Colin Powell au Conseil de sécurité : « Du plagiat mesquin »

À titre de politicologue et d’analyste de la politique irakienne à l’Université de Cambridge, Glen Rangwala passe en revue la majorité des textes publiés sur le régime de Saddam Hussein. Aussi, le 2 février dernier, lorsque le premier ministre Tony Blair a rendu public un rapport sur la menace irakienne supposément préparé par les services secrets britanniques, a-t-il remarqué que le document lui semblait bien familier. Un examen plus attentif lui permettra plus tard de révéler à la face du monde un scandale immense : le document était en fait copié sur les travaux d’universitaires, qui se basaient eux-mêmes sur des données datant de la première guerre du Golfe. L’affaire revêtait une importance encore plus capitale du fait que c’est ce rapport britannique que Colin Powell a utilisé pour justifier le déclenchement de la guerre lors de son discours au Conseil de sécurité des Nations unies.

Dans un article publié dans la dernière édition de Global Outlook, Rangwala explique qu’il lui a été facile de découvrir que la majeure partie du rapport avait été plagiée à partir de la version en-ligne des articles en question. Le travail aurait d’ailleurs été passablement bâclé car même les erreurs de typographie et l’usage inapproprié de la ponctuation qu’on pouvait retrouver dans les travaux universitaires sont reproduites dans le rapport.

De plus, le fait que le rapport contienne des passages intégraux de trois textes différents amène à d’autres anomalies peu courantes dans les documents officiels, par exemple l’épellation différente du parti Ba’th, dépendant de l’auteur qui est plagié dans le passage. Notons aussi que les auteurs originaux n’ont jamais été contactés par le gouvernement britannique afin d’obtenir leur approbation ou à tout le moins les prévenir que leurs textes seraient utilisés.

Autre point à noter : lors de la diffusion initiale du rapport en format Word, les propriétés du fichier révélaient les noms de ses quatre auteurs, noms qui furent retirés du fichier dans l’espace de quelques heures. Après vérification, les quatre individus se sont révélés être des responsables des relations avec la presse au gouvernement britannique. Aucun d’entre eux ne travaillait pour les services secrets. On repasssera pour ce que Powell dégrivait comme des « faits et conclusions basés sur un travail de renseignement solide ».

Face à ces irrégularités, Rangwala souligne qu’on ne peu que douter des motifs évoqués par l’axe américano-britanique pour justifier la guerre. Il explique que dans ce cas précis, ou bien les services secrets ne furent pas consultés, ou bien ils l’ont été et ont fourni des informations qui ne cadraient pas avec les affirmations des politiciens. Ainsi, à court d’arguments pour justifier la position américaine, les britanniques auraient eu recours à du « plagiat mesquin ».