L’eau sera privatisée par la langue de bois

 

Privatiser signifie « transférer au secteur privé de l’économie des services normalement distribués par l’État ». Les ministres et les sous-ministres récusent les mots privatisation et déréglementation, afin de ne pas trop attiser nos réactions. Ils préfèrent parler d’imputabilité des opérateurs ou d’obligation de résultats.

Comme le révélait Vision Stratégique, un document présenté aux cadres du ministère de l’Environnement en 1996, le ministère est en voie d’être démantelé. Ce qui signifie, en langue explicite, que le ministère n’offrira plus certains services et que ceux qui les recevaient devront dorénavant s’assurer de répondre par leurs propres moyens aux exigences du ministère. On peut associer ce procédé à une « privatisation par vacuum ». Contrairement à votre aspirateur, cette technique ne fait pas de bruit.

On déménage Montréal à Québec

Dans la région de Montréal, l’équipe régionale responsable de l’assainissement et du traitement de l’eau du MEQ soutient sur le plan technique les initiatives de la Communauté urbaine de Montréal aux prises avec les grandes entreprises polluantes de l’île de Montréal. Au moment même où Québec crée la nouvelle Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), à laquelle il entend confier une responsabilité globale en matière d’assainissement et de traitement de l’eau, le ministère de l’Environnement décide de redéployer vers Québec ses seize spécialistes de l’eau. Et pour s’assurer que la CMM ne puisse bénéficier de cette expertise du MEQ, le ministère annonce clairement que les postes seront abolis si les spécialistes ne déménagent pas à Québec.

Voilà le vacuum créé. La CUM ou la nouvelle CMM n’a pas à son emploi de spécialistes de remplacement. Il nous est facile d’imaginer les firmes de consultants du secteur privé piaffer d’impatience devant la possibilité de combler le trou. À moins que ces derniers ne sachent déjà que ce geste est en réponse à leur demande. Depuis longtemps, ils pressent le ministère de l’Environnement de leur donner du travail, soit directement ou en réglementant plus sévèrement.

On confie la pollution aux pollueurs

Comment croire qu’il y aura une augmentation de la réglementation avec des dents, alors que le ministère de l’Environnement fait tout pour ne pas respecter les règlements existants, et que le gouvernement et le rapport de son comité à la déréglementation, présidé par monsieur Bernard Lemaire, s’opposent en général à toutes règles qui pourraient nuire un tant soit peu aux profits des entreprises! En se dégageant de l’activité, le ministère de l’Environnement laisse la place au secteur privé. C’est-à-dire à une hausse des coûts de l’expertise et à des erreurs de parcours, le tout dû au manque d’expérience terrain de ces nouveaux joueurs. L’ironie du sort serait que le Syndicat des spécialistes de l’eau du MEQ soit remplacé par des entreprises qui sont des filiales des grandes entreprises polluantes de la région métropolitaine.

Voir le dossier de l’abolition des postes de spécialistes de l’eau sur le site Internet de la Coalition québécoise pour une gestion responsable - Eau Secours ! http0//www.eausecours.org