Mario Gervais a le TOP 50 dans le collimateur

 


Manifester là où ça compte



Quand je demande à Mario Gervais, le nouveau président du SCFP-Québec, à quel changement il faut s'attendre sous sa présidence, il me tend le dernier numéro de la revue Commerce consacré aux 50 personnes les plus influentes du Québec. « Tu remarques, me dit celui qui vient d'être élu à la tête du plus gros syndicat de la FTQ avec 100 000 membres au Québec, qu'il n'y a aucun politicien dans le TOP 50. Il faut commencer à aller manifester chez ces gens-là plutôt que devant les bureaux de député ou du premier ministre. »

Mario avait en tête, parmi tant d'autres vedettes du TOP 50, Pierre-Karl Péladeau, le p.-d.g. de Vidéotron, qui pense régler ses problèmes financiers en se débarrassant du syndicat dont les membres sont affiliés au SCFP. « Ça va être une bataille à finir », nous dit-il.

Quand le « partenaire » se sauve avec le magot

Cette attitude plus militante, l'ancien président du Syndicat des techniciens et techniciennes d'Hydro-Québec veut l'insuffler à l'ensemble des sections du SCFP qui recouvrent des domaines aussi variés que l'énergie, les affaires sociales, le monde municipal, les communications, le personnel de soutien de l'éducation, les transporteurs aériens, les chauffeurs d'autobus.

« Le temps est révolu où l'essentiel de l'activité syndicale consistait à s'asseoir avec le gouvernement en partenaires. Nous sommes rendus au bout de cette “magnifique expérience ”, lance-t-il avec ironie. Plusieurs ont adhéré de bonne foi à la démarche de partenariat en pensant que les employeurs auraient la sagesse de ne pas tout rafler. Mais on s'est rendu compte qu'ils se sont sauvés avec le magot. »

« La priorité, précise-t-il, c'est la mobilisation, l'implication, la responsabilisation, c'est ce que j'appelle la démocratie participative. L'approche syndicale où on disait aux gens “ apportez-nous vos problèmes, on s'en occupe ” a atteint ses limites. Cela a conduit le mouvement syndicat à recourir de façon démesurée à une approche juridique et à déresponsabiliser les membres. »

Pour une approche structurante

Comment renverser la vapeur? Mario Gervais nous donne l'exemple du Syndicat des cols bleus de la Ville de Montréal, également membre du SCFP, et de leur structure de formation à la base. Mais comment insuffler une telle réforme lorsqu'on est à la tête d'un organisme représentant 100000 personnes ?

« Il faut une vision structurante », nous dit Mario qui entend proposer une démarche en mesure d'impliquer toute la structure du SCFP, des syndicats locaux aux conseils régionaux, et qui culminerait lors des congrès à tous les deux ans.

Pour illustrer son propos, il nous donne l'exemple de la Commission sur la santé et sécurité au travail à laquelle on reproche de contester systématiquement les décisions des médecins traitants plutôt que d'indemniser les victimes. « Tous nos syndicats se plaignent de l'attitude de la CSST, nous dit Mario. Je propose, dans un premier temps, de monter un dossier bien étoffé, bien documenté, avec des propositions de plan d'action. De l'envoyer par la suite dans les syndicats locaux pour qu'on l'analyse, le commente, l'enrichisse, puis qu'il soit discuté à nouveau dans les conseils régionaux et qu'il progresse ainsi dans la structure jusqu'au congrès. Alors, nos 100 000 membres frapperont à l'unisson. »

D'autres questions, comme l'épuisement professionnel et la gestion des fonds de pension, identifiées par le dernier congrès comme majeures feront l'objet d'une approche structurante.

Parallèlement à cette démarche à long terme, le SCFP va évidemment intervenir sur des dossiers d'actualité. Une campagne est en cours contre le désengagement de l'État dans le domaine de la santé et d'autres toucheront l'énergie et le monde scolaire. En plus de Vidéotron, il y a bien entendu la question de l'équité salariale. « Une question simple, mais qui paraît complexe parce que les gouvernements veulent la rendre complexe », commente un Mario Gervais qui nous promet de l'action sur ce dossier comme sur les autres.