Les entreprises d’économie sociale : un beau prétexte ?

Au moment où les entreprises privées à but lucratif connaissent un certain essor, une autre sorte d’entreprise a déjà fait son apparition : les entreprises d’économie sociale en aide domestique (EESAD), créées par l’État en 1996 afin de combler la demande.

Toutefois, une étude sur les services des organismes intermédiaires dans le domaine de l’aide et de soins à domicile au Québec, réalisée notamment par Éric Gagnon et Francine Saillant en 1999, révèle que « de nombreuses auxiliaires familiales et sociales pensent que les entreprises d’économie sociale ont servi de prétexte au gouvernement pour ne pas employer davantage d’auxiliaires dans les CLSC ».

De plus, obligés de choisir entre les entreprises privées et les entreprises d’économie sociale, les travailleurs des CLSC préfèrent que les services d’aide domestique soient assurés par ces dernières, à cause de leur rôle social, puisque leur objectif est de réinsérer des personnes sur le marché du travail en proposant des emplois de qualité et des services de qualité aux particuliers.

Ils regrettent cependant que « l’économie sociale ne ramasse que les secteurs les moins rentables des services » et souhaiteraient voir ces secteurs se développer. C’est pourquoi certains CLSC recommandent les entreprises d’économie sociale aux patients lorsqu’ils ne peuvent pas eux-même répondre à la demande. Pour eux, ces entreprises garantissent « une meilleure qualité de services que le travail au noir ou les travailleurs de gré à gré ».

De plus, les tarifs pour les particuliers sont tout à fait abordables puisqu’ils se situent entre 4$ et 12 $/heure, dépendamment du salaire perçu par le demandeur. Celui-ci bénéficie en outre d’un programme d’exonération financière pour les services d’aide domestique (PEFSAD). Les services reconnus par le PEFSAD comprennent notamment « le ménage léger et lourd, la lessive et le repassage, l’approvisionnement et autres courses, la préparation des repas sans diète, certains travaux d’entretiens extérieurs comme le déneigement, l’entretien du terrain et les réparations pour l’entretien du domicile ».

À cela, il faut ajouter que les personnes âgées de plus de 70 ans qui font appel aux entreprises d’économie sociale ont droit à un crédit d’impôt, notamment pour les services suivants: « l’entretien ménager, l’entretien extérieur de la maison et la préparation de repas ». Les septuagénaires ont donc droit à un crédit d’impôt de 23 % du coût des services sur un montant maximum de 2760 $/an.

Néanmoins, Yves Vaillancourt, François Aubry et Christian Jetté ont analysé le secteur de l’économie sociale dans les services à domicile en 2001 et ont constaté que les entreprises d’économie sociale avaient quelques difficultés à se développer et à payer leurs employés convenablement. Actuellement, le salaire moyen du personnel se situe entre 8 $ et 8,30 $ l’heure. C’est pour ces raisons que certaines d’entre elles ont décidé d’étendre leurs champs de compétence dans les services de l’hygiène personnelle et du gardiennage. À ce moment-là, les entreprises ne peuvent pas bénéficier de subventions pour ces services puisqu’elles ne respectent pas les accords gouvernementaux.

Par ailleurs, dans certains cas, les entreprises risquent de se substituer aux auxiliaires familiales et sociales des CLSC et aux bénévoles d’organismes communautaires alors qu’elles ne sont pas forcément aptes à prodiguer de tels soins. Les problème lié au non-respect du mandat des entreprises en aide domestique n’a pas la même portée selon les régions car, dans certaines localités, les CLSC n’offrent qu’une aide à domicile restreinte et font appel aux agences privées pour combler ce manque. Dans ce cas précis, c’est le privé qui se substitue au secteur public. Toutefois, le problème lié à la formation des employés des EESAD pour prodiguer des soins personnels reste toujours présent.