Finis les congés d’équité

 


Les enseignantes réclament leur dû



Manifestation de 12 000 personnes à Québec, congés de devoirs et de leçons, boycott des bulletins et des rencontres avec les parents, journées d’étude. Les profs sont sur un pied de guerre pour faire reconnaître leur droit à l’équité salariale.

La Charte des droits et libertés du Québec adoptée en 1976 reconnaît solennellement le principe de l’équité salariale. « À travail équivalent, salaire égal », affirme la Charte, complétant, cent ans plus tard, le vieux principe « à travail égal, salaire égal » qui se trouvait contourné sur le marché du travail parce que les femmes n’occupent pas les mêmes emplois que les hommes. Qu’il suffise de mentionner que le salaire moyen des femmes ne représente toujours que 60 à 70 % de celui des hommes, bien que leur participation au marché du travail soit passée, de 1976 à aujourd’hui, de 46 % à plus de 72 %.

Mais la Charte est demeurée quasiment inopérante parce qu’elle faisait porter le fardeau de la preuve de la discrimination sur la plaignante. La loi sur l’équité salariale, adoptée par le gouvernement du Parti québécois en 1996 pour donner suite à une promesse arrachée par la Marche des femmes Du pain et des roses de 1994, transfère le fardeau de la preuve sur les épaules de l’employeur. À lui de prouver le 21 novembre prochain qu’il n’y a pas de discrimination ou de démontrer comment il entend corriger la situation.

Tous les employeurs, y compris le gouvernement du Québec, sont concernés, sauf les entreprises de moins de 10 employés. Ce qui exclut tout de même 25 % des femmes au travail.

Tous les moyens sont bons pour contourner la loi

Après avoir pendant plus de cent ans contourné le principe de « à travail égal, salaire égal », les employeurs cherchent aujourd’hui comment ne pas respecter l’esprit de la loi sur l’équité salariale. Cela est également vrai du gouvernement dans le cas des enseignantes et des enseignants.

Après avoir reconnu que l’enseignement était un emploi à prédominance féminine qui nécessitait un correctif salarial, le gouvernement tergiverse. D’abord, il cherche à fractionner la profession en différents niveaux en prétendant que l’enseignement au secondaire ne serait pas à prédominance féminine.

Ensuite, il ne s’entend pas avec la CSQ sur l’emploi à prédominance masculine auquel devrait être comparée la profession enseignante. Enfin, il essaie de grignoter des sous en affirmant que les enseignantes ne travaillent que 35heures par semaine plutôt que 40 heures, ce qui contredit toutes les études menées jusqu’ici par le gouvernement lui-même !

L’équité, c’est la fin du mépris

Les enseignantes ont l’impression qu’on les méprise et il n’y a rien de plus mobilisateur que d’avoir l’impression de faire l’objet de mépris. Cela explique qu’il y avait plus de 12 000 personnes à Québec et que les assemblées générales, très courues, ont adopté à de fortes majorités les moyens d’action proposés par la Fédération des syndicats de l’enseignement de la CSQ. Les jeunes enseignantes sont particulièrement motivées. Elles saisissent bien l’importance de l’enjeu en cours 0 l’établissement des échelles salariales pour plusieurs années à venir.

La classe problème des patrons

La lutte des enseignantes et des enseignants de la CSQ devrait stimuler tous les autres groupes de travailleuses. D’autant plus que les patrons se sont évidemment traînés les pieds et que plusieurs d’entre eux ne seront pas prêts le 21 novembre. Il n’y a rien pour les pousser à plus de célérité. Les pressions du Conseil du patronat, lors de son adoption, ont fait en sorte que la loi n’a pas de dents. Restent les moyens de pression des femmes dont la lutte des enseignantes nous donne l’exemple.