôle international indépendant pour le Québec. Mais, du même souffle, le Bloc vante les mérites du libre-échange qui voit tomber les unes après les autres nos entreprises entre des mains étrangères. Le Bloc prône même l'adoption de la monnaie américaine, ce qui signifie l'abandon d'un des plus importants leviers de politique économique qu'un État puisse posséder. Et, maintenant, le Bloc réclame l'envoi de troupes canadiennes et québécoises pour combattre en Yougoslavie, sous les drapeaux de l'OTAN, en fait sous le drapeau américain !

Est-ce cela qu'on entend par rôle international indépendant pour le Québec ? Est-ce cela qu'on entend par la modernisation de la question nationale à l'heure de la mondialisation ?

Le bloc de quartz

Il y a quelques jours, on pouvait lire dans le New York Times qu'un leader kosovar, rencontrant le président Clinton, peu de temps avant les frappes de l'OTAN, a offert au président américain un énorme morceau de quartz, laissant évidemment entendre qu'il était prêt à concéder aux États-Unis les énormes richesses minérales du Kosovo en échange d'une intervention militaire. C'est avec une bonne dose de mépris que le président Clinton lui a répondu qu'il y avait du quartz dans son État de l'Arkansas !

Nos bloquistes, qui pensent pouvoir acheter le soutien américain à l'indépendance du Québec, en offrant eux aussi leur bloc de quartz , que ce soit sous forme de libre-échange, de dollarisation américaine de notre économie ou d'envois de troupes, devraient méditer ce fait. Ils devraient aussi se demander si les intérêts kosovars sont vraiment bien servis actuellement par l'intervention américaine.

Le nouvel ordre mondial

Dans l'éditorial du numéro de mai du Monde diplomatique, le directeur Ignacio Ramonet rappelle que la conférence de Rambouillet a échoué, alors qu'il y avait accord sur l'essentiel, pour une seule raison 0 l'entêtement des puissances occidentales, et tout particulièrement des États-Unis, à imposer la présence, sur le territoire du Kosovo, de forces de l'OTAN (...) On ne chercha pas à proposer d'autres forces d'interposition européennes ou, par exemple, des casques bleus des Nations unies. Non 0 c'était l'OTAN ou la guerre. Ce fut la guerre.

Tout cela, rappelle Ramonet, parce que la Serbie refuse d'adopter le modèle néolibéral qu'exige la mondialisation. Elle constitue, à la fois, une cible idéale pour l'OTAN, et un fort mauvais exemple pour certains de ses voisins d'Europe de l'Est également accablés par la crise économique et politique. Telle est, au fond, la raison véritable de l'intransigeance de l'OTAN alors que se met en place, sous nos yeux, un nouvel ordre mondial.

Est-ce à ce nouvel ordre mondial néolibéral auquel le Bloc veut nous faire adhérer ? Est-ce cela moderniser la question nationale ? Si tel est le cas, alors il vaut mieux en rester à l'approche traditionnelle et pacifiste de s'opposer à la guerre impérialiste en réclamant l'indépendance du Québec, comme le fit le député J.N. Francoeur en 1917.