Le pouls de la shoppe

 

* Le 26 août dernier, après huit ans d’absence, je réintégrais mon poste d’opérateur chez Expro-Tec à St-Timothée. Plusieurs citoyens, militantes et militants m’ont demandé pourquoi. Plusieurs s’informaient aussi à savoir comment je trouvais l’adaptation à ma nouvelle situation après huit ans à l’exécutif de la CSN dont trois comme président de la centrale.

Bien entendu, j’aurais pu exercer la fonction de conseiller syndical à la CSN, faire un travail connexe à l’extérieur de la CSN ou prendre ma retraite. Ce n’est pas le choix que j’ai exercé. Comme je l’ai indiqué au Congrès, je suis un militant ouvrier et pour moi continuer à militer comme dirigeant syndical élu était ce qu’il y avait de plus important, lorsqu’on a eu le privilège, comme président de la CSN, de représenter le monde ordinaire, les travailleuses et travailleurs, de s’assurer qu’ils sont respectés par le patronat et les gouvernements.

Je n’ai pas hésité à retourner à mon syndicat de base, le Syndicat national des Produits chimiques de Valleyfield, à travailler au quotidien avec ceux et celles avec lesquels j’ai milité seize ans avant d’être élu à l’exécutif de la CSN en 1994. Mes contributions syndicales se poursuivront donc au niveau de l’exécutif de mon syndicat, en santé-sécurité et dans la lutte contre la mondialisation néolibérale avec le Conseil central de la Montérégie (CSN) et au niveau national, en matière politique de santé, comme représentant de la population dans le conseil d’administration du CHUM (Centre hospitalier universitaire de l’Université de Montréal). J’ai aussi l’intention de contribuer au débat sur la relance de la course aux armements et de la mondialisation de l’industrie militaire dans le contexte actuel.

Les débats à la salle à manger de l’usine

Souvent, comme dirigeant syndical, j’ai eu l’occasion de discuter, lors de tournées où je rencontrais les membres de la base, des préoccupations et débats politiques de l’heure. Hélas, trop souvent, je manquais de temps pour aller en profondeur dans ces discussions.

Aujourd’hui, avec mon retour à l’usine, je peux prendre le temps qu’il faut pour écouter et débattre sur le fond.

Principal constat 0 Passer du national au local, c’est certes un changement de point de vue, mais la réalité, elle, ne change pas. Les débats politiques entre ouvriers à la salle à manger de l’usine sont de trois ordres 0

1) La crise boursière et les rendements négatifs des fonds de pension et des REER. Quels en seront les impacts sur la retraite et la qualité de vie à la retraite ?

2) La perte de crédibilité du PQ et du PLQ comme partis politiques et l’ADQ comme alternative de changement.

3) La menace de guerre entre « l’empire américain » et l’Irak. Bush osera-t-il ?

Ces trois thèmes traversent les conversations avec plus ou moins d’intensité selon l’actualité, et prennent la couleur que les médias donnent aux événements qui composent la conjoncture.

Ces trois thèmes interpellent le mouvement syndical dans ses responsabilités d’éducation économique et politique de ses membres. Les syndicats doivent aussi intensifier, en lien avec les forces progressistes, leur lutte contre la mondialisation néolibérale et pour une mondialisation où l’économie sert le social. Ce qui signifie que nous devons aussi nous opposer de toutes nos forces aux objectifs et plans de guerre de « l’empire américain ».

Des réponses rapidement

Car, dans ce contexte de mondialisation, plusieurs rapports rendus publics aux États-Unis par des experts (dont Mme C. Rice, conseillère à la Sécurité nationale du président Bush) considèrent qu’une atteinte aux systèmes globaux financiers, commerciaux et aux ressources énergétiques serait une menace contre les intérêts nationaux des États-Unis. Ce qui signifie qu’une telle menace est passible d’une intervention militaire pour protéger les intérêts économiques au même titre qu’une attaque avec des armes de destruction massive.

Cette approche est renforcie depuis le 11 septembre 2001 par la mise en place d’un Bureau de la sécurité nationale, dont le budget est de 37,5 milliards de dollars dans le budget 2003 et dont la mission est d’intégrer l’industrie de la sécurité et de la défense.

Que faire avec la baisse de capitalisation de nos fonds de pension et à la veille de la sortie massive des baby-boomers du marché du travail ? Quelle sera la stratégie syndicale pour contrer les demandes de concessions que le patronat et l’État ne manqueront sûrement pas de nous demander aux tables de négociations ?

Avec l’absence d’alternative politique ayant une influence réelle et les déclarations de Mario Dumont affirmant que « ce n’est pas les syndicats qui vont diriger le Québec », quel sera le rôle des syndicats et des forces progressistes dans la pré-campagne et, par la suite, la campagne électorale, le printemps prochain ?

Est-ce que le mouvement pacifiste va reprendre le combat au Québec ? Les organisations syndicales y seront-elles présentes ?

Ces questions doivent trouver des réponses rapidement. C’est de notre devoir de militants et militantes d’en débattre avec nos membres. Le temps presse, l’hiver néolibéral, que nous croyions sur son déclin avec les mobilisations du Forum social mondial et le Sommet des Peuples, ne semble pas vouloir se terminer.

*Militant syndical