Protégez-nous de Protégez-vous !

 

La revue Protégez-vous est bien connue pour exercer la défense des intérêts des consommateurs et du public en général. Aussi, quelle n’a pas été notre surprise de retrouver, dans son édition de septembre 2002, un dossier sur les écoles privées, présenté comme un « Guide unique – Les caractéristiques de près de 100 écoles privées ».

Pas moins de quinze pages de la revue sont consacrées à cet « imposant dossier comportant toutes les questions à poser avant d’inscrire votre rejeton » qu’on présente comme un « guide pratique, unique en son genre, qui brosse un portrait détaillé de plus de 90 écoles secondaires du Québec ».

Un dossier « embarrassant »

Le dossier, écrit par Julie Gobeil en collaboration avec Jesse Caron, s’intitule « L’embarras du choix ». On y explique les conditions d’admission, d’inscription, les tarifs, l’enseignement et l’encadrement, le pensionnat, le transport.

Le tout est ensuite résumé dans un tableau présentant 91 écoles privées sous 17 rubriques. Difficile d’être plus complet, dira-t-on. Sauf que, curieusement, on passe sous silence le fait que plusieurs de ces écoles aient une vocation religieuse !

La revue reconnaît que l’école privée est subventionnée, mais nulle part elle ne dit qu’elle l’est à hauteur de 85 %. On précise que certains frais sont déductibles d’impôt et on mentionne même que certaines écoles obligent les parents à faire un don pouvant dépasser 1 000 $ à la fondation de l’école.

Dans ce dernier cas, on ne mentionne pas qu’il s’agit d’une entourloupette, d’une façon de contourner la loi et d’émettre un reçu de charité aux parents pour des frais de scolarité déguisés en don. Protégez-vous nous avait habitué à plus de rigueur !

Dans un contexte où l’école publique est sérieusement menacée au Québec par l’expansion de l’école privée à même les fonds publics, il est absolument renversant de voir une revue vouée à la défense de l’intérêt public se joindre à la campagne de promotion de l’école privée de L’Actualité et à l’Institut économique de Montréal, le think tank néolibéral de Mario Dumont.

Au moins le palmarès de L’Actualité reconnaît-il que la réputation de plusieurs écoles privées est surfaite et que des écoles publiques dament le pion à plusieurs établissements privés.

Comment justifier un tel dossier de la part d’une revue dont le mandat est la protection des droits des consommateurs ? La direction de Protégez-vous a-t-elle mesurée l’impact du développement du réseau des écoles privées sur les « consommateurs » des écoles publiques ?

Le dossier est pourtant bien documenté des effets de l’« écrémage » des écoles publiques par le privé 0 baisse du niveau général d’éducation de la population prise dans son ensemble, violence accrue dans les écoles, etc.

Comment une revue comme Protégez-vous dont l’essentiel du financement vient de fonds publics, sous forme de publicité gouvernementale – les seules dans le numéro dont nous parlons –, peut-elle ainsi s’associer au démantèlement de notre réseau public d’éducation ?

En vertu de sa propre politique publicitaire, publiée dans la revue, Protégez-vous devrait refuser toute publicité émanant d’une école privée !