Les fusibles du profit, c’est l’interfinancement

 

Hydro-Québec vient de faire paraître son Plan stratégique 2002-2006. Deux éléments ont retenu l’attention 0 la hausse de tarif pour la clientèle domestique et le recours à des centrales thermiques. L’augmentation des tarifs d’Hydro est basée sur des prémisses très discutables. Hydro veut augmenter son profit pour donner plus de dividendes à son actionnaire, l’État québécois. Ce faisant, Hydro taxe indirectement les consommateurs d’électricité pour financer des services publics ou donner des congés de taxe sur le capital aux entreprises.

Hydro rompt ainsi le pacte énergétique en ne donnant plus les plus bas prix possibles, mais en privilégiant les supposés profits.

Un réflexe conditionné de l’Hydro 0 augmenter toutes les réserves

Ces hausses de tarif produisent plus de revenus supplémentaires que ce qui transparaît dans le profit, puisque à partir de 2002, Hydro veut se doter d’une réserve qui atteindra 2,2 milliards $ en 2006.

La deuxième prémisse de l’augmentation des tarifs est la correction qu’il faudrait apporter à l’interfinancement entre les catégories de clients. La division Distribution d’Hydro-Québec ne ferait pas ses frais, nous dit-on. C’est là une affirmation fort contestable.

Profit ou perte ? C’est selon !

Évaluée à 500 millions $ en 1981, la perte (ou le profit, c’est selon...) imputée à la division Distribution dépend en totalité du prix auquel les kilowatts lui sont facturés.

La Loi modifiant la Loi sur la Régie de l’énergie, écrite sous la dictée d’Hydro, impose un prix de 2,79 cents le kWh, pour les premiers 165 tWh qui sont reconnus comme patrimoniaux. Toute l’électricité vendue au Québec, c’est-à-dire la consommation cumulée des quatre catégories de clients au Québec, n’atteint pas ce chiffre.

Ce 2,79 cents contient donc déjà un profit non négligeable. En 1997, on parlait d’un coût de production de 2,31 cents et, en 1998, plusieurs groupes arrivaient devant la Régie à des coûts similaires. À un coût de 2,31 cents, le prix de 2,79 cents contient déjà près de 20 % de profit. Si on multiplie le nombre de kilowatts vendus en 2000 aux clients domestiques, par ce petit profit resté dans la division Production, on obtient près de 2,5 milliards $ alors que la perte imputée à la division Distribution est évaluée à 500 millions $.

Pour que les coûts de production augmentent...

N’allez pas croire que l’augmentation des coûts de production entre 1997-1998 et 2001 comblera la différence. Dans le secteur de l’hydro-électricité, les coûts de production comprennent peu de main d’œuvre et les grands barrages commencent à être passablement amortis.

Dans les autres provinces qui vendent de l’électricité produite avec de l’eau, les prix ont tendance à diminuer, pas à augmenter, parce que les coûts de production n’augmentent pas. Alors, l’existence de ce profit inclus dans le prix de production est très plausible.

...on transforme les profits en dépenses

On trouve également des profits cachés ailleurs, en ajoutant, au prix du producteur, le prix du transport avant d’en arriver au coût du distributeur. Comme les entreprises qui utilisent une tension supérieure à 45 kV sont réputés ne pas avoir de coûts de distribution, même si c’est impossible, les coûts qui les touchent sont ajoutés aux coûts généraux de transport avant d’être répartis.

Dans les actifs de transport, on trouve également des lignes onéreuses, à courant continu, destinées uniquement à l’exportation. Ces coûts sont additionnés au reste.

En substance, bien que le principe de l’interfinancement ait été inclus dans la Loi de la Régie de l’énergie et que tout le monde le répète comme un mantra, on attend toujours le début d’une démonstration sérieuse de son existence.