Blair et Bush n'ont songé qu'à leur réélection

Du suicide du docteur Kelly à la démission du docteur Key

Le 27 septembre 2002, à Denver, Colorado, George W. Bush déclarait « que par égard pour l’avenir de nos enfants, nous devons nous assurer que ce fou n’ait jamais la capacité de nous frapper avec une arme nucléaire ou d’utiliser les stocks d’anthrax que nous savons qu’il possède. »

Quand la poussière est finalement retombée après l’invasion de l’Irak par les forces américano-britanniques, il est rapidement devenu évident pour tous qu’il n’y avait pas d’armes de destruction massive (ADM). Visiblement embarrassé et confronté à un scandale imminent, l’administration Bush a cherché à sauver la face en concoctant sa propre « expédition de chasse » avec le soi-disant Groupe de surveillance de l’Irak, dirigé par le Dr David Kay, un spécialiste du renseignement, trié sur le volet par la CIA.

Dans son message sur l’état de l’Union du 20 janvier 2004, le président Bush a laissé entendre, sous les applaudissements, que le Groupe de surveillance, fort de ses 1400 membres, avait finalement trouvé les armes de destruction massive.

« Déjà, le Rapport Kay a identifié des douzaines de programmes reliés aux armes de destruction massive et quantité d’équipements que l’Irak a cachés aux inspecteurs de l’ONU. Si nous n’avions pas agi, le dictateur aurait poursuivi ses programmes de développement d’ADM », a déclaré Bush.

Ironiquement, trois jours plus tard, l’homme de confiance du président Bush, le Dr Kay, non seulement remettait sa démission en tant que « conseiller spécial » de George Tenet, le directeur de la CIA, mais réfutait, en termes non équivoques, l’essence même de ce que le président avait déclaré dans son message sur l’état de l’Union.

« Je ne pense pas qu’elles existent, a-t-il déclaré. Ce dont tout le monde parle, ce sont des équipements produit après la fin de la guerre du Golfe et je ne pense pas qu’il y ait eu de programme de production d’ADM sur une grande échelle au cours des années 1990. » (Agence Reuters, 24 janvier 2004)

Deux semaines plus tard, c’était au tour de George Tenet de déclarer que la CIA « n’a jamais affirmé qu’il y avait une menace imminente » en provenance de l’Irak. Cette idée, a-t-il déclaré, émanait de la Maison Blanche. Est-il nécessaire de rappeler que la CIA informe le président Bush sur une base quotidienne et est une des principales sources des renseignements trafiqués ?

De plus, l’ancien secrétaire au Trésor, Paul O’Neil, a confirmé au cours du mois de janvier, lors d’une entrevue à l’émission « 60 Minutes » du réseau CBS que Bush avait planifié l’invasion et l’occupation de l’Irak bien avant les événements du 11 septembre 2001. Ce dont avait besoin l’administration Bush (de même que le Pentagone et la CIA), c’était un pretexte pour envahir et occuper l’Irak.

Autrement dit, le président Bush a été démasqué comme un menteur et un criminel de guerre « de l’intérieur » par des hauts responsables de sa propre adminstration, incluant ses proches collaborateurs. Et c’est avec ce dossier qu’il se presentera aux éléctions présidentielles en novembre 2004.

Pendant ce temps, en Grande-Bretagne, était rendu public le rapport de la Commission Hutton, mise sur pied pour enquêter sur le « suicide » du Dr David Kelly, l’expert en armes biologiques. Qualifié par les médias britanniques de camouflage, le rapport Hutton a permis, tel que prévu, au premier ministre Tony Blair de se justifier, lui qui avait été accusé d’avoir « exagéré » la menace d’ADM de l’Irak dans les mois qui ont précédé l’invasion. Toutefois, le rapport demeure évasif sur les causes de la mort du Dr Kelly. Était-ce un suicide ou un assassinat politique ?

Après la publication du rapport, le premier ministre Tony Blair a exigé des excuses de la part de la BBC pour l’avoir accusé d’avoir « embelli » les documents des services de renseignement pour mieux vendre la guerre. Les deux principaux dirigeants de la BBC ont démissionné pour protester contre l’ingérence du gouvernement.

Les mensonges du duo Bush-Blair concernant les soi-disant armes de destruction massive de l’Irak sont considérables, depuis les preuves totalement falsifiées présentées par Colin Powell au Conseil de sécurité de l’ONU au mois de février 2003, jusqu’au faux dossier sur l’uranium du Niger en passant par les nombreux récits inventés sur les supposés liens entre Oussama Ben Laden et Saddam Hussein.

N’oublions pas non plus les « sales coups » révélés par Katharine Gun (une traductrice au centre de traitement du renseignement électronique britannique), qui a coulé un mémo, daté du 31 janvier 2003, de l’Agence de sécurité nationale des Etats-Unis qui décrivait les plans de Washington pour espionner les délégués au Conseil de sécurité de l’ONU.

Le but était d’obtenir des « informations qui auraient pu donner un avantage à Washington dans ses plans » pour envahir l’Irak. Le stratagème ne visait pas seulement les six membres « hésitants » non-permanents du Conseil de sécurité (Angola, Cameroun, Guinée, Chili, Mexique et Pakistan), mais il ciblait aussi la Chine, un membre permanent du Conseil de sécurité.

Nous sommes entrés dans une nouvelle phase du « Nouvel ordre mondial ». Un État policier se deploie à l`échelle planétaire. La liberté de presse est à toutes fins pratiques inexistante.

Ce qui est encore plus sérieux, c’est que toute personne qui défie la « version officielle » de la vérité doit s’attendre à faire face à la prison ou à une « mort accidentelle ». Ainsi, Katharine Gun pourrait être condamnée à deux ans de prison « pour avoir agi selon sa conscience et avoir rendu public le memo sur l’espionnage des membres de l’ONU ».

Le Dr David Kelly est réputé s’être suicidé (selon les conclusions du rapport Hutton) et il en est de même pour John J. Kokal, un expert en armements de la section renseignements et recherche du Département d’État.

Nous sommes donc devant la situation suivante : Bush et Blair, deux menteurs de grand chemin et des criminels de guerre, s’en tirent en enfreignant les lois internationales, en tuant des milliers d’innocents et en nous conduisant dans un siècle de « guerres sans fin », alors que ceux qui alertent l’opinion publique sont soit punis pour leurs actes ou poussés à commettre l’irréparable.