Roch Banville, un homme de braise

 


Livre 0 La peau des autres, Non au travail qui estropie, empoisonne et tue!



« Le Dr Banville est un médecin en colère », écrit Émile Boudreau dans la préface de La peau des autres, Non au travail qui estropie, empoisonne et tue !, un livre écrit par le Dr Banville en 1999. Un médecin qui n'a pas peur des mots. Surtout pas peur de dire ouvertement, haut et fort ce qu'il pense. Au début des années 1980, alors qu'il poursuivait une carrière comme médecin de famille et anesthésiste, Michel Chartrand l'a « halé » de Sept-Îles à Montréal.

Michel Chartrand, Émile Boudreau et le Dr Banville sont des complices de longue date. Dans les années 1960, Émile Boudreau travaillait au syndicat des Métallos à Sept-Îles et il fondait en 1977 le Service de santé et sécurité du travail à la FTQ. Quand Michel Chartrand l'enjoint de revenir à Montréal avec lui pour créer la FATA, il accepte. « C'était une nouvelle approche. Je n'avais jamais traité autant de dossiers. J'avais l'impression d'être un 81/2 par 11 et un 8 1/2 par 14 », explique-t-il.

Les travailleurs de la Côte-Nord ont payés mes études

Roch Banville a débuté sa pratique à Sept-Îles. À l'époque, c'était une ville nouvelle, une population jeune, une ville de travailleurs. «Les grands centres étaient des chasses-gardées de docteurs, fils de docteur, descendants de docteurs qui étaient docteurs parents avec un avocat », ironise-t-il. Son choix a été facile à faire. Médecin de famille et anesthésiste, sa clientèle était constituée de patients de tous âges. Il a pratiqué quelque mille accouchements et, à travers ça, traité des travailleurs accidentés qui le consultaient occasionnellement.

Il doit beaucoup aux travailleurs de la Côte-Nord. Ce sont eux qui lui ont permis de payer ses études et, par la suite, son salaire. Certainement pas l'Iron Ore ni la Banque Nationale ! Redevable, il l'est aussi à ses parents, de simples travailleurs gaspésiens qui, par l'exemple, l'ont préparé à son propre engagement social. Si sa mère ne laissait pas le curé se mêler de sa vie intime, son père n'hésitait pas à le confronter pour que les jeunes garçons du village poursuivent leur scolarité au-delà de la 7e année. Michel Chartrand n'avait donc pas à le convaincre lorsqu'il lui a offert de le suivre à Montréal pour mettre sur pied un organisme de défense des travailleurs accidentés. « Un geste médico-social qui respectait le serment d'Hippocrate écrit 4000 ans avant J.-C. dans toute son intégralité », ajoute-t-il.

« Je disais un jour que la date de ma retraite sera burinée sur ma pierre tombale », blague-t-il. Alors, lorsqu'on lui parle de relève…

Qu’est-ce qu’on attend ? Qu’il rende l’âme pour prendre sa relève ?

Pour l'instant, personne. Peut-être songe-t-on à ne pas le remplacer ? Peut-être attend-on qu'il rende l'âme ? Attention ! Roch Banville a de qui tenir. « Dans ma famille, depuis six générations, pas un ancêtre n'est mort en bas de 80ans, nargue-t-il. Mon père s'est éteint tranquillement à l'âge de 96ans et ma mère à 87 ans. Alors, vous devrez attendre encore quelques années », ajoute-t-il à l'endroit de ses principaux adversaires.

D'ici ce temps-là, il essaiera de trouver un médecin qui prendra la relève. «Mais avertissez mes ennemis que je ne démissionnerai pas pour autant, poursuit-il. Du moins jusqu'à ce que ma pierre tombale soit montée. La première date, c'est 1931, la deuxième 200… Tant que ma tête, qui est mon coffre à outils, sera fonctionnelle pour faire face à l'armada d'avocats, de fonctionnaires et de docteurs spécialistes, je serai au poste … »

Roch Banville, La peau des autres, Non au travail qui estropie, empoisonne et tue!, Lanctôt Éditeur, Montréal, 1999, 170 pages.

Autre titre paru sur le même sujet 0 Émile Boudreau, Condamné au suicide, Éditions du Renouveau québécois, Montréal, 1998, 218 pages.